Les Templiers   Commanderies de Belgique   Les Croisades

Commanderies Belges par Laurent Dailliez

Retour

Etude de M. Laurent Dailliez

Villers-le-Temple

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté française de Belgique, Province: Liège, Arrondissement: Huy, Commune: Nandrin


Commanderie de Villers-le-Temple
Tour et enceinte de l'ancienne commanderie de l'ordre du Temple.


Le 28 février, mourait Gérard de Villers, donateur, fondateur et premier commandeur de Villers au Liège, pour mémoire, nous devons rappeler que dans la province de Liège comme dans la plupart des pays occidentaux l'année commençait le jour de Pâques. La pierre tombale porte ainsi la date de 1273. Or en 1273 la fête de Pâques tombait le 9 avril, d'où dans notre compte actuel l'année de 1274. Ceci pour mettre en échec les affirmations de spécialistes (sic) qui dans le catalogue d'une exposition sur l'Ordre du Temple se targuait de cette phrase « la lame funéraire de frère Gérard de Villers, mort, affirme l'inscription tombale, le dernier jour de février 1273 » (1). Voilà comment on crée l'histoire, comment on induit en erreurs les « non spécialistes » (!)

Cette affirmation est d'autant plus regrettable qu'elle émane de madame Claire-Agnès Clercs, professeur de français à l'Athénée de Liège et que vient confirmer l'article dont nous reparlerons, dans le même catalogue, sous la signature de madame Françoise Clercx-Léonard-Etienne, licencié de l'Université de Liège et bibliothécaire aux Chiroux (2).

La pierre tombale de Gérard de Villers est la seule au monde représentant un Templiers en habit de maison et à l'occasion de la mort, du VIIe anniversaire-centenaire, il est nécessaire de faire le point et de mettre en valeur non seulement le monument en lui-même, mais aussi l'habit des frères du Temple décrit dans la Règle, mais dont nous possédons l'image réelle. Il est aussi nécessaire de connaître ce commandeur sur lequel on a tant et tant brodé (3).

L'erreur la plus abominable, celle qui prouve une méconnaissance totale des archives de l'Ordre du Temple et surtout celles de la commanderie de Villers, se trouve dans l'article genèse de ce catalogue sous la signature de Mme Agnès Clercx qui nous révèle ex cathedra que « la plupart des chartes relatives à notre région au Moyen Age ont disparu dans l'incendie qui à la suite du bombardement, ravagea le dépôt des archives de Mons. » Cela est complètement faux, car il reste des documents et que devons-nous faire alors des manuscrits de DEVILLERS qui a répertorié dans un inventaire analytique toutes les archives de Mons et principalement celles des Ordres militaires.

Assurément, si l'on se fie uniquement au livre de Léonard (4) comme le font d'autres spécialistes (sic) de groupes Templiers on sera bien surpris de voir que Gérard de Villers n'est pas si ignoré que l'on veut nous le faire admettre et croire.
Dans le deuxième partie de ce catalogue: Temple et Malte (on se demande bien si cette exposition était pour les Ordres militaires ou pour un rassemblement de calices, de ciboires et autres custodes et ostensoirs), il était navrant de constater que rien n'était dit ou fait sur Gérard de Villers et que les quelques mentions qui y étaient faites n'étaient que des resucées où des bribes sur l'Ordre du Temple qu'il n'y avait rien sur les Templiers dans la Belgique actuelle.

Au Moyen Age la pierre tombale, ou lame funéraire, comme l'on voudra que l'on soit ésotérique ou non, est la source importante pour l'étude du costume. Les quelques pierres tombales que nous avons pu répertorier, concernant les Templiers, nous montrent, malgré leur extrême rareté, nous montrent les frères en habit de guerre ou seulement des armoiries, cela prouve bien que le chevalier avait combattu, ce qui n'est pas le cas de Gérard de Villers. En outre les frères ne portent jamais la lance au contraire de certains seigneurs. Ce qui fait réfuter comme chevalier du Temple la représentation du Temple de la Roche dans la Vienne. Un Templier, un Hospitalier, un chevalier de Saint-Lazare comme d'ailleurs chez les Teutoniques, l'épée seule était le symbole de la défense de la foi et non la lance Or, au Moyen Age la symbolique était significative et ce n'est pas parce qu'en occident la véritable initiation est passée que nous devons laisser de côté les éléments primordiaux de cette science.

Les pierres tombales templières sont rares et il ne faut pas classer de Templiers toutes les pierres se trouvant dans les églises de l'Ordre.
Beaucoup ont disparu depuis la Révolution, mais les gravures comme les archives nous présentent leurs dessins, ce qui permet de donner une vue exacte de la situation.

Le témoignage le plus frappant que nous ayons d'une pierre tombale de chapelle templière mais qui ne représenta pas de Templiers est celle de la commanderie de Coulommiers conservée aujourd'hui au musée de Rouen. D'abord les archives nous précisent de qui il s'agit — Frère Simon Hardy — et ensuite que ce commandeur vivait au XVe siècle. Cela fait suite aux mentions du livre des Us et Coutumes de l'Ordre du Temple, que nous avons eu la joie de retrouver en trois exemplaires et qui interdisait d'élever des mausolées aux frères du Temple à moins qu'ils soient fondateurs de commanderies ou encore qu'ils se soient distingués. Même dans certaines tombes la simplicité de l'Ordre est maintenue. La pierre tombale de Guillaume de Beaujeu ne le représente pas en effigie, il en est de même de celle de frère Arnaud de Wesemale qui était commandeur de Brie au XIIIè siècle. Nous n'avons que la représentation de leurs blasons.

La cérémonie funéraire chez les Templiers était très simple et si la règle nous transmet les prières à réciter, c'est le livre des Us qui nous renseigne sur la manière dont étaient enterrés les frères. Ils sont mis à même la terre, les bras croisés sur la poitrine. Les élucubrations émises par certains auteurs, dont le principal n'en reste pas moins Louis CHARPENTIER, sont une nouvelle fois rejetées par les textes.

Gérard de Villiers

Qui est donc Gérard de Villers ? Le fondateur de cette commanderie, qui deviendra par le chapitre provincial de Paris de 1262, commandeur majeur de l'Ordre n'est pas si méconnu qu'on ne l'a cru ou qu'on ne l'a dit. On l'a qualifié de seigneur d'Abée ou avec le nom de Gérard d'Abée de Villers, or Gérard, comme ses prédécesseurs, s'il avait quelques biens dans cette seigneurie n'en porta jamais le titre ni dans son entier, ni dans la coseigneurie. Il n'en est pas de même de sa sœur comme nous allons le voir.

Le père de Gérard de Villers n'était autre que Sébastien ou Bastien que nous trouvons dans les actes des princes évêques de Liège durant la première moitié du XHIè siècle au cours de diverses donations pieuses qui tôt ou tard reviendront dans la manse des chevaliers du Temple de Villers.

Gérard était seigneur de Villers seulement, chevalier et fils de chevalier, ainsi que le demandait la règle. Par les actes de la commanderie nous savons qu'il avait été marié à une certaine Marguerite de la famille des Trangel ou Frangel et qu'elle était alliée aux seigneurs de Moha et Neuville. C'est vers 1240-1245 que Gérard, quittant le monde après son veuvage, entra dans l'ordre du Temple et y mourut, apportant tous ses biens comme le demandait encore les institutions.

La famille de Villers est connue dès 1131 dans une charte émanant de l'évêque de Liège et concernant l'abbaye de Saint-Lau- rent , située dans la ville épiscopale (5). Au mois de juin 1223, l'évêque de Liège notifie que Bastien de Villers tenait en fief la diine de Villers et de Clémodeau. Or cette dîme sera donnée par la suite à l'abbaye de Flône et reviendra en 1260 aux Templiers. Le 29 mars 1225 — et non en 1224, car cette année-là Pâques tombait le 14 avril — le même Bastien signe en témoin un acte concernant l'abbaye d'Herkenrode (6). La même année, sans précision de mois, un document plus complet sur la famille nous montre Bas- tien en compagnie de son frère Frastedus donnant les dîmes qu'ils avaient à Abée à l'abbaye d'Ay wières (7). Ces trois actes sont primordiaux pour nous montrer les origines familiales de Gérard de Villers.

Ce sont toutefois les actes du temple qui permettent de donner une idée plus juste de la question. Le premier acte faisant état de Gérard de Villers est daté de 1251 et concerne la commanderie de Beaulieu les Valenciennes. Au mois de février de cette année, un chapitre provincial était réuni dans ce lieu au sujet de la fondation de cette commanderie. On y trouve comme participants et signataires frère Guy de Basainville, maître du Temple en France, Thierry Denis, maître en Hainaut, Wautier de Villers et Gérard de Villers. Pour ces deux derniers leur titre et dignité est facile à trouver. Gérard de Villers succéda comme commandeur en Hesbaye à Wautier de Villers, vers 1250. Wautier de Villers, le 28 avril 1248 était commandeur d'Hesbaye lors de la signature d'une transaction avec l'abbaye de Saint-Hubert (8) et nous le trouvons le 15 mars 1250 comme commandeur de Flandre (9).

L'action de Gérard de Villers au cours de sa vie de com-mandeur de province sera importante et nous le rencontrerons durant les années qui marque sa fonction dans les plus hautes charges de l'Ordre.
1251. — février — Successeur de Wautier de Villers (10).
1257. — 3 juin — commandeur des maisons de Brabant et d'Hesbaye (11).
1257. — 9 août — commandeur du Temple en Hesbaye (12).
1260. — 16 novembre — proviseur des maisons du Temple en Hesbaye (13).
1262. — 5 février — commandeur en Brabant et Hesbaye (14).
1262. — juillet — commandeur en Brabant et Hesbaye (15).
1263. — 6 février — commandeur en Brabant et Hesbaye (16).
1265. — 5 février — proviseur de la maison Sainte-Marie (17).
1265. — février — précepteur des maisons du Temple en Brabant Hesbaye et Condroz (18).
1265. — 20 novembre — Maître Gérard du Temple (19).
1268. — 23 juin — précepteur de la maison du Temple de Villers (20).
1273. — 28 février — fondateur de Villers.

Ces interventions du commandeur montrent tout l'intérêt et l'importance qu'attachait l'Ordre du Temple à la représentation des maîtres provinciaux qui, par leur dignité et leur fonction, n'étaient autre que les délégués de l'ensemble des frères.
Le 3 juin 1257, Gérard de Villers est cité en qualité de Commandeur en Brabant et Hesbaye, dans un acte concernant l'abandon fait par les Templiers de La Braque au monastère de Rosendal (22) de la dîme d'Ouwen (23). Par cet acte, on constate alors que frère Gérard a succédé dans sa fonction de commandeur en Brabant à frère Inguelran (24).

Mais c'est le 9 août que tout va s'éclairer. Gérard de Villers confirme la donation de ses biens à l'Ordre du Temple.
C'est en présence du seigneur de Moha (25) que les frères du Temple reconnurent avoir reçu de frère Gérard qui est dit, « commandeur des maisons du Temple en Hesbaye », tous les biens qu'il possédait lui-même et ceux de sa défunte épouse tant en bois, près, cens, rentes et dîmes.

A travers de ce document on s'aperçoit que la sœur du donateur était premier seigneur d'Abée et qu'elle avait des biens situés à Villers qu'elle échange pour que les Templiers possèdent l'ensemble des biens de la famille. Le cadastre qui nous est ainsi donné dans ce document est des plus intéressant car il permet de mettre en valeur non seulement certaines possessions, mais aussi de redonner au village de Villers plusieurs éléments historiques beaucoup plus réels.

Il y a en premier lieu l'église. Elle existait bien avant 1260 puisqu'en 1257 il en est déjà question avec des dîmes. Le 16 juin 1223, dans l'acte de l'évêque de Liège, Bastien de Villers recevait la confirmation de la restitution de la dîme sur l'église paroissiale de Villers. Cette mention prouve au moins que celle-ci existait déjà, ce qui est contre les données de Th. Pirard dans son étude très contestable sur Villers-le-Temple (26).

Une erreur encore plus grossière s'est glissée dans cet opuscule et cette erreur fausse complètement l'histoire de la commanderie de Villers-le-Temple. Il est dit en page 5 que l'abbaye de Flône cède « à un certain Gérard, originaire de Villers, chevalier de l'Ordre du Temple, les domaines de Villers et de Clémodeau, y compris le droit de patronnage sur l'église paroissiale dédiée à Saint Pierre en échange d'autres biens que l'ordre du Temple possède en Hesbaye et d'une soulte de 300 marcs liégeois. » Cela est complètement faux, car s'il fallait que les Templiers donnent ce qu'ils possédaient en Hesbaye, beaucoup de commanderies n'auraient jamais vu le jour. Mais que nous dit le document émanant de l'abbaye de Flône et daté du 16 novembre 1260. L'abbé et le couvent donnent CE QU'ILS ONT dans le lieu (villa) de Villers et de Clémodeau ainsi que les appartenances tant en terres, près, pâturages, bois, dîmes et le patronnage de l'église. Il y a une différence entre ce que les chanoines ont et les domaines. Les religieux de Flône n'avaient pas tout le domaine. Les frères du Temple donnent en échange non pas ce qu'ils ont en Hesbaye, mais ce qu'ils avaient au territoire de Geer. Ce lieu de Geer est situé à 8 kilomètres Sud-Ouest de Waremme et l'échange comprenait seulement trois bonniers de terre. Si ce sont là les biens du Temple en Hesbaye, ce n'est pas grand-chose alors que les Templiers avaient déjà les maisons de Huy, Montjoie-Warnan-Drye et Corswaremme. On constate qu'il n'est question que de Villers et de Clémodeau, lieux-dits de la commune alors que Pacte du 9 août donnait déjà les Forges, le bois de Castadin, le lieu de Sart. Nous sommes, en présence de ce document, à un remembrement de premier ordre pour une unité de territoire par les Templiers (27).

