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Saladin, le plus Pur Héros de l'Islam

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    Chronologie de l'Islam d'Orient

    La naissance de l’empire islamique: 622-661 après Jésus-Christ
    — 622: Fondation, par Mohammad, du premier Etat islamique à Médine ; début de l’ère musulmane.

    — 632: Mort de Mohammad ; Aboû-Bakr est élu calife (khalîfa, « successeur »); soumission de l’ensemble de l’Arabie à l’Islam.

    — 634: ‘Omar est élu calife ; la capitale de l’Etat islamique demeure Médine.

    — 635: Conquête arabe de Damas, en Syrie byzantine ; victoire des Arabes contre les Perses sassanides à la bataille de Qâdesiyeh, en Mésopotamie.

    — 637: Conquête arabe de Jérusalem, en Palestine byzantine.

    — 639: Conquête arabe de l’Egypte byzantine.

    — 641: ‘Othmân (Osman) est élu calife à Médine; il commandera une récension définitive du Coran.

    — 651: Effondrement de la Perse sassanide ; les Arabes atteignent Hérât, alors capitale du royaume indépendant, mais culturellement très iranisé, des Huns Blancs ou « Hephtalites », grands protecteurs du bouddhisme dans la région afghane.

    — 656: ‘Alî, gendre du Prophète, proclamé calife par les troupes arabes en Mésopotamie.

    — 661: Guerre civile entre les conquérants ; ‘Alî meurt assassiné ; Mo‘âwiya, chef du clan des Omeyyades, proclamé calife par les troupes arabes en Syrie ; Damas devient la capitale de l’Empire ; les membres du « parti » (en arabe, shî‘a – d’où « chiites ») de ‘Alî, alors surtout nombreux en Irak, entrent en dissidence ; début de la scission entre « sunnites » (Sunna = « tradition »), qui reconnaissent la légitimité des califes Aboû-Bakr, ‘Omar, ‘Othmân (et aussi celle de ‘Alî), puis celle de Mo‘âwiya, et les « chiites » qui récusent tous ces califes autres que ‘Alî, pour affirmer la seule légalité de la succession califale dans la lignée familiale du Prophète à travers son gendre ‘Alî. Le chiisme, dont les rameaux se partageront plus tard entre « chiites des douze » (qui reconnaissent douze imâms légitimes à se succéder à partir de ‘Alî) et « chiites des sept » ou « ismaéliens » (dont la lignée d’imâms se détache à partir de l’imâm Ismâ‘îl ou Esmâ‘îl, septième successeur de ‘Alî), se dotera, par la suite, d’une riche théologie.

    II Le califat omeyyade de Damas: 661-750

    — 661: Avènement à Damas, promue capitale, de Mo‘âwiya, premier calife omeyyade.

    — 670: Les Arabes atteignent la Tunisie, alors territoire byzantin ; fondation de Kairouan.

    — 680: Califat de Yazîd Ier ; écrasement des insurgés chiites, par les troupes omeyyades, à Karbalâ, en Irak ; mort sur le champ de bataille du fils de ‘Alî, al-Hosayn ; Karbalâ devient ville sainte pour les chiites.

    — 684-685: Califat de Marwân Ier.

    — 685-705: Califat de ‘Abd al-Malik ; l’arabe remplace le grec et le moyen-perse dans la haute administration ; ‘Abd al-Malik abolit la représentation figurative du calife régnant sur les monnaies, et toute image dans les nouveaux sanctuaires de la Foi: Coupole du Rocher à Jérusalem, Grande Mosquée des Omeyyades à Damas ; naissance de la décoration abstraite musulmane, à partir de modèles végétaux et géométriques byzantins.

    — 705-715: Califat de Walîd Ier ; fresques et mosaïques figuratives dans ses palais et pavillons de chasse, à partir de modèles byzantins ; naissance de l’art figuratif musulman, pleinement admis à la cour, mais banni des sanctuaires.

    — 711: En Occident, les musulmans passent du Maroc en Espagne ; en Orient, ils atteignent l’Indus.

    — 715-717: Califat de Solaymân.

    — 717: Léon III devient empereur à Byzance ; les images, admises à la cour de Constantinople pour célébrer l’empereur, sont cependant désormais bannies des sanctuaires: début de la crise « iconoclaste » ; le prélat orthodoxe Jean Damascène, dit « Mansoûr » en arabe, en sécurité à Damas sous la protection des califes, défend le culte des icônes contre les empereurs dits « iconoclastes » de Byzance.

    — 732: Les Francs arrêtent la progression des musulmans d’Espagne à Poitiers.

    — 749-750: Révolte des provinces orientales nouvellement converties – Transoxiane, Iran, Irak — contre le monopole du pouvoir détenu par les Arabes de Syrie ; les révoltés suivent la bannière noire du clan des ‘Abbâssides, de la famille d’al-‘Abbâs, oncle du Prophète.

    — 750: Mort du dernier calife omeyyade, Marwân II, contre les ‘Abbâssides. Transfert du pouvoir de Syrie en Irak. A la nouvelle cour ‘abbâsside en Mésopotamie, les influences perses sassanides prédominent, de plus en plus, sur celles héritées de Byzance (mais sans les abolir): naissance de la civilisation classique de l’Islam, synthèse des cultures et des héritages des mondes arabe, hébraïque, byzantin, perse et indien.