On remarque alors (pie traduire un texte comme nous l'avons, l'extrapolation est facile, mais induit en erreur tous ceux qui suivent cet auteur.

Que dire aussi d'un certain Gérard. Le document ne signale pas un certain mais bien frère Gérard, proviseur des maisons du Temple en Hesbaye: et frater GERARDUS, provisnr domorum Militie Templi in Hesbania. On constatera à l'intérieur de cet opuscule trop d'erreurs qui faussent complètement l'histoire de ce charmant village condruzien.

Les divers actes de donations précisent en outre l'existence d'une maison qui existait déjà puisqu'en 1268, l'évêque de Liège confirme la donation de la petite tour qui est, avec la maison, dans le jardin situé devant l'église Saint-Pierre. On se demande alors où Th. Pirard est allé chercher les affirmations qu'il révèle.

Quoiqu'il en soit, c'est sous le magistère de Gérard de Villers que fut fondée la chapelle dédiée à Notre-Dame. L'inventaire de 1313 (28) ne la signale pas, ce qui est normal puisqu'il est question uniquement des biens. Par contre l'enquête de 1372, demandée par Grégoire IX la mentionne ainsi que le record de l'Ordre de Malte de 1695 (29).

Tous les actes signalant Gérard de Villers nous le montre comme un homme prudent et sage, grand administrateur ne regardant que les intérêts de son Ordre tout en esseyant de transiger dans la paix. Dès 1262 sa juridiction s'étendra sur toutes les maisons situées dans la province de Liège, le comté de Namur excepté.

Pierre Tombale

Il est difficile de suivre à la lettre les directives de certains pour reconnaître les pierres tomables ou pas. Les données générales de Lasteries et d'Enlart ne sont plus tout à fait valables pour les cas particuliers. Il n'est pas obligatoire aussi que les noms et date de décés soient toujours mentionnés. Il en est de même de la facture concernant la pierre employée. Seule la géologie du lieu permet de renseigner au mieux.

Par contre il existe au Moyen Age une symbolique et le symbole est quelque chose de simple. Nous remarquons alors que sur toutes les pierres tombales diles templières, nous devons retrouver l'initiation à la Règle et aux Us et coutumes de l'Ordre.

La pierre de Gérard de Villers nous le montre en habit de maison et tout concorde avec le texte de la règle.

Ce qui frappe avant tout est la robe, sculptée avec souplesse suivant les courbes du corps, creusant ainsi des plis plus apparents dans le relief. C'est le domaine artistique. Les frères du Temple, dans les maisons, doivent porter une tunique à manches étroites, serrée à la taille par une cordon — la fameuse cordelette. Cette tunique était en giron devant et derrière. Tout le corps était ensuite enveloppé dans le grand manteau attaché au cou par une agrafe et la bride de cuir. Sur le manteau se trouvait la croix rouge de l'ordre.

La règle précise ce fait: il doit avoir une chape, une cotte et une courroie de cuir pour ceinture (30). Les frères doivent agrafer leur manteau et aller bellement et en paix (31)... Il doit tenir son habit de telle manière qu'il soit attaché à son cou (32). Il doit être revêtu de son manteau sauf que les attaches doivent être hors du col quand il prend pénitence (33)...

Cette tenue est aussi la tenue d'Eglise: la couleur est blanche, le tissus est de laine ce qui, dans la symbolique monastique est signe de pauvreté et de rien d'autre. Lorsque les grandes réformes monastiques voient le jour aux Xlè et Xllè siècle, les législateurs adoptent le blanc comme signe de pauvreté, car il n'y a pas de teinture. Le mouton jusqu'à preuve du contraire donne une laine blanche (34). Les Ordres fondés à cette époque, on le remarque, adoptent tous le blanc: Camaldoli, Chartreux, Prémontrés, Cisterciens, chanoines de Saint-Victor et autres chanoines réguliers, frères des blancs manteaux, etc.

Au travers de cette pierre on remarquera une chose très importante, que seule la symbolique permet de révéler. Gérard de Villers n'est jamais allé à la Croisade et n'a jamais combattu. Si le commandeur-fondateur avait porté seulement une fois les armes il aurait été représenté en arme, avec les attributs traditionnels, montrant s'il est mort au combat ou dans son lit.

Malheureusement la tête de frère Gérard a été mutilée non pas par les iconoclastes, mais par les pieds de ceux qui sont allés à confesse, puisque la pierre avait été placée, après la Révolution, lorsqu'elle fut transportée dans l'église, sous le confessional et l'emplacement de la tête servi de repose pieds. Toutefois les pho-tographies en lumière rasante montre que le commandeur a les yeux ouverts, les cheveux bien rangés, ramenés en boucle à hauteur des oreilles, mais là n'est pas le principal de l'ensemble.

En dehors du manteau et de la tunique retenue par la ceinture, nous avons les souliers qui, comme le veut la règle, n'ont pas de becs ni de lacs. L'artiste a bien noté le détail. Le chapeau de feutre ou de coton est aussi mentionné par la règle. Par contre on voit mal la cote dont le catalogue cité nous signale la présence (35).

La représentation de la « manche ajustée sur le bras dégagé du manteau » n'est autre que celle de la tunique ou jupon à vestir et non d'une cotte, c'est bien visible. On voit mal les Templiers dans leur maison avec des cottes de mailles.

Vient ensuite le « compteur de prières » qui n'est ni un chapelet, ni un rosaire comme le souligne Mme Clercx-Léonard-Etienne. Ce compteur de prières n'est autre que la copie de celui qu'utilise les musulmans, à la différence que les grains ne sont pas d'un seul jet, mais que certaines parties sont séparées par de plus gros grains. Pourquoi cette différence ? Uniquement parce que les Templiers récitaient un certain nombre de pater aux heures de l'office divin « et il doit dire pour les matines treize patenôtres, pour chacune des heures sept et pour les vêpres neuf » (36). « Et il doit dire treize patenôtres pour les matines de Notre-Dame et treize pour celles du jour » (37). Ce n'est qu'après les directives de Grégoire IX que les Templiers ajoutèrent l'Ave après le Pater c'est-à-dire vers 1245.

La main gauche est ramenée sur le cœur et forme le signe de la Pax qui marque dans la symbolique chrétienne les systèmes de juridiction, mais l'artiste n'a pas voulu donner ce geste à la main droite, uniquement dans le seul but de montrer que Gérard n'était pas prêtre donc dans l'impossibilté de bénir.

La main droite par contre s'appuie sur le bâton pastoral que d'aucuns ont voulu traduire par une épée (38). D'autres ont trouvé un bâton de vieillesse: « dans la main droite, il y a une canne, ce qui laisse supposer que c'était un homme âgé qui avait besoin d'un bâton » (39). Mme Clercx-Léonard va plus loin car elle voit un bâton de pèlerin, le bourdon (40). Là encore les textes de la Règle, du livre des Us et la symbolique interviennent. Il s'agit uniquement et simplement du bâton pastoral que portaient les supérieurs des maisons religieuses. « Et le maître doit avoir le bâton pour diriger et la verge pour corriger ». Et la symbolique chrétienne dit bien que le supérieur est comme le berger qui conduit son troupeau. On constate alors la dénomination des divers attributs: croix pontificale, crosse épiscopale, bâton abbatial et bâton magistral. La symbolique voulait que l'on ne représenta rien d'autre que les attributs et l'enseignement de la Règle.

Gérard de Villers n'est pas représenté comme le pèlerin marchant vers la Jérusalem céleste. Dans la symbolique il u'y a pas de romantisme, mais uniquement de la réalité, même si l'on veut voir dans cette représentation le dernier voyage du maître sur cette terre « le passage de la terre au ciel ». La sensiblerie comme la sentimentalité n'existent pas dans la symbolique médiévale. Bien au contraire, on doit y voir 1111 enseignement, qui dans ce cas, est celui de la Règle, de l'Institution.

La Règle est aussi présente par le manque total de signes autres que ceux de l'Ordre. Il n'y a pas d'armoiries. Seule la croix est [dacée sur la gauche du manteau. Cette croix rouge donnée par le pape Eugène 111 qui contraint au respect et au mystère et qui n'a aucune forme exceptionnelle.

L'ensemble de cette leçon d'enseignement de la Règle est construit avec équilibre, un équilibre parfait, dans une architecture simple, réelle qui met en évidence non seulement le nombre des fleurons, mais la symétrie régulière de la vie du Templier.

L'harmonie se traduit dans la symétrie des pinacles qui reposent sur deux colonnes supportant le poids de la voûte et la stabilité de la liaison: esprit — terre.

On y trouve la dualité occidentale du monde spirituel et du monde physique dont les maîtres des XII et XlIIè siècles furent les propagandistes.

Or, cette dualité est construite d'une faqon régulière mais sur les données éternelles de la promesse et de l'alliance dont le Christ était venu lui donner plus d'espoir. L'espérance est transmise par les deux clochetons qui se dirigent vers le haut: à droite et à gauche, encore la dualité mais espérance encadrant l'ensemble de la construction, tandis que la foi se traduit par la pureté des lignes et la régularité des angles. La dualité est dominée par la trilogie chrétienne, mais la dualité reste dominante. La pierre se divise en trois parties égales dans le sens de la largeur, mais une seule est sculptée: la partie supérieure. Le dais reporté sur l'ensemble y est compris deux fois et les trois sommets nous en donnent deux de semblables.

L'axe vertical passe par le centre du dais, le milieu du front et le milieu de la main gauche: esprit-terre. La main gauche est prise exactement dans l'intersection des deux diagonales qui rejoignent les deux angles tandis que le front de Gérard est situé exactement au point d'intersection des bissectrices du triangle isocèle formé par le dais. La symétrie est donc respectée sur toute la pierre. Nous sommes en plein dans la construction suivant les directives de la règle d'Or, qui. elle aussi, marque la dualité par son système: 1 — 2 — 3 — 8 — 16 — 32, etc.
Dans cette pierre de 2,30 m sur 1,15m on trouve deux tracés: celui de triangle et celui du cercle. Nous constatons par la formation des deux triangles abc et abd qu'ils sont entre eux dans la proportion du pied oriental qui est de 0,36. Il faut bien sûr eidever l'exergue. La division porte alors sur la distance entre chaque axe qui approche du nombre d'Or 1,618. Si l'on prend la mesure totale, moins celle de l'exergue nous avons alors une longueur de 2,16 m, soit 6 pieds de 0,36 et la dimension de 1,74 m qui est celle de l'homme parfait du Moyen Age, lequel, levant le bras touchera le sommet du dais. Il faut donc ne pas s'étonner de trouver un si bel équilibre dans cette pierre.

Que représente alors ce monument, cette pierre ? La représentation n'est pas matérielle. Elle aide tout le comportement spirituel de l'homme car il ne faut pas oublier que la puissance de la symbolique médiévale est étroitement liée avec l'universalité, le collectif et la fraternité. L'utilisation de la matière est pour les Pères de l'Eglise, les théologiens et les philosophes médiévaux, avant Thomas d'Aquin, le seul moyen d'aller à Dieu. La matière n'est donc que la représentation visuelle de notre travail interne, spirituel qui conduit à la perfection spirituelle au moyen des stades de l'initiation.. De ce fait le symbolisme des figures: carré, cercle, triangle, celui des nombres, crée l'ambiance qui permet d'accéder du matériel au spirituel.

La suite de Gérard de Villers

Après la mort de Gérard de Villers, le 28 février 1274. la commanderie-majeure de Villers le Temple possédait l'ensemble actuel de la commune en un seul tenant, limité par les seigneuries d'Outrelouxe, Neuville, Saint Lambert, Abée et la commanderie de Strée.
Seule une petite terre située à Nandrin à quelques kilomètres de là se trouvait hors des limites.
Les commandeurs se succédèrent d'une façon régulière. Comme toutes les maisons importantes de l'Ordre, celle de Villers était aussi un centre bancaire et, comme partout, les Templiers de Villers participèrent à la vie économique, financière et sociale de la Région, avec les relations traditionnelles: église, seigneurs et même avec les marchands sur l'ensemble des grands courants venant de Venise ou de Gênes.

La succession des commandeurs telle que nous la donne Th. Pirard avec la phrase « 011 en possède la liste complète » est complètement fausse. Après Gérard de Villers, les documents nous donnent:
Renier de Villers 1274-1291
Godefroid 1291-v 1300
Guillaume v 1300-1307

Ordre de Saint-Jean de Jérusalem et de Rodes — 1309 — 1530.
Guillaume 1312-1317
Arnaud de Wesemalle 1322
Pierre, dit le Templier de Huy, vers 1380
Gilles de Iluy 1363
Amiel de Parfondieu, cité en 1386, 1393, 1402 et 1404
Jean de Parfondieu, 1406
Alexandre de Brunshorn ou de Brisemonde, 1428-1435, pierre tombale dans l'église de Villers le Temple.
Jacques de Parfondieu 1435-1440
Jean Suetmen de Diest 1453-1456
Guillaume de Ruydt 1504-1509
Jean de Hestrus 1509-1520
Christophe de Quatrelivres 1520-1522
Cornil de Hombourg 1522-1524
Antoine de Veres 1524-1545
En 1530 devient l'Ordre de Saint Jean de Malte
Jacques d'Aspremont de Nanteuil 1545-1555
François de Lorraine 1555
Christophe de Grenay 1559
Michel de Seure 1566-1573
Nicolas de Pontarlier 1573-1586
François de Byron 1586-1587
Claude Natalis de Conrandin 1 587-1610
Charles de Gaillarbois 1610-1614
Charles Picart de Sévigny 1614-1628
Charles de La Fontaine 1628-1645
Thierry de Beaufort 1645-1654
Nicolas de Paris-Boissy 1654-1659
Antoine Lefort de Bonnefosse 1659-1666
François Signoret de la Borde 1666-1684
Balthazard de Crevant d'Humières 1684-1682
F. de Chambly Monthnault 1692-1698
Hardouin Bruslart 1698-1708
Alexandre Chambon d'Arbouville 1708-1711
Hardouin Bruslart 1711 par intérim
Alexandre Chambon d'Arbouville 1712-1717
Henri Perrot de Saint-Dié 1717-1737
Bernard d'Avesnes de Bocage 1737-1756
Jacques Laure le Tonnelier de Breteuil 1756-1787
Eustache de Vauclin ou de Vauquelin 1787-1792.

Notes — Gérard de Villers


1. — Le Temple et Malte / Trésors d'art entre Ourthe et Meuse — 1973, page 11.
2. — Il s'agit d'une exposition commémorant le VIIe centenaire de la mort de Gérard de Villers organisée par le Patrimoine Condruze. Cette exposition avait pour objet de mettre en valeur l'histoire du Temple. Il y avait de tout sauf des représentations exhaustives de l'Ordre. Par contre à la commanderie même, une exposition organisée sous les auspices de M. Jean LORNEAU a mis en valeur de nombreux documents concernant la Belgique avec entre autre La Règle du Temple conservée à Bruges et provenant de la commanderie de Slije et le Cartulaire du Temple en Flandre conservé aux archives royales de Mons. Plusieurs autres documents TEMPLIERS et représentant les Ordres militaires avaient été exposés. On pouvait y voir la copie, grandeur naturelle de la pierre tombale.
3. — Sur les Pierres tombales voir. L. DAILLIEZ, M. MORA Y CAETANO L'Architecture des Templiers, 2 volumes tome II, sculptures et Pierres Tombales en préparation.
4. — LEONARD (E.G.), Introduction au Cartulaire manuscrit du Temple, l'auteur, archiviste paléographe a fait preuve d'une originalité des plus basses en écrivant, en 1930, son bouquin en latin ! ! !
5. — Saint Laurent, abbaye bénédictine située dans les faubourgs de Liège, fondée en 970. Aujourd'hui hôpital militaire. COTTINEAU, col. 1604-1605.
6. — Herkenrode, abbaye de moniales cisterciennes fondée vers 1182 par le comte de Looz, province de Limbourg — CANIVEZ (R.P. Joseph, O.C.S.O.), Ordre de Cîteaux en Belgique, page 1 23-1 31.
7. — Aywieres, abbaye de moniales cisterciennes, fondée en 1202 aux Avins près de Liège pour des bénédictines. En 1207 les moniales prennent les institutions de Cîteaux et s'installent à la Coutur-Saint-Germain, à neuf kilomètres d'Ouphain — CANIVEZ, opuscule cité page 172-186.
8. — Saint-Hubert, abbaye d'Augustins fondée vers 704 par S. Bérégise, chapelain de Pépin le Bref. En 825, l'évêque de Liège y installe des bénédictins. Aujourd'hui maison pour l'enfance délinquante, province de Liège sur la frontière du Luxembourg. COTTINEAU, col. 2731.
Pour le document cité: Bruxelles, Archives Générales du Royaume, Cartulaire de Saint-Hubert, folio 160v. — KURTH, Les Chartes de Saint-Hubert, n° 261, page 322-324.
9. — Cartulaire de Flandre, fol 80v.
10. — DEVILLERS, Inventaire analytique, n° 132, page 31-32.
11. — Revue d'Histoire et d'Archéologie tome I.
12. — Paris, Bibliothèque du Sénat, en cours de classement.
13. — Liège, Arch. de l'Etat, cartulaire de Flône. EVRARD, Documents relatifs à l'abbaye de Flône n°89.
14. — Anteverssia Christo nascens et crescens, 1772—1773, tome I, page 268.
15. — Paris, Archives Nationales, MM 13
16. — Messager des Sciences Historiques, 1852, page 376.
17. — SCHOONBROODT, Inventaire du Val Saint-Lambert, n° 289.
18. — Liège, archives de l'Etat, cartulaire de Flône — EVRARD, opuscule cité n° 103. 19. — Liège, archives de l'Etat, commanderie de Villers, n° 5947, folio 29v.
20. — cf. note 12.
21. — Pierre tombale de Gérard de Villers.
22. — Roosendael ou Val-des-Roses, abbaye de moniales cisterciennes, fondée vers 1227 — Brabant, commune de Wawre-Sainte-Catherine — CANIVEZ, opuscule cité p.232-235.
23. — Ouwen, village près d'Anvers.
24. — Revue d'Histoire et d'Archéologie, tome I, page 213.
25. — Le texte précise bien seigneur de Moha et non Sire. Cela concorde bien avec l'histoire de la principauté de Liège car la branche directe étant éteinte ce fut l'évêque de Liège qui reçut la seigneurie par héritage.
26. — Le texte du Cartulaire de Flône précise bien: quid nos predicti abbas et conventus Flonensis bona universa, que habemus in villa de Viler et de Clemo- dial et ipsorum pertientiis tam in terris, pratis, pascuis, nemoribus, decimis, quant patronatus jure ecclesie de Viler. . . Cartulaire de Flône page 121.
27. — Dans tout le texte la mention de Gérard est ainsi noté: frater Gerardus, sans aucune mention de certain.
28. — cf. en Annexe les Biens dans le diocèse de Liège au moment de la suppression de l'Ordre.
29. — . . . Il y a un corps de maison de pierres et briques, avec quatre tours, une à chaque coin que l'on nomme le château de la commanderie, fort antique, procédant des Templiers qui y ont été détruits, il y a environ 388 ans, dont la chapelle est encore dans la haute cour joignante la maison, qui est située sur le roc. Paris Archives Nationales S 5254, liasse 2, n°5.
28. — cf. en Annexe les Biens dans le diocèse de Liège au moment de la suppression de l'Ordre.
29. — Il y a un corps de maison de pierres et briques, avec quatre tours, une à chaque coin que l'on nomme le château de la commanderie, fort antique, procédant des Templiers qui y ont été détruits, il y a environ 388 ans, dont la chapelle est encore dans la haute cour joignante la maison, qui est située sur le roc. Paris Archives Nationales S 5254, liasse 2, n°5.
30. — L. DAILLIEZ, La Règle des Templiers, article 139, page 175.
31. — L. DAILLIEZ, La Règle des Templiers, article 150, page 179.
32. — L. DAILLIEZ, La Règle des Templiers, art. 280, page 241 et explications page 280.
33. — L. DAILLIEZ, La Règle des Templiers, art. 508, page 321.
34. — Chez les Templiers, cette mention de laine en usage pour l'habit des frères se rencontre surtout dans les commanderies où l'élevage du mouton était des plus actifs: cf. les cartulaires et documents de Roaix, Richerenches, ou Vaour, Douzens, Avignon, Limaye, etc. cf. Laurent DAILLIEZ, Les Templiers en Provence, passim.
35. — L. DAILLIEZ, La Règle des Templiers, article 22, page 127. Mme Clercs-Léonard-Etienne nous fait cette révélation: sa cote (sic) dont on voit, à droite, la manche ajustée sur le bras dégagé du manteau.
36. — L. DAILLIEZ, La Règle des Templiers, article 10, page 123.
37. — L. DAILLIEZ, La Règle des Templiers, page 241.
38. — CHESTRET DE HANEFFE, L'Ordre du Temple dans l'ancien diocèse de Liège, Comptes rendus des séances de la Commission d'Histoire, tome XI, 1901, page 313-314.
39. — CREENY (W.F.), Illustrations of incised slabs on the continent of Europe, London, Griggs et S., 1891, page 20-21.
40. — Mme Clecrx-Léonard-Etienne précise encore un fait qui n'a aucune valeur II s'agit là non pas d'une épée, ni d'un bâton de vieillesse, mais d'un bourdon, bâton de pèlerin.

Commanderie de Vallaimpont

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté française de Belgique, Province: Liège, Arrondissement: Nivelles, Commune: Vaillampont

Appelé aussi Vallaimpont, ou Valiompont, ou Vieux-Court.

Si la Flandre fut le berceau de l'Ordre du Temple avec la Champagne, le comté de Brabant et celui du Hainaut ne furent pas en retard sur les fondations puisqu'au milieu du XIIe siècle, le comte Godefroid avait octroyé plusieurs privilèges et fait quelques donations. On remarquera que dans ces débuts de l'Ordre, la région de Nivelles fut assez privilégiée (1).
1. — Cf. plus loin: Wavre et le chapitre concernant les Templiers et les comtes: Hainaut.

La première mention de Vaillampont est datée de 1209, lorsque le comte Henri 1er de Lorraine notifie et confirme la donation qu'il a faite aux frères de la milice du Temple de Vaillampont et qu'avait octroyée son homme François d'Arquennes du consentement de sa femme Agnès et de ses enfants. Ces biens consistaient en partie du fief de Thines sur lequel le donateur déclare ne rien retenir, ni le moindre cens, ni la moindre juridiction. Les seigneurs dominants: Hugues d'Arquennes et Vautier du Rosaire confirment et approuvent cette donation tandis que le clerc Henri déclare cette terre convertible en franc-alleu (2).
2. — MIRAEUS, Opéra Diplomatica, tome II, page 1209, n° 55.

D'après cet acte la commanderie est déjà fondée depuis quelques temps et les Templiers de Vaillampont firent comme de partout. Ils enrichirent leur patrimoine foncier. Les terres du fief de Rognon furent achetées, mais deux seigneurs dominants: le châtelain de Bruxelles et Gilles de Trazegnies étaient possesseurs de ce fief. Les contestations arrivèrent, tant et si bien qu'il fallut rapidement transiger principalement sur le droit de gîte. Ce droit fut l'objet de nombreuses contestations et les papes durent souvent intervenir surtout au milieu du Xlllè siècle (3). En 1213, les deux parties transigèrent et le châtelain de Bruxelles abandonna ses droits aux frères du Temple (4).
3. — cf. Laurent DAILLIEZ, Les Templiers, gouvernement et institutions.
4. — MIRAEUS, opuscule cité, tome IV, page 719.


Que fit le seigneur de Trazegnies ? Il donna sa réponse au mois d'avril 1220 après avoir réclamer ses droits comme le fit Geoffroi de Bruxelles. Au contraire du premier. Gilles de Trazegnies conserva les cens ayant trait à ce fief. A sa mort, son fils Otton confirma cette renonciation mais reconnut que le seigneur de Vaillampont, en l'occurrence l'Ordre du Temple, avait le droit de bois mort et de pacage dans le bois de Nivelles contre une redevance annuelle d'un pain et d'une poule (5).
5. — MIRAEUS, opuscule cité, tome IV, page 719.

Au mois de septembre 1231, ce fut le seigneur de Seneffe qui fit une importante donation aux Templiers. Il donne un cens annuel d'un muid d'avoine, à la mesure de Nivelles et de quatre deniers, monnaie de Nivelles pour chaque bonnier de terre qu'il possède à Seneffe et dont la superficie s'étend sur 80 bonniers ainsi répartis: 25 se trouvent à la Rochepelée, 25 à Fontenelle à la limite du bois des chanoines d'Herlaimont et 30 à Robertbois dont il tenait le cens de son frère Léon, châtelain de Bruxelles. Il ajoute à cela un autre cens de douze deniers de la même monnaie et d'un demi-muid d'avoine qu'on lui devait annuellement sur cinq bonniers et demi de terre situés près de la marnière de Longsart, cens qui relevait aussi de son frère. Enfin il octroie aux chevaliers de la Milice du Temple de prendre dans sa terre de Seneffe, la marne qui leur était utile pour la culture des 85 bonniers et demi cités. Le seigneur déclare alors que son frère, son seigneur, et lui-même ont délivré ces choses sur l'autel de Vaillampont aux dits frères du Temple, suivant la tradition du rameau et du gazon, mais qu'il s'est réservé pour lui et pour ses successeurs, la haute justice pour effusion de sang, querelle et meurtre (6).
6. — DEVILLERS, n° 129.

Les Templiers de Vaillampont obtinrent la protection des ducs de Lorraine et comte de Hainaut. Henri 1er leur accorda de nombreux privilèges, mais les successeurs crurent que ces protections comtales leur donnaient des droits de regard sur les affaires des Templiers. Lorsque le comte Henri 1er accordait de Louvain, le 11 novembre 1220, les droits d'usage dans ses forêts (7), les successeurs prirent leur rôle un peu trop au sérieux, s'immisçant dans les domaines Templiers, ce qui n'était pas du tout fait pour leur plaire, aussi voyons-nous le commandeur déposer un plainte auprès du Saint-Siège contre les prétentions de la duchesse Aleyde et de ses fils. En 1265 un compromis fut jugé par les envoyés du pape (8).
7. — Bruxelles, Archives Générales du Royaume, Inventaire des Chartes et Cartulaire I, page 46.
8. — WAUTERS, dans Bull, de la Com. royale d'Histoire, 4e série, tome II.


On ne connaît, là encore, pas beaucoup de Templiers de Vaillampont. Un commandeur qui paraît avoir une grande fonction est cité le 27 mai 1284 comme témoin dans une charte de Flandre, il est question de frère Georges (9). Le même frère se retrouve dans un acte concernant les Templiers dans le comté de Hainaut en compagnie de frère Henri de Lille, commandeur de l'Ordre en Brabant. Le 28 janvier 1286, les deux frères se trouvèrent par devant les échevins de la ville de Nivelles pour contester à une intrusion de Tabbesse de Nivelles. Au début de la fondation de la commanderie, le chapitre de Nivelles avait fait don d'une rente annuelle d'un tonneau de vin. Il s'avère que Tabbesse déclara que les Templiers vendaient cette boisson, aussi fit-elle, de son propre chef, prendre le tonneau dans la maison du maître granger qui s'occupait des biens des frères et le fit casser. Les deux frères protestèrent et demandèrent réparation à Tabbesse ainsi que la restitution de la rente et pour cette chose de leur fournir une « kene » (10).
9. — DESMET, Corpus chronicon Flandriae, tome II, page 951.
10. — SCHAYES, Analectes, page 133 — WAUTERS, opuscule cité, 5ème série, tome I, page 174.


En 1287 le litige fut réglé et les Templiers rentrèrent dans leurs biens et la main levée fut accordée.
Le duc de Brabant continua ses largesses malgré l'intervention des Templiers quelques années auparavant et malgré les oppositions contre la duchesse douairière. Au mois d'août 1290, les Templiers achetèrent au duc Jean 1er, qui avait obtenu le consentement du chapitre de Nivelles, une superficie de 112 bonniers de bois en deux lieux différents: le premier sur la route qui conduit de Nivelles à Geneppe et le second devant la commanderie. Pour cette vente les Templierss payèrent cent sous de Louvain le bonnier et s'engagèrent à payer annuellement un cens de deux deniers par bonnier. Ils renoncèrent en outre à tous les droits d'usage dans les bois voisins (11).
11. — WAUTERS, Géographie et Histoire des communes belges, Canton de Nivelles, page 2.

L'inventaire de 1813 nous signale que la commanderie de Vaillampont possédait un domaine de 490 bonniers de terre et 25 de pré. Le commandeur tenait de Gossuin de Houtain, 72 bonniers de bois et du duc de Brabant et du chapitre de Nivelles 124 bonniers tant en bois qu'en pâturage. Le domaine possédait en plus trois étangs, quatre granges à bœufs (étables « boveletes ») et 2 moulins. A Nivelle, les Templiers possédaient la moitié du moulin de la Fosse, la quatrième partie du moulin de Stodereeh et de celui du Charnier. Du point de vue rente, la commanderie percevait 46 muids et 5 setiers de blé, 67 livres, 7 sous et 11 deniers tournois et 278 chapons.
Par contre la commanderie, devait plusieurs rentes en argent, grains et chapons.

Commanderie de Piéton et Vernoit

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté française de Belgique, Province: Hainaut, Arrondissement: Charleroi, Commune: Chapelle-lez-Herlaimont
Dans la région entourant Mons, l'enchevêtrement des possessions templières montre comment était faite la juridiction à l'intérieur de l'Ordre et surtout à l'intérieur des provinces. Devant ce système de gouvernement on ne trouve jamais de litiges d'une maison à l'autre comme on le voit par exemple chez les cisterciens, les bénédictins où d'une abbaye à l'autre il y avait des disputes concernant des propriétés et dont les actes des Chapitres généraux cisterciens font largement état. Vaillampont, le Piéton, Fleurus se partageaient les biens et les possessions de l'Ordre sans qu'il y ait de litiges au milieu de propriétés sous la juridiction de commanderies majeures toutes proches comme Britonsart ou Saint-Léger. L'Ordre du Temple est le seul ordre religieux qui ne fait pas état de mesure de juridiction sur des biens. Grâce à son système de gouvernement et à l'évolution de son droit les biens des chevaliers du Temple n'étaient attachés à personne, ni à une commanderie, ni à une maison, mais à l'Ordre.

Le premier acte faisant mention du Vernoit-Piéton est daté de 1163. Il s'agit d'une donation faite par l'abbé de Liessies qui, par le consentement de son chapitre, avait octroyé la huitième partie de l'alleu du Piéton. Ce don fut fait en pure et perpétuelle aumône à frère Aitropius, maître des frères du Temple demeurant au Vernoit. Cette possession provenait d'Hubert d'Aubechier qui l'avait donné à l'église Saint-Michel du Sart avec l'approbation de ses enfants, du comte Baudouin et de ses principaux barons (1).
1. — DEVILLERS, n° 111.

Ce ne sera qu'en 1207 que les actes citeront le Piéton. En effet, du Vernoit dont on ne sait exactement la date de fondation mais avant 1163, les Templiers se transportèrent au Piéton, mais il faut penser que d'autres acquisitions, ventes ou achats avaient été faits étant donné les diverses et nombreuses mentions que l'on rencontre dans les actes de l'Ordre de Malte aux XIVe et XVe siècles.

Malgré cela nous ne pouvons pas donner une juste vue de ce qui était jadis au Temple et les acquisitions faites par les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem. L'enquête de Grégoire XI ne donne pas grand-chose de ce côté.

En 1207 donc, le doyen et le chapitre de Binche notifient que l'église de Fosses a légué aux Templiers une dîme située près du Piéton sur la terre des Braconniers qui lui avait été donnée par Jean, clerc et Robert, chevalier de Carnières. En échange les Templiers reconnurent payer une rente annuelle à la dite église, d'un muid de blé et d'un muid d'avoine à la mesure de Mons, le jour de la Toussaint. Cette rente serait payée dans la grange de Saint Feuillien à Fleurus (2).
2. — DEVILLERS, n° 123.

Le Piéton s'enrichit de quatre bonniers de terre qui furent données par Guillaume de Gouy lorsqu'il se dessaisit de ces biens en faveur de Notre-Dame et des frères du Temple du Piéton avec le consentement de ses frères. Cette terre se trouvait à Gouy dans la mouvance du territoire de la Haie (3).
3. — DEVILLERS, n° 133.

Le dernier acte connu date du mois de mars 1285. Il est question d'une cession de dîme de la part de l'abbé et du chapitre de Bonne-Espérance. Ce jour-là, frère Adam, abbé de Bonne Espérance, notifie que du consentement du chapitre et de la communauté de son monastère, il concède aux frères de la Milice du Temple et à Guillaume de Mallayo, maître de la chevalerie du Temple en France, l'échange d'une dîme, grosse et menue, que l'Ordre possédait dans la paroisse et au territoire d'Anderlues. Le monastère de son côté fait cession de toute la dîme qui lui revenait sur plusieurs terres qui équivalaient à une superficie de quarante bonniers moins onze verges et se situant près de la commanderie (maison du Temple dit le texte) du Piéton et du Vernoit. Les deux parties reconnurent l'inégalité de l'échange. Les chanoines de Bonne Espérance spécifièrent qu'ils avaient reçu une superficie plus grande aussi s'engagèrent-ils, ainsi que l'abbaye pour le futur à payer à l'Ordre du Temple une rente annuelle et perpétuelle, le jour de Noël, de sept muids de grain, à la mesure de Binche, moitié en blé, moitié en avoine (4).
4. — DEVILLERS, n° 166.

C'est tout ce que nous savons sur cette implantation de l'Ordre du Temple au Piéton. On s'étonnera que cette maison qui allait devenir, sous l'Ordre de Saint-Jean, la commanderie Magistrale de Hainaut-Cambrésis, n'ait pas plus de documents. Malheureusement beaucoup de documents ont disparu lors de l'incendie des Archives de Mons, mais il ne faut pas tout mettre sur le dos de ce désastre. M. Devillers dans son répertoire n'en donne pas plus et il faut penser que les litiges n'ayant pas lieu les documents furent dispersés. J'ai souvent retrouvé des reliures effectuées par l'Ordre de Malte avec comme rembourrage de couverture des actes des XII et XIIIe siècles, dont certains ayant appartenu aux Templiers. Que certains se rassurent, les cachettes de trésors et de documents finissent toujours par se retrouver. Dans le chapitre concernant les Templiers et les ecclésiastiques nous donnerons plus de détails sur ce point bien particulier (5).
5. — Malgré cela les archives du Piéton sont pauvres, c'est un fait, mais que M. Saint-Hialire ne trouve pas là sujet à élucubrations car elles ne sont pas parties sur des chariots hypothétiques ou encore enfouies dans quelques pseudo-souterrains, mais plutôt dans des imaginations par trop fécondes.

Le Fliémet

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté française de Belgique, Province: Hainaut, Arrondissement: Mons, Commune: Frameries
Actuellement vieille ferme dans la commune de Frameries, le Fliémet fut une commanderie titulaire de l'Ordre du Temple. De nombreuses possessions dépendaient d'elle, mais elle n'avait aucune commanderie sous sa juridiction, le Piéton-Vernoit étant du ressort de Vaillampont. Ses possessions se groupaient dans un espace assez restreint aux alentours de Mons.

C'est en 1142 que le comte de Hainaut, Baudouin IV donnait aux Templiers cent journaux de terre à Frameries afin qu'ils puissent y installer une communauté (1). La commanderie n'allait pas tarder à avoir ses bâtiments réguliers puisqu' au cours de l'année 1154, nous en avons la mention lorsque Baudouin IV confirmait de Mons, la donation faite aux frères du Temple par Martin de Valenciennes, d'une terre située près de leur maison du Fliémet (2).
1. — DUVIVIER, Recherches sur le Hainaut ancien, page 556.
2. — DUVIVIER, Recherches sur le Hainaut ancien, page 582.


Les frères du Temple du Fliémet eurent de nombreuses relations avec les religieux d'Haumont et ce pratiquement dès les débuts de la commanderie. En 1179, Clérambaud, abbé d'Haumont et toute sa communauté font un échange avec les Templiers. Ces derniers possédaient des biens à Givry en terres, moulins, eaux, près et une terre située à l'Aumône-Wagon. Ils donnèrent ces possessions aux religieux d'Haumont contre le paiement annuel, pour la saint Martin d'hiver, d'une somme s'élevant à 6 marcs, le marc valant dix sous de la monnaie de Flandre (3).
3. — DUVIVIER, Recherches sur le Hainaut ancien, page 621.

Deux ans après, le maître du Temple en France confirmait cet échange tandis qu'en 1186 Aimon, maître du Temple de Jérusalem dans les parties cismarines notifiait qu'Anselme de Mont-Sainte-Aldegonde tenait une terre à cens à Ciply dont il devait trois sous annuels de cens à l'église d'Haumont laquelle terre avait été acquise par Baudouin de Gand, maître en Hainaut du consentement de Robert, abbé d'Haumont et de son chapitre. Les frères du Templiers devront payer ledit cens de trois sous en monnaie de Valenciennes. A cette somme seront ajoutés trois autres sous pour une terre à Ciply, donnés par Alard de Louvenies et qui étaient anciennement à l'église d'Haumont (4).
4. — Cartulaire d'Haumont, folio 45v.- 46.

Après l'abbaye d'Haumont ce sera l'abbaye des moniales de Bethléem qui aura quelques relations avec les frères du Temple. Au mois de décembre 1254, un Record fut passé par devant les échevins de Hoyon au sujet de la donation faite par Wautier Harduin à l'abbaye de Bélian (Bethléem) de 8 bonniers de terre et de l'échange qui eut lieu avec les Templiers de trois pièces de terre se trouvant sur les territoires de Masvin, Hyon, Cuesmes, Ciply et Noirchain (5).
5. — Mons, Archives de l'Etat, Bethléem, n° 3. Je tiens à remercier une nouvelle fois M. Wellens, conservateur aux Archives de Mons, d'avoir eu l'amabilité de me communiquer les trois documents concernant l'abbaye de Bethléem ou Bélian et les Templiers.

Quelques mois après, au mois de mai 1255 un accord intervient entre les deux communautés. Nous avons, dans ce texte, la localisation de la commanderie et nous apprenons qu'elle était située entre Framerie et Genly. Cet accord concerne un échange de propriétés. Les moniales de Bethléem donnent treize bonniers situés sur Frameries et Cuesmes. Les Templiers se déchargent d'une étendue de terre à Mesvin et à Ciply (6).
6. — Mons, Archives de l'Etat, copie du XVIIe siècle, n° 58.

Deux ans après il semblerait que les deux parties ne soient pas tout à fait en accord puisqu'au mois de juillet 1257 une convention fut conclue au sujet de ces terres. Un nouvel échange eut lieu avec les usufruitiers du fief Daniel situé lui aussi sur les territoires de Frameries et de Cuesmes afin que l'échange des terres appartenant aux Templiers soit effectif (7).
7. — Mons, Archives de l'Etat, n° 46.

Le dernier acte que nous ayons sur cette commanderie est daté du 4 décembre 1275. Ce jour-là, l'écolâtre de la Morinie et official de Cambrai, maître Jean d'Ais, notifiait aux prêtres de Taisnières et d'Arquennes que Wautier, fils de Jean dit le Louvier avait reçu de frère Guillaume de Beaujeu, maître de la Milice du Temple et moyennant un cens annuel de vingt livres parisis, une maison appartenant à la commanderie du Fliémet. Cette location serait payée par moitié aux deux termes de Noël et de Pentecôte. Le preneur donne tout de même en garantie de paiement, le fief qui était tenu par lui de la dite maison du Fliémet et situé dans le territoire de la paroisse d'Arquennes. L'écolâtre est sévère, mais il doit malgré tout y avoir anguille sous roche, puisqu'il mande aux prêtres cités d'excommunier le dit Wautier dans le cas où il ne remplirait pas ses obligations (8).
8. — DEVILLERS, n° 156.

Après la suppression du Temple la commanderie du Temple du Fliémet fut reléguée comme simple ferme dépendante de la commanderie magistrale du Hainaut-Cambrésis avec Piéton comme siège régional.

Fleurus

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté française de Belgique, Province: Liège, Arrondissement: Charleroi, Commune: Fleurus
Cette maison du Temple dépendante de Bitronsart est citée dans un acte de 1207 concernant la commanderie de Piéton. Tout ce que nous connaissons de cette maison entrepôt est ce que nous signale l'inventaire de 1313, que je donne en fin de volume. Elle n'avait que quatre-vingt-quinze livres tournois de rente par an.

La Braque

Aujourd'hui située dans le royaume des Pays-Bas, cette commanderie est située non loin de la frontière entre les deux royaumes actuels. Dans les actes, qu'ils soient du Temple ou de l'Hôpital, la commanderie de la Braque, qui ne fut jamais trè#232;s importante est aussi connue sous le nom d'Alphen, ville sur le territoire duquel elle se trouvait. Malheureusement il ne reste plus rien de cette maison que l'on connaît depuis la fin du XIIe siècle. Les archives de cette maison, conservées aux Archives Nationales de Paris, nous révèlent toutefois que La Braque possédait deux maisons sous sa juridiction:
Aarle-Rixtel Aarle-RixtelAarle-Rixtel est un village situé dans la commune néerlandaise de Laarbeek, dans la province du Brabant-Septentrional et Turnhout TurnhoutPays: Belgique, Région, Région: Flamande, Communauté: Flamande, Province: Anvers, Arrondissement: Turnhout

Au milieu du XIIIe siècle, la Braque en tant que siège fut abandonné au profit d'Oosterhout nous verrons le pourquoi et le comment.

Les possessions du Temple dans cette partie du Brabant, sont connues pour la première fois en 1187 lorsque noble homme Gérard de Duffel, chevalier, donne en pure et perpétuelle aumône aux frères de la Milice du Temple de La Braque l'alleu de Turnhout. Il rend quitte les frères du Temple qui devront lui payer jusqu'à sa mort, une rente de 3 marcs de fort poids (1).
1. — Paris, Archives Nationales, carton S 5255, n° 1.

Turnhout occupa une grande place dans le domaine utile de la commanderie. Au début du XIIIe siècle, Alvère de Turnhout fait donation au maître et aux frères de la maison de la chevalerie du Temple de Jérusalem d'une cour avec un bonnier de terre qu'il tenait du duc de Brabant pour un cens annuel de trois deniers de Cologne (2). Cette donation fut confirmée en 1212 par le duc Henri 1er de Brabant et de Lorraine. Le même duc reconnut en 1214 avoir investi les frères du Temple de la donation que leur avait octroyée le comte de Megan ou Megen. Guillaume, du consentement et par l'approbation de son fils Thierry de l'alleu de Rixtel. Le comte et son fils donnèrent tout ce qu'ils possédaient au dit lieu, librement et en toute quiétude, les dépendances d'une ferme, les terres, près, bois, eaux et le droit de patronage (3).
2. — Paris, Archives Nationales, n° 2.
3. — Paris, Archives Nationales, n° 5 et WAUTERS, dans Bulletin de la Comm., Royale d'Histoire, 4ème série, tome II, page 188.


Mais voilà que la commanderie de La Braque paraît avoir eu de grandes difficultés quant au siège temporel. En 1236 et le 9 juillet un compromis fut passé entre Pons d'Albon, maître du Temple en France et Jean, abbé de Tongerloo au sujet de la ferme d'Alphen. Tongerloo, abbaye de chanoines prémontrés, paraît avoir eu quelque chose à voir au moment de la fondation de la commanderie mais les frères du Temple ne purent subvenir à certaines difficultés. Lesquelles ? Les textes ne précisent rien, tant et si bien qu'un arbitrage intervint et la sentence ne fut prononcée que le 8 novembre suivant en présence de frère Hermann de l'Ordre du Temple (4). La Braque devient une simple ferme et ce n'est que quelques années plus tard que nous voyons apparaître la liaison La Braque-Oosterhout. En effet lorsque l'abbesse et le couvent des moniales cisterciennes de Roosendael transigent avec les Templiers au sujet de la dîme d'Ouden il n'est plus question de La Braque tout court. M. Wauters qui a publié deux chartes qui se trouvent aux Archives Nationales de Paris s'il s'est trompé dans l'analyse de la précédente n'a pas vu l'union des deux lieux. Miraeus qui reproduit lui aussi les deux textes ne fait pas de commentaires. Le 25 mai 1256, frère Inguelran, maître des frères de la Milice du Temple en Brabant, notifie que l'abbesse et les moniales de Roosendael, avaient reçu de noble Nicolas, seigneur de Grobbendonck, une dîme située sur le territoire de Ouden. Les Templiers firent valoir que cette dîme était aussi partie de leur possession et qu'ils y possédaient quelques droits. Un accord intervint et les frères abandonnèrent cette dîme le 3 juin 1257 par l'intermédiaire de leur nouveau commandeur en Brabant, qualifié à l'occasion de son titre complet de maître des maisons du Temple en Brabant et en Hesbaye (5).
4. — Paris, Archives Nationales, n° 7 et 8.
5. — Paris, Archives Nationales, n° 9 et 10.


La commanderie de La Braque est beaucoup plus connue dans ses domaines que dans sa propre maison. Il est navrant que les Hospitaliers — de cela nous en avons la preuve flagrante — aient détruit systématiquement les archives du Temple qui ne se rapportaient pas aux domaines encore dans leur patrimoine. Les domaines de La Braque sont assez bien connus surtout dans la seconde moitié du XIIIe siècle, soit au travers des documents originaux que par l'intermédiaire d'études faites sous l'Ancien Régime qui rapporte des documents aujourd'hui disparus.
C'est ainsi que le 10 mars 1261, deux frères de la maison de La Braque, Jean et Henri, notifient que moyennant la somme de neuf livres de vieux blancs qu'ils avaient reçue de l'abbaye des prémontrés de Saint-Michel d'Anvers, ils tenaient l'abbé et le couvent quittes de tout droit, prétention et exaction sur les biens qu'avait donnés Denis, prêtre de Lierre qui avait pris la Croix et était mort outre-mer (6).
6. — de REIFFENBERG, Monuments pour servir à l'Histoire du Brabant, tome IV, page 428.

L'année suivante, le 5 février 1262, le commandeur en Brabant et en Hesbaye, frère Gérard (7), fait connaître que son Ordre a reçu de l'Hôpital d'Anvers, l'indemnité concernant la dîme de Wuestwezel. Par cette quittance la dite dîme cessait d'être un fief pour être transformée en franc alleu (8).
7. — Le transcripteur de cet acte a noté H ce qui est une erreur. Cette année-là le maître en Hesbaye était Gérard de Villers.
8. — Paris, Paris, Archives Nationales, n° 12, et DIERCXCENS, Antverpia Christo nascetis et crescens, 1773, tome I, page 268.


A la fin du XIIIe siècle. La Braque n'existait pratiquement plus en sa qualité de maison régulière. Le mot de ferme revient dans les actes en 1289. Il ne faut plus penser à voir une maison régulière puisque cette année-là, les possessions de La Braque furent données à bail à ferme avec toutes les dépendances pour le prix de 24 livres de Cologne, les Templiers se réservant seulement la collation de la cure de Rixtel (9).
9. — Paris, Paris, Archives Nationales, n° 15.

C'est le 25 octobre que les Archives de La Braque nous donnent le dernier acte la concernant. Ce jour-là, Gautier Brevis fait donation à frère Jacques de Bruges, maître des maisons du Temple en Brabant, de quelques cens. On ne connaît pas l'importance de cette donation (10).
10. — Paris, Archives Nationales, n° 16.

C'est tout ce que nous savons sur l'ensemble juridictionnel de cette maison et l'inventaire de 1313 nous montre le peu d'importance de ce domaine templier au moment de la suppression de l'Ordre (11). D'après ce document les terres étaient peu cultivées et le texte précise bien que l'on ne peut ni les fumer, ni les semer. Les moulins de La Braque et d'Oosterhout demandaient de leur côté de nombreuses et grandes réparations. En fait c'était l'abandon complet ou quasi total sauf en ce qui concernait les dîmes ce qui étaient plus utiles, comme les cens.
11. — cf. l'annexe.

Louvain

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté française de Belgique, Province: Brabant, Arrondissement: Louvain
Il est assez compliqué de donner une localisation exacte de la commanderie de Louvain si nous en croyons les diverses hypothèses émises au cours des siècles et si nous ne nous retournons pas aux sources comme le firent les auteurs belges du début du siècle. Malgré le peu de documents qui nous soient parvenus nous pouvons avoir une localisation bien définie. Il existe aux Archives de la ville de Louvain une « Histoire manuscrite de la ville » rédigée par M. Vanderbroeck qui signale quelques points concernant les Templiers à Louvain d'après les données récupérées dans les archives de l'Ordre de Malte. Depuis cette époque il ne reste que quelques bribes que Ton retrouve par ci par là, mais qui permettent d'avoir une vue à peu près exacte de ce que fut la maison du Temple de Louvain. Toutefois il existe de véritables mystères chez les Templiers, mystères qui ne sont pas des voies sans issues si nous connaissons l'Ordre dans sa véritable essence et dont je révélerai dans quelques temps les éléments les plus typiques. Louvain fait partir de l'un de ces mystères du Temple et cela uniquement grâce à un nom.

Les Archives Générales du Royaume à Bruxelles qui conservent le cartulaire des Templiers exécuté par M. Ch. Duvivier n'a pas non plus d'importance sur Louvain, malgré le travail considérable fourni par cet érudit belge. Il en est de même de l'inventaire analytique de M. DEVILLERS.

Assurément, comme nous le verrons, les Templiers eurent une part importante sur les routes du Moyen Age, mais pas comme gardes ou encore comme policiers, cette affirmation est totalement fausse. C'est sur les routes commerciales que nous les retrouvons et si pour les affaires policières nous n'avons aucun document d'où notre doute sur les prétendues affaires policières de l'Ordre, il n'en est pas de même du domaine financier. Les Templiers participent activement aux échanges entre la Flandre, la principauté de Liège et les foires de Champagne.

Nous savons que le duc de Brabant dès 1142 accordait aux Templiers les reliefs que payaient ses vassaux dans tout le duché. Cela ne veut absolument pas dire que la maison de Louvain ait été fondée malgré la date et le lieu d'émission de l'Acte, Louvain. Ce n'est qu'une mention faisant partir le document du château ducal. Or, le duc de Brabant ne fit que continuer dans ses territoires les largesses du comte de Flandre comme le fait aussi le comte de Hainaut, Baudouin IV, lorsqu'il accordait les mêmes privilèges sans qu'il y ait aussi de mentions spéciales.

Faut-il voir dans l'ancienne ruine du château de Louvain, l'ancienne possession des Templiers ? Si nous en croyons les anciens auteurs de l'histoire de Louvain, Oui, mais comme toujours, tous ne firent que se renvoyer la balle. Le premier qui parle de ces ruines est Gramaye dans l'édition de 1708 de son Histoire de Louvain qui cite l'ancien château que l'on trouve à 2 kilomètres au nord de la ville (1). D'après lui la charte du duc Godefroid n'est autre que la charte de fondation de la commanderie de Louvain, c'est aller un peu loin, car il n'est fait aucune mention de possessions mais seulement de rentes, ce qui est contraire aux réalités.
1. — GRAMAYE, Lovanicum, page 17.

L'auteur aurait pu faire la critique de ce document puisqu'il nous signale l'avoir vu dans les archives de l'Ordre de Malte.

Cette ruine qui va faire l'objet de nombreuses polémiques est située hors de Louvain et l'origine de la légende, possession des Templiers provient d'un clerc de Louvain, Guillaume Boonen qui, en 1594 lança l'affaire de la Forteresse de Kesselsteen qui aurait été échangée avec les Templiers du Mont-César. Suite à cet écrivain chroniqueur le château de Kesselsteen ne fut que le canevas de broderies intenses puisque chacun chercha le moyen d'appuyer sa thèse par des interprétations plus que bizarres. Mais alors quel est exactement la localisation de la maison de Louvain ?

Je ne sais si l'on doit attacher de l'importance aux exagérations de l'origine des Templiers à Louvain, tant avec le Mont-César qu'avec le château. Il faut dire aussi que les auteurs qui traitèrent de ce sujet n'eurent pas le sens critique nécessaire pour constater que la forteresse citée n'était autre que la château ducal, ainsi que le mont César. Toutefois il est un autre point qui nous permettra de localiser au mieux la maison du Temple de Louvain. Il s'agit de la chapelle Saint-Nicolas. Ce lieu de culte va nous permettre de situer exactement le lieu de résidence des Templiers grâce, non pas en totalité aux archives, mais aux communautés religieuses entourant Louvain.

En 1875, François Jegon faisait paraître un article concernant Les Templiers et le culte de saint Nicolas (2). En effet, l'évêque de Myre fut très vénéré chez les Templiers et dans le bréviaire de l'Ordre nous avons trois fêtes de saint Nicolas dont la principale était celle d'hiver, le 6 décembre. Mais alors que vient faire saint Nicolas, là au milieu en plein Brabant ? Fort heureusement c'est grâce à lui ou plutôt au vocable de la chapelle que l'on sait où se trouvait exactement la commanderie de Louvain.
2. — BOONEN Geschiednis van Loven, page 181. — JEGON (F.), dans Revue de Bretagne et de Vendée, 4ème série, tome VIII, page 81, Nantes, 1875.

Je me permets d'ouvrir une parenthèse et malheureusement c'est encore M. Saint-Hilaire qui va faire les frais. Les Templiers n'eurent pas un culte particulier pour saint Jean qu'il soit évangéliste ou baptiste. Sur les 1467 commanderies et maisons que nous connaissons sur le territoire français et belge nous ne connaissons qu'une seule commanderie ayant le vocable de saint Jean et cela par les documents. Si M. Saint-Hilaire possède la contradiction, mais par documents, je m'incline.

Assurément il n'est pas facile de se fier uniquement à cette mention, mais il est grand temps de mettre fin aux légendes et aux fictions. Toutefois on constate que dans les actes des ducs de Brabant, la chapelle de saint Nicolas apparaît seulement lorsqu'il y a les Templiers et le chapelain du duc fut quelques fois un chapelain du Temple. Il arriva souvent que les chapelains du Temple soient aussi des chapelains seigneuriaux. En Aragon ce fut le cas avant la fondation des chevaliers de la Merci (3). Mais ce sont les archives de l'Ordre de Malte qui nous renseignent sur la localisation de la commanderie de Louvain. Toutefois nous savons que Louvain était une commanderie titulaire par le chapitre général de 1257 et aussi par le seul acte que nous ayons dans son intégralité et qui date du 5 septembre 1289 émanant d'Henri de Lille, commandeur des maisons du Temple en Brabant avec les frères Jean Leminghe, commandeur de Louvain et Godefroid de Huy, commandeur de Fain. Ce document concerne une vigne qui a été donné à Henri de Landestorp moyennant un cens annuel de vingt-huit sous de Louvain payable la moitié pour la Saint-Jean et la moitié pour la Noël (4).
3. — cf. Laurent DAILLIEZ, l'Ordre de Montesa, successeur des Templiers, chapitre concernant les chevaliers de la Merci.
4. — Louvain, Archives de la ville, à la date du document.


Cette même année, et le 27 mars un autre templier de Louvain, Gérard de Mavesyn demeurant près du château mentionné dans un acte des échevins de Meldert (5).
5. — Louvain, Archives de la ville, Archives de l'Hôpital.

La commanderie de Louvain ne fut jamais importante. Il semblerait qu'au XIIIe siècle lorsqu'elle fut fondée, les Templiers en firent beaucoup plus une maison de ville servant aux relations avec le duc, l'église et le commerce.

Neuve-Court et Wavre

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté française de Belgique, Province: Brabant , Arrondissement: Nivelles
Là encore nous sommes en pleine énigme quant à la date de fondation. Malgré cette constatation nous pouvons donner une date approximative.
Le duc de Brabant, suivant l'exemple du comte de Flandre et de celui de Hainaut, fait donation aux chevaliers qui militent sous l'obéissance du Christ, des reliefs du Brabant.
Mais jusqu'où peut-on aller pour donner à Wavre le titre de première commanderie du Brabant.
C'est aller rapidement dans les considérations.
Fort heureusement, avec les inventaires des documents on s'aperçoit rapidement que la dénomination de Neuve-Court avait été donnée à bon escient. Vieux-Court avec Vaillampont et Neuve-Court à Wavre. Nous avons le fameux privilège du duc Godefroid et il faut donc penser que s'il était destiné aux Templiers en général installés dans le duché de Brabant, c'est à Vaillampont qu'il adressa son document. A la suite du duc, exactement comme dans la Flandre, les seigneurs, chevaliers et barons, suivirent l'exemple de leur suzerain.

C'est le pape Lucius III qui va nous mettre sur la voie avec la bulle Justis petentium desideriis en date du 22 juin 1184. Le pape confirme la donation des reliefs par le duc Godefroid ce que ratifie, avec le consentement de son épouse, son petit-fils, lui aussi Godefroid, mais le troisième. Le pontife fait quelques remarques, les mêmes que l'on retrouve dans la Flandre quant à la réception des frères du Temple dans les cours seigneuriales. Mais le plus intéressant reste la localisation d'une donation. Le texte pontifical ne fait que confirmer une donation faite en 1183, que ratifia Henri 1er de Brabant, encore seigneur de Louvain.
Cette succession de date ne peut se faire et se comprendre que grâce aux noms des commandeurs cités dans les actes. Nous avons en premier lieu un texte daté de 1188 confirmant une donation antérieure et une bulle de 1184 ratifiant cette donation (1).
1. — voir les pièces justificatives.

Le premier texte date de 1188 et nous fait part de la donation octroyée par le duc Godefroid alors qu'il se rendait en Terre Sainte et qu'il se trouvait de passage à la commanderie de Bénévent. Il arrivait bien souvent à des croisés de faire des donations aux maisons situées dans leurs régions par l'intermédiaire des supérieurs de Terre Sainte ou de maisons se trouvant sur leur passage ou encore de provinces situées sur le parcourt du voyage. Si ce document est daté de 1188 nous pouvons facilement dater la donation de 1183 étant donné que c'est en cette même année que le duc Godefroid III entreprit son voyage en Terre Sainte. Or nous avons la mention de Guillaume de la Fosse qui, de commandeur en Apulie de 1179 à 1184, se retrouve en Terre Sainte au mois de mars 1184. La bulle de Lucius III ne fait donc que confirmer cette donation aussi pouvons-nous dater avec précision la fondation de Wavre-Neuve-Court à 1183. Cette libéralité du duc de Brabant fut donnée aux Templiers qui installèrent une communauté.

En ce qui consistait cette première donation, le duc fait état dans sa charte, d'un véritable cadastre: les droits perpétuels sur 15 manses, les marais et les près jusqu'à la rivière Lasne. Le souverain précise toutefois que cette donation est faite comme terre de Travail à Guillaume delà Fosse, maître du Temple en Apulie. Le mercredi 7 décembre 1188, Henri 1er le Jeune, encore sous la suzeraineté juridictionnelle de son père confirme et ratifie cette donation. Cet acte est important, car il nous montre la prudence des Templiers en matière de fondation. Comme je l'ai souvent fait remarquer les frères du Temple, comme d'ailleurs les cisterciens font toujours ratifier une donation par l'héritier, le donateur étant encore bien souvent encore vivant. Pour revenir au cadastre la mention qu'il y a de l'abbaye Sainte-Marie n'est autre que le monastère de Basse-Wavre.

Que veut donc dire la mention « comme terre de Travail » ? Nous ne devons pas oublier que les Templiers en occident étaient chargés de récolter le nécessaire pour les combats et l'entretien des troupes en Terre Sainte. Cette charge qu'ont les commanderies hors des terres de combat se voit beaucoup mieux dans la Péninsule Ibérique, mais dans les autres provinces occidentales on peut bien se demander ce que pouvaient faire les Templiers. De ce fait nous avons vu apparaître toute une littérature sur la garde des routes, sur le rôle policier des chevaliers etc. Or, tout cela n'est que légende et lorsqu'on lit les actes de diverses commanderies, tout comme les textes de la règle on s'aperçoit que les Templiers avaient autre chose à faire et que dans aucun texte on ne voit apparaître ce rôle de police. Les frères, bien souvent vieux et ayant participé aux luttes contre les infidèles, s'occupaient des travaux des champs, de l'élevage et du commerce. Le rôle commercial des Templiers, rôle qui se traduisit rapidement en celui de banquier et de financier, fut beaucoup plus important dans la Flandre, le Hainaut, le Brabant et le nord de la France actuelle comme on peut s'en apercevoir dans les comptes de l'Ordre conservés à la Bibliothèque Nationale de Paris (2).
2. — Laurent DAILLIEZ, Les Templiers, banquiers, financiers et commerçants.

C'est ainsi que dans les provinces qui nous intéressent dans ce volume, les Templiers se chargèrent beaucoup plus d'opérations financières, mais sur la Neuve-Court nous n'avons pas de mentions bien spéciales. Pourquoi vouloir en faire des gardiens de route alors que les seigneurs, ducs, comtes, barons etc. avaient leur propre armée et propre garde. En aucune fois, sauf dans les parties du sud de la Péninsule Ibérique je n'ai trouvé les Templiers gardiens des routes.

C'est tout ce que nous savons sur la Neuve-Court de l'époque templière. Après la bulle de Clément V et en attendant que les décisions du concile de Vienne voient le jour, les biens des Templiers de Wavre — Neuve-Court furent placés sous la garde du duc de Brabant. On constate d'ailleurs que bien souvent, les biens furent mis en séquestres sous la juridiction des suzerains directs et même des donateurs ou des descendants comme en Allemagne par exemple. Lorsque les biens devinrent Hospitaliers le domaine utile resta pratiquement le même, mais les bâtiments subirent de nombreuses restaurations, principalement lorsque la commanderie de Chanteraine fut juridictionnelle de Wavre.

Corswarem

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Waremme, Commune: Berloz

Chef temporel et juridictionnel des biens du Temple dans le comté de Looz, on ne sait pratiquement rien sur cette commanderie mentionnée malgré tout dans l'enquête demandée par le pape Grégoire XI. Néanmoins dans une charte du 29 mai 1292, si la mention de Corswarem n'apparaît pas, nous pouvons signaler que l'échange cité était sous la dépendance de la commanderie. Ce jour-là, Alysia, abbesse et le couvent d'Herkenrode, frère Renier, dit de Villers, commandeur des maisons du Temple dans les parties d'Allemagne et Guillaume, curé de Wilderen près de Saint-Trond, notifient que de leur unanime consentement ils cèdent à Gille dit Dorpe de Schoor, une dîme provenant de 8 verges de terre arable contre une rente située à Schoor (1).
1. — Bibliothèque Universitaire de Liège, Cf. pièce justificative.

En dehors de la disposition faite dans l'inventaire de 1313, c'est tout ce que nous connaissons du domaine des Templiers dans le comté de Looz.

Strée

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Hainaut, Arrondissement: Thuin, Commune: Beaumont
Dans le diocèse de Liège la maison importante fut, à partir du milieu du XIIIe siècle, Villers le Temple, dont nous avons déjà parlé dans une partie antérieure. Nous devons signaler qu'avant toute donation de domaine important à l'intérieur de la principauté-diocèse de Liège, alors que Strée n'était pas encore commanderie majeure et que rien n'existait comme maison régulière de l'Ordre du Temple, nous avons une première mention templière dans le territoire diocésain en date de l'année 1150, mais la donation devait dater de quelques années auparavant, puisque le maître du Temple donne des possessions de l'Ordre située à Amay, en faveur de Suger, abbé de Saint-Denis (1).
1. — Actum parisius, comuni capitula, pridie idus maii, anno verbi incarnati millésime centesimo quinquagesimo. D'ALBON, Cartulaire général du Temple page 362, n° 589.

En effet, le 14 mai 1150 alors que maître Evrard des Barres se trouvait à Paris et en sa qualité de maître de la Milice du Christ du Temple, notifie à tous, présents et à venir que d'un commun accord avec tous ses frères, que l'Ordre avait une maison et un près contiguë à la dite maison, que tenait Robert le Petit et ses frères Lambert et Gontrand sous un cens annuel payable à l'église de Saint-Denis et situés dans la ville d'Amay (Amiis dit le texte latin) au pays de Liège. Pour le service de Dieu, les Templiers se dessaisissent de ce bien et le donnent au vénérable Suger, abbé de Saint- Denis.

Lorsque les Templiers arrivent à Strée, ils acquirent un domaine qui devait rapidement prendre de l'ampleur et les palabres ne tardèrent pas à voir le jour. Dès 1240 un litige éclata entre les Templiers et les bénédictins de Saint-Hubert d'Ardenne au sujet des droits d'usage dans les bois de Strée. Le jugement fut rendu le 28 avril 1248 par Anselme de Saint-Lambert et Guillaume chanoine de Saint-Martin (2).
2. — Cf, les pièces justificatives.

Lorsque les Templiers arrivent à Strée, ils acquirent un domaine qui devait rapidement prendre de l'ampleur et les palabres ne tardèrent pas à voir le jour. Dès 1240 un litige éclata entre les Templiers et les bénédictins de Saint-Hubert d'Ardenne au sujet des droits d'usage dans les bois de Strée. Le jugement fut rendu le 28 avril 1248 par Anselme de Saint-Lambert et Guillaume chanoine de Saint-Martin (3).
3. — Liège, Bibliothèque, Ms de Theux, n° 954, Inventaire des chartes de la Collégiale de Notre-Dame de Huy, Strée, page 288-291.

Les Templiers de Strée possédèrent un grand domaine. Avec les chanoines de la collégiale Notre-Dame de Huy, ils se partageaient toute la seigneurie. D'après les documents de l'Ordre de Malte nous savons que les Templiers possédèrent une grande partie du domaine tandis que de son côté le chartrier de la Collégiale de Huy nous donne le cadastre canonial à la fin du XIIIe siècle. Nous apprenons que les chanoines avaient la collation de la cure alternativement avec les Templiers, de deux ans en deux ans pour chaque partie. Les frères du Temple de leur côté possédaient un domaine foncier comprenant 150 bonniers en terres, près et bois, une ferme et ses bâtiments alors que la commanderie était siège de la cour des échevins. Il y avait en outre un moulin et une brasserie — brassine. On constatera d'ailleurs que les Templiers, dans cette partie de la province, eurent tous des brasseries tout comme en Allemagne.

En plus le domaine féodal direct des Templiers comprenait 110 honniers de terres arables, des près, des bois, des bâtiments de ferme avec la basse-cour.

Commanderie majeure d'Hesbaye, de Condroz, et pays de Liège, Strée sera rapidement effacée par Villers-le-Temple qui par son fondateur aura la suprématie sur toutes les maisons de la province épiscopale.

Après la suppression des Templiers tout le domaine passa aux chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem.

On ne sait exactement quel est le plus juste des documents quant aux superficies données. A moins qu'entre 1289 et 1313 les Templiers aient cédé aux nouveaux seigneurs qui s'installaient dans le pays sous leur égide, plusieurs dizaines de bonniers de terre puis que de 110 bonniers de fief direct et 150 du domaine foncier nous tombons à 85 dans l'inventaire de 1313, mais là se trouve éclairci un autre problème, celui de la création de fiefs féodaux laïcs par les Templiers et dont nous reparlerons plus loin.

Warnant-Drye

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Huy, Commune: Villers-le-Bouillet
Petite commanderie de l'Ordre, puis commanderie de rapport ou de récupérations des divers biens éparpillés. Warnant n'avait pas un domaine utile très important, c'est au milieu du XIIIe siècle qu'apparaît l'existence de cette maison du Temple. Le 15 novembre 1252, les frères du Temple de Warnant possédaient deux prés dont la dîme était perçue par les chanoines prémontrés de Floreffe (1).
1. — Liège, Archives de l'Etat, Chartrier du Val Notre-Dame. n° 75.

Ce que nous savons de certain c'est que les Templiers possédaient le domaine ou le lieu-dit de La Motte. Quant à la dénomination de Montjoie, elle n'apparaît que durant la période hospitalière, toutefois nous pouvons penser que La Moette et Montjoie était le même lieu puisque lors du démembrement du bailliage d'Avalterre, le nom de Montjoie est signalé comme jadis du Temple.

Longpré

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Huy, Commune: Wanze
Encore une commanderie dont on ne sait rien en dehors de son existence comme bien Templier et qui prouve son existence par l'inventaire de 1313. Les hospitaliers en prirent possession et ils déclarèrent que c'était une commanderie jadis du Temple, et son domaine comprenait 70 bonniers de terre.

Haneffe

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Waremme, Commune: Donceel
Jusqu'à présent nous ne savions l'existence de la commanderie de Haneffe que par la mention du commandeur frère Gérard, cité dans un record donné à Limont le 22 septembre 1205 (1).
1. — DARIS, Cartulaire de l'Eglise Saint-Barthélemy à Liège, dans Notices sur les Eglises du diocèse de Liège, tome VI, page 212.

Il s'avère qu'en 1271 et le 11 mai, frère Wauliers, commandeur de Heneffe recevait par devant l'official de Liège 14 bonniers de bois situés sur le chemin de Hardument et longeant la rivière de Jaeker (2).
2. — Copie du XVIe siècle, BORLO (Limbourg) archives privées.

Il faut donc penser que Haneffe ait été une possession de l'Ordre du Temple fondée dans cette partie du XIIIe siècle durant laquelle Gérard de Villers possédait une grande influence dans tout le territoire de la principauté de Liège.

Le domaine de cette commanderie se calcule uniquement d'après l'inventaire de 1213, qui signale que les propriétés consistaient en 90 bonniers de terres arables dont chacun pouvait rapporter annuellement 2 muids d'épeautre; 1 bonnier et demi de près rendant 2 charretées de foin et 14 bonniers de petits bois rapportant de dix ans en dix ans environ 20 sous tournois.

Serait-ce le bois de 1271, car dans la région on ne voit pas de grandes forêts. On devait à la maison de Haneffe une dîme qui s'élevait à 50 muids d'épeautre (3).
3. — Cf, pièces justificatives.

Bierset

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Liège, Commune: Grâce-Hollogne
Aux alentours de 1260, les Templiers acquirent des biens à Bierset si on en juge les données de Chestret de Haneffe qui a, par son travail important, cherché dans les archives, les dates approximatives de l'existence du donateur.
Nous savons d'après un document conservé aux Archives de l'Etat à Liège et datant du XVe siècle que les frères de la cavallerie dou Temple reçurent à Bierset une partie de la coseigneurie que leur donna messire Gilles, seigneur en partie du lieu (1).
1. — Liège, Archives de l'Etat, Villers-le-Temple, Spécifications de biens, n° 5947, folio 29 v.

Le dit Gille n'est pas un inconnu dans la région liégeoise. Nous le trouvons en 1261 dans un acte concernant l'église Saint-Lambert (2). Il n'y avait qu'un pas à faire pour situer la fondation de Bierset aux alentours de cette date puisqu'en 1265, une maison régulière était établie.
Le 28 novembre de cette année, frère Gérard du Temple, qui n'est autre que Gérard de Villers, achetait à messire Baudart, chanoine de Saint-Lambert de Liège, la moitié du moulin banal de Bierset, situé à Hollogne-aux-Pierres, ainsi que deux près qui lui étaient contiguës et déclarés en franc-alleu (3).
2. — Cartulaire de l'Eglise Saint-Lambert à Liège, tome II, page 128.
3. — Liège, Archives de l'Etat, Villers-le-Temple, Spécifications de biens, n° 5947, folio 29v-30.


Un troisième acte, beaucoup plus complet, dont nous n'avons pas trouvé l'original, mais seulement une copie dans le manuscrit de Van der Berg à la Bibliothèque universitaire de Liège, nous précise que le 17 octobre 1289, Baudouin de Bierset, chevalier, et Marie, veuve de Guillaume, frère de Baudouin, passèrent une convention avec frère Rénier, maître des maisons de la Milice du Temple en Hesbaye, au diocèse de Liège, sur les droits à Bierset. Les donateurs octroient aux frères de la Milice du Temple et à leurs successeurs et en perpétuelle aumône, pour le salut et le remède de leur âme et afin d'améliorer la provision du futur recteur de l'église de Bierset, tout le droit qu'ils ont et pourront avoir que le patronage de l'église de Bierset (4).
4. — Cf, Laurent DAILLIEZ, Les Templiers, gouvernement et Institutions ch. Les Templiers et le pouvoir épiscopal.

C'est le dernier acte connu et que nous ayons, mais il est assez intéressant à cause de l'installation d'un recteur qui aura de meilleurs revenus. Cet acte dit par lui-même que ce seront les Templiers qui installeront le curé du village.
Ce cas n'est pas rare dans les archives du Temple et montre bien le souci des fidèles d'avoir des offices réguliers face aux mœurs décadentes de l'Eglise de cette fin du XIIIe siècle, malgré les directives de l'Inquisition.
Ce point particulier se rencontre aussi bien en Angleterre qu'en Provence où les Templiers nommaient des recteurs dans les églises sur leur territoire ou dont ils avaient le patronage, avec l'approbation des évêques locaux (5).
5. — Cf, Laurent DAILLIEZ, Les Templiers en Provence, 1977 et Les Templiers en Angleterre — à paraître dans la même collection.

Visé

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Liège, Commune: Visé
Si nous en croyons M. Hénaux dans son article sur les Templiers au Pays de Liège — Le Temple de Visé (1), Visé aurait été une petite maison fondée à la fin du XIIIe siècle qui n'eut qu'une existence éphémère.
1. — Dans Bulletin de l'Institut Historique Liégeois, tome I, page 338-341.

Or, le Temple de Visé est beaucoup plus ancien que cela et même que ne l'indique Chestrel de Haneffe. Plusieurs preuves nous aident à donner cette précision. Nous avons, en premier lieu les pierres tombales et ensuite les textes. Pour ces derniers les archives nous ont permis de préciser la fondation à une date s'approchant du deuxième quart du XIIIe siècle.

Un acte daté de 1231 nous précise que lors du Synode régional de Saint-Remacle, le doyen Gislebert reçut frère lnguerrand, commandeur de la maison du Temple de Visé et qu'il avait été envoyé par devant lui du consentement des frères de la dite maison pour réclamer le relief des terres tenues en fief du duc de Lorraine par l'abbaye du Val Saint-Lambert de l'Ordre de Cîteaux. Le commandeur exonéra les cisterciens du relief que l'Ordre du Temple devait faire à Herstal et qui lui appartenait en propre. L'échange fut passée par devant plusieurs témoins (2).
2. — Liège, Archives de l'Etat, Val Saint-Lambert, original scellé sur double queue avec partie de sceau en cire brune.

Vers 1250, Mathieu Coral, chevalier et son épouse firent don en perpétuelle aumône à la maison du Temple de Visé du manoir qu'ils possédaient aux environs Hauts de Visé. Le chevalier de Wademont ajoute de son côté 80 bonniers de terres et des dîmes situées à Neuchâtel et Affray.
Cette mention de donations est faite dans la visite prieurale exécutée en 1505 par le visiteur de l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, à cette époque de Rhodes, lors de la séparation de la commanderie de Villers-le-Temple du bailliage d'Avalterre.
Lors de cette visite nous apprenons que le donjon de la commanderie de Visé tombait en ruines et qu'il fallait le consolider.

Lors des visites régulières, il est intéressant de noter l'existence d'une série de commandeurs dont les noms furent relevés sur des pierres tombales de la chapelle de la commanderie.

Ces visites, forts heureusement très bavardes sont d'autant plus précieuses qu'elles eurent lieu entre 1505 et 1631 avant que certaines sociétés à caractères secrets donnent d'autres idées sur les Templiers, surtout qu'elles calquèrent, pour la plupart, leurs textes sur le bibliothécaire de Louis XIV, Pierre Dupuy.

C'est ainsi que nous connaissons le dernier commandeur de Visé, ancien templier et commandeur de Saint-Jean auquel succéda son propre neveu. La pierre tombale spécifie avec le blason du supérieur:
DOM. ALT. NECNON. ILLVST.
JOHAN. DE. SALVESIUS.
MILIT. ET SAC. ORD.
TEMPLAR. COMEND.
OBIIT. ANNO. NAT. J. C.
M.CCC.XI. DIE. MENSIS. XVI. NOV. ?

Nous avons ensuite la mention de frère Roger de Quincy, chevalier de l'Ordre du Temple, commandeur de Visé, décédé le 29 mai 1277.

En 1297, le mardi après la fête de la nativité de Saint-Jean le Baptiste, les échevins de Liège mettent en possession ou mieux, rendent au Temple de Visé, 19 bonniers de terre qui leur avaient été légués Wautier Carot, fils de feu Piron, chevalier et sa femme Sophie, à condition de payer chaque année 30 muids d'épeautre à l'autel Notre-Dame de l'église paroissiale de Visé (3).
3. — Voir pièces justificatives.

L'inventaire de 1313 nous indique qu'il y avait 101 bonniers de terres arables formant le domaine, ce qui était important.

Je pense que l'on a trop souvent délaissé la maison du Temple de Visé qui paraît avoir été aussi importante que celle de Villers quant au domaine et les documents concernant l'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem nous le prouve, même si la maison fut mise à bail durant quelques temps.

Liège

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Liège, Commune: Liège

Il est difficile de donner une idée valable et exacte de ce qu'était la maison du Temple de Liège. A en croire le peu de documents que nous ayons, nous pouvons dire qu'elle ne servait que d'entrepôt et de maison de passage.

D'après le livre des fiefs de l'Eglise de Liège et surtout les Archives de l'Ordre de Malte, la maison des Templiers se trouvait dans la partie de la ville appelée: Chaudelistrée qui est actuellement identifiée avec la rue des Sœurs de Hasque. On ne sait exactement l'emplacement (1).
1. — PONCELET, Le livre des fiefs de l'Eglise de Liège sous Adolphe de la Mark, page 412. — GOBERT, Les rues de Liège, tome III, p. 507. — Liège, Archives de l'Etat commanderie de Villers-le-Temple, Liège, passim.

Ainsi qu'il a été signalé dans la description de Visé, la maison de Liège percevait une dîme sur le moulin d'Herstal s'élevant à 30 chapons et 4 setiers de mouture.
En dehors de cela on lui devait chaque année et en plusieurs termes 112 sous et 5 deniers obole.

La maison de Liège a servi d'entrepôt à toutes les maisons du Temple situées en Hesbaye comme ce fut le cas de celle de Huy puisque le même inventaire de 1313 nous précise que 1100 muids d'épeautre étaient versés aux greniers du Temple « partie à Huy et partie à Liège »

En effet comme on le verra par ailleurs, c'est de Liège que la circulation de l'argent pour certains marchands s'effectuait et de là les diverses sommes étaient acheminées sur le Trésor de Paris par l'intermédiaire d'un frère, chevalier ou chapelain (2).
2. — Cf. Laurent DAILLIEZ, Les Templiers banquiers, financiers et commerçants, même collection, à paraître.

Huy

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Liège, Arrondissement: Huy, Commune: Huy
Malgré les nombreuses mentions de Hutois comme membres de l'Ordre du Temple, certains furent même commandeurs, la cité de Pierre l'Ermite ne posséda jamais une importante maison, mais seulement, comme à Liège, un entrepôt.

Le Cartulaire de Flône nous précise ce fait. On ne sait donc rien sur cette maison dont les Archives de l'Ordre de Malte signalent son emplacement dans la rue Tâche Rousse.

L'Inventaire de 1313 est assez clair sur le rôle de la maison de Huy, les commanderies lui apportaient leurs denrées et les revenus de Huy, dont on ne sait strictement, rien étaient supervisés par le commandeur de Villers.

Acoz

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Hainaut, Arrondissement: Chaleroi, Commune: Gerpinnes
Cette maison, située dans le diocèse de Liège faisait partie du comté de Namur.
Simple maison d'après le chapitre provincial de 1253, elle ne reçut jamais de grandes donations et d'après l'inventaire de 1313, elle était baillée pour 82 muids d'épeautre qui allaient à Huy.

Hargimont

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Luxembourg, Arrondissement: Marche-en-Famenne, Commune: Marche-en-Famenne
Avec cette commanderie du Temple nous avons l'exemple même de la seigneurie templière avec fondation de village et création d'une noblesse locale. La commanderie d'Hargimont fut fondée en 1191 sur une libéralité des ducs de Lorraine-Luxembourg.

Le duc fit donation de son fief d'Hargimont aux frères de la Milice du Temple et à leurs successeurs pour y établir une maison de leur Ordre pour la rémission de ses péchés et le repos de l'âme de ses prédécesseurs. Il donne 52 bonniers de terre et de bois avec les droits de pacages, pêche, eau et de basse justice dans les bois seigneuriaux et le manoir qui s'y trouve. Cette donation fut octroyée le 19 juillet 1191 à Trêves (1).
1. — Sur Hargimont on trouve quelques mentions dans les Archives de l'Etat à Trêves dans le fond ecclésiastique — Il y a de nombreuses copies principalement des XVe et XVIe siècle concernant les Templiers principalement dans l'ancien diocèse, Cf. Laurent DAILLIEZ, Les Templiers en Lorraine et Champagne et Les Templiers en Allemagne, dans la même collection en préparation, et dans les Records de l'Ordre de Malte aux Archives Nationales de Paris.

En 1248, ainsi que nous le dit Tandel dans son étude sur les Communes luxembourgeoises, le commandeur d'Hargimont, frère Aubert recevait des biens à Cheneu près de Nassogne de la part de Ponsart de Soyen, et Marie sa femme, fille de Cherbault Lombart de Jemeppe (2).
2. — opuscule cité, tome V, page 109-110.

On ne peut pas douter de ce commandeur, comme le fait Chestret de Haneffe puisqu'au mois d'avril 1253 ce frère se trouvait au chapitre provincial de Paris qui prépara le chapitre général de 1254 à Césarée.

D'après l'inventaire de 1313, les biens de la commanderie d'Hargimont se décomposaient en 72 bonniers de terres labourables pouvant rapporter chacun un muid de blé par an, moitié épeautre, moitié avoine, le muid valant 10 sous tournois et le gros tournois du roi de France pris pour 18 deniers.

Il y avait en plus 7 bonniers de près avec un rendement s'approchant de 20 charretées de foin, et 21 bonniers de bois pour le chauffage et le four.

La maison possédait la dîme du village, évaluée à 15 muids de blé, moitié épeautre, moitié avoine.

Le moulin de la commanderie rapportait environ 15 muids de mouture.

Après la fondation du village en 1248, alors que frère Aubert était commandeur, certains droits furent octroyés aux villageois. Mais c'est en 1505 que nous apprenons les droits que possédaient les habitants, droicts qui venaient del Temple.

Lorsque le bailliage d'Avalterre fut démembré les habitants du village considérèrent qu'ils devaient conserver leurs privilèges anciens. Nous apprenons ainsi qu'ils avaient le droit de la glandée dans les bois de la seigneurie et pouvaient y faire paître les porcs qu'ils avaient élevés et non ceux qu'ils avaient achetés. Dans le cas où ils mettaient ces derniers à la glandée, ils devaient payer au commandeur un cens d'un quart d'épeautre.

Le commandeur de son côté était collateur de la cure et nommait le recteur avec approbation de l'évêque. Si les Templiers avaient la dîme du village, ils ne percevaient pas celle de l'église qui allait directement à l'évêque.

Leuze

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Hainaut, Arrondissement: Tournai, Commune: Leuze-en-Hainaut
Quoique située dans le Condroz, la maison de Leuze était une filiale d'Hargimont après la donation faite par Marie de Rochefort en 1255.

Nous ne connaissons pas l'importance du bien donné, mais seulement cette mention dans les Records de l'Ordre de Malte.

Commanderie en titre au chapitre général de Montpellier en 1293 elle possédait en 1313 un domaine qui comptait 200 bonniers de terres arables qui rapportaient chacun, 4 setiers d'avoine, 30 bonniers de grands bois dont 22 furent achetés par maître Wautier de Thynes au temps de l'emprisonnement des Templiers et le dit Wautiers dit tenir ce bois régulièrement et qu'il peut prouver cet achat.

La maison de Leuze avait en plus 20 bonniers de petit bois pour le chauffage et le four, 6 bonniers de prés.

On lui devait chaque année pour cens et dîmes, 33 muids 8 setiers d'épeautre et 22 muids d'avoine.

Le moulin de la commanderie était affermé à 16 muids de mouture, une livre de cire et une livre de poivre.

Ainsi se termine l'inventaire des maisons du Temple dans les provinces de Flandre, Hainaut, Brabant, Namur et Liège.

Les documents restants sont peu nombreux, mais le dépouillement des Archives de l'Ordre de Malte aux Archives Nationales de Paris la collection de Flandre et de la Belgique actuelle (lire les provinces qui forment) à la Bibliothèque Nationale de Paris ont permis de mettre une fin à certaines fausses interprétations.

Après avoir étudié le domaine Templier dans le Grand-Duché de Luxembourg, ou mieux les maisons du Temple en Luxembourg qui tout en étant dans le diocèse de Trêves dépendaient du Commandeur de France, je donnerai une liste de lieux templiers dont nous savons avec précision l'existence par les Archives de l'Ordre de Malte, mais dont nous n'avons aucun document précis. Viendra ensuite une liste de fausses interprétations.

Bitronsart

Pays: Belgique, Région: Wallonne, Communauté: française, Province: Hainaut, Arrondissement: Charleroi, Commune: Gerpinnes
On s'étonnera peut-être à ce que je donne les renseignements de cette commanderie à la fin de l'inventaire des maisons de l'Ordre du Temple ayant eu des sources archivistiques de l'époque. C'est que cette commanderie présente un cas tout particulier, non pas à l'intérieur du Temple, mais à la représentation de ses archives. Il en est de même de Saint-Denis.

Fondée en 1207, grâce aux libéralités des comtes de Namur qui accordèrent plusieurs droits après la donation de Wautiers de Gerpinnes, j'ai pu retrouver les archives qui sont dans une Bibliothèque privée, tout comme les documents concernant Saint-Denis. Malheureusement ces documents, au nombre de 22 pour Bitronsart et 6 pour Saint-Denis ne peuvent pas être montrés à cause du « dérangement » que cela pourrait occasionner au propriétaire ! ! ! (1).
1. — Il est tout de même scandaleux, malgré les remerciements que je dois à ce seigneur du XXe siècle, que certains propriétaires d'archives gardent jalousement ces dépôts qui ne leur servent à rien sinon à leur propre gloriole, sans rien vouloir dévoiler ce qui éviterait bien souvent des élucubrations. Il faut dire aussi, afin de ne pas jeter la pierre totale sur ces conservateurs, que certains chercheurs, et ce sont pas les vrais, ne respectent rien, coupent des pages de livres à la lame à rasoir et détériorent les documents. Veulent-ils être les seuls à avoir fait des trouvailles ? Je connais plusieurs propriétaires de fonds d'archives qui refusent maintenant catégoriquement l'accès de leur bibliothèque aux personnes ne montrant pas « pattes Blanches »

Toutefois ayant pu prendre quelques notes, malgré la méfiance, je donnerai la liste des commandeurs que j'ai pu noter et quelques renseignements qui se confirment par les actes connus dans les archives. Il en sera de même de la commanderie de Saint-Denis.

Dès les premières années du XIIIe siècle, Birtronsart existait et se trouvait sous la juridiction de Vaillampont. Le domaine des Templiers s'étendait autour de la commanderie sur une étendue de 112 bonniers. Comme à Villers-le-Temple c'est la seule commanderie des provinces étudiées qui avaient son domaine utile directement rattaché à la maison.

Bitronsart reçut de nombreux biens et souvent des offrandes furent données car, chose remarquable pour un lieu Templier, un pèlerinage avait lieu, celui de sainte Roselande à qui la chapelle était dédiée après que la maison du Temple soit dédicacée à Notre-Dame.

Les cens et les dîmes enrichirent cette commanderie et les seigneurs comme les paysans ne furent pas les seuls à faire des offrandes ou à régler des portions de biens en faveur des frères du Temple.

Le 21 juin 1240, Marguerite, abbesse du chapitre de Moustier-sur-Sambre signait un accord avec frère Renaud, précepteur de Hainaut, au sujet de certains alleux se trouvant à Gerpinnes (2).
2. — BARBIER (V.), Le chapitre noble de Moustier-sur-Sambre, page 126.

Ces alleux se trouvaient dans les environs immédiats de Gerpinnes et avaient été donnés en partie par les seigneurs du lieu. Les chanoinesses avaient quelques droits depuis 1227, aussi fallait-il mettre les choses au point afin d'éviter litiges et contestations.

Malgré cela il ne faut pas croire que tout allait bien dans le meilleur des mondes.

Les Templiers comme les seigneurs laïcs voulurent toujours protéger leurs droits, mais bien souvent les seigneurs ne respectèrent pas les données de leurs ancêtres donateurs. Cela se verra pour Roth-Vianden et cela se voit pour Bitronsart.

Quelques litiges eurent lieu et les actes nous rapportent celui qui intervint entre les Templiers et le seigneur de Loverval, Otton de Morialmé.

L'affaire portait sur la forêt de Rujemont. Ce fut le juge-bailli de Namur, Jean Colon, qui, en 1243, notifia l'arbitrage qu'il avait établi.

Les Templiers et le seigneur durent se partager la propriété de la forêt en deux. Or nous apprenons que cette forêt comprenait 24 bonniers de bois. Les deux parties se mirent d'accord, un accord sans rancune puisque le même jour les Templiers échangèrent avec le seigneur Otton douze bonniers de bois de cette même forêt contre le bois de Sechombru qui touchait à la commanderie et se trouvait sur la route de Nalinnes (3).
3. — CHESTRET DE HANEFFE, pièces II.

Le bois de Rujemont avait été donné aux Templiers par le comte de Hainaut en présence de frère Jacques, précepteur de la dite maison de Bitheronsart, moyennant un setier de rente à verser au seigneur de Loverval. Le comte de Hainaut avait conservé cette forêt mais c'était le père du dit seigneur qui l'avait en tenure avant de la céder aux Templiers. Il faut croire que le seigneur-fils préférait de la terre plutôt que de l'argent.

De la propriété de Bitronsart nous avons donc quelques renseignements qui sont donnés par l'inventaire de 1313. Cet inventaire qui avait été dressé lors de la prise de possession des biens par les chevaliers de Saint-Jean nous donne un idée de ce que pouvait être le domaine utile de la commanderie en plein expansion, étant donné qu'il eut quelques ventes pour recueillir des dîmes et des rentes, cela étant plus facile devant la pénurie des vocations templières à la fin du XIIIe siècle et surtout pour rapporter de l'argent après la chute d'Acre en 1291 et au début du XIVe siècle époque où Jacques de Molay avait la hantise de vouloir reprendre une nouvelle croisade.

Toutefois le 5 mai 1267, Jean, chevalier et seigneur d'Henripont donnait à frère Adam commandeur et à plusieurs frères son homme nommé Colart Bornant de Bouffioulx. Les Templiers reconnurent devoir en échange une rente annuelle de douze deniers blancs (4).
4. — voir pièces justificatives.

Lors de l'inventaire de 1313, les terres du temple étaient restées pendant près de 5 ans à l'abandon. Comme dans la plupart des cas où tous les frères furent pris, ce fut le pillage et de toutes les commanderies et maisons des provinces étudiées dans ce volume, Bitronsart fut celle qui fut la plus dévastée ainsi que nous l'apprend un compte-rendu de visite de 1315 fait par frère Le Rat, commandeur de France de l'Ordre de Saint-Jean (5).
5. — Paris, Archives Nationales, MM, livre vert.

En 1313, la propriété se décomposait ainsi: 80 bonniers de terres que l'on devait fumer de deux ans en deux ans (6). Chaque bonnier valait environ trois setiers d'épeautre.
6. — Les Templiers quoique l'on puisse en dire possédaient le sens de la culture et comme les cisterciens ils avaient leurs « secrets » Cette réflexion de fumer de deux ans en deux ans n'est pas signe de non production. Dans un manuscrit datant de 1191, retrouvé en Espagne, on sait que la fumure et le compost étaient très pratiqués chez les Templiers. Plusieurs expériences ont été faites d'après des recettes données dans ce manuscrit. Les résultats ont été catégoriques, cf., Laurent DAILLIEZ, les vrais mystères templiers, à paraître dans la même collection.

A cela s'ajoutaient 50 bonniers de mauvaises terres.

60 de grand bois complètement dévastés et 80 de petits bois dans le même état.

A Florennes la commanderie avait une maison avec 30 bonniers de près-pâturages tandis qu'à Samart elle possédait 10 livres de rente et la collation de la cure (7).
7. — La maison de Florennes fut donnée en 1264 et la dîme de Samart en 1246.
Sources: Laurent Dailliez — Les Templiers en Flandre, Hainaut, Brabant, Liège et Luxembourg — Nice: Alpes-Méditerrannée Éditions — Impres-sud, 1978.

Suite Luxembourg Retour



Haut-page