    III Le califat ‘abbâsside de Baghdâd: première période: 750-1055

    — 750-754: Le calife as-Saffâh pourchasse et extermine les Omeyyades.

    — 751: Heurts en Asie Centrale entre musulmans et chinois à la bataille de Talas près de Samarcande ; des artisans chinois captifs auraient enseigné, aux musulmans, le secret de la fabrication du papier à base de chiffons ; le papier remplacera progressivement partout, en Islam, à partir du tournant des VIIIe et IXe siècles, le papyrus, le parchemin et le vélin ; les chrétiens occidentaux emprunteront son usage aux musulmans d’Espagne à partir du XIIe siècle.

    — 754: Avènement du calife al-Mansoûr ; le scribe iranien converti, Rôzbeh ibn al-Moqaffa‘, traduit en arabe pour le nouveau calife les fabliaux animaliers, d’origine indienne, de Kalîla et Dimna, texte favori des enlumineurs musulmans ; essor de la prose artistique arabe.

    — 756: Indépendance de l’émirat de Cordoue, sous un prince qui se proclame un authentique Omeyyade rescapé du massacre ; début de l’éclatement de l’Empire islamique.

    — 757: Le traducteur des fabliaux indiens, Rôzbeh ibn al-Moqaffa‘, mis à mort en Irak sur soupçon d’hérésie manichéenne.

    — 762: Al-Mansôur transporte la capitale ‘abbâsside à Baghdâd (en perse, « la Dieu-donnée »), sur le site d’un ancien village sassanide. Les répresentations figuratives des califes dépeignent désormais ceux-ci dans l’attitude et revêtus des attributs des anciens souverains sassanides.

    — 775-785: Califat d’al-Mahdî. Persécutions contre les manichéens en Mésopotamie et en Syrie, dont l’influence intellectuelle demeure cependant très vive auprès des élites.

    — 785-786: Califat d’al-Hâdî.

    — 786: L’impératrice Irène, à Constantinople, rétablit le culte orthodoxe des icônes ; fin de la « crise iconoclaste » à Byzance.

    — 786-809: Califat de Hâroûn ar-Rashîd ; zénith du pouvoir politique de Baghdâd ; échanges d’ambassades avec Byzance et Charlemagne.

    — 809-813: Califat d’al-Amîn.

    — 810-870: Vie d’al-Bokhârî, théologien né à Bokhârâ (actuel Ouzbékistan), mort à Baghdâd ; dans un canon « authentique » (Sahîh), il réunit les « Dits » ou hadîth attribués au Prophète, dont ceux qui condamnent l’art figuratif.

    — 813-833: Califat d’al-Ma’moûn ; fondation de la « Maison de la Sagesse » à Baghdâd, nombreuses traductions en arabe de textes grecs philosophiques, cosmologiques et médicaux ; adaptation et élaboration des mathématiques indiennes (invention de l’algèbre) ; nombreux échanges d’ambassades avec Byzance ; zénith de la civilisation ‘abbâsside ; essor de la mystique musulmane ou « soûfisme. »

    — 831: Conquête musulmane de Palerme, menée par les Aghlabides, gouverneurs ‘abbâssides de Tunisie.

    — 838-923: Vie de Tabarî, théologien et historien né dans le Tabarestân (nord iranien), mort à Baghdâd ; rédige, en arabe, un vaste commentaire du Coran, et une chronique universelle qui veut illustrer la convergence des histoires des rois-prophètes d’Israël et des grands rois sassanides pour aboutir à la révélation mohammadienne et à l’instauration du califat.

    — 875: Résurgence d’un émirat autonome iranien à Bokhârâ, celui des Sâmanides (sunnites) qui se reconnaissent, cependant, vassaux des califes de Baghdâd ; début de la résurrection littéraire de la langue persane, désormais transcrite en caractères arabes, à parité avec l’arabe dans les cours de l’Islam d’Orient.

    — 909: Proclamation, en Tunisie révoltée, d’un contre-califat chiite (tendance ismaélite), celui des Fâtimides.

    — 929: L’émirat de Cordoue se proclame un califat (sunnite). L’art figuratif de Cordoue (notamment ses ivoires sculptés) reflète les modèles baghdâdiens eux-mêmes issus de modèles sassanides.

    — 932: Les califes de Baghdâd réduits au statut de « protégés » d’une famille princière chiite iranienne, les Boûyides.

    — 963: Bal‘amî, vizir sâmânide à Bokhârâ, traduit Tabarî en persan ; début de l’effloraison de la littérature persane, à parité avec l’arabe, en Islam d’Orient.

    — 969: Les Fâtimides conquièrent l’Egypte ; fondation du Caire ; le monde islamique désormais partagé entre trois califats: Cordoue (sunnite), Le Caire (chiite ismaélite), Baghdâd (sunnite, mais sous protectorat chiite, et désormais le plus faible des trois).

    — 998-1030: Règne à Ghaznî, dans le Sud-est afghan actuel, du sultan Mahmoûd, premier grand souverain turc (sunnite), vassal formel du calife de Baghdâd ; conquêtes en Inde jusqu’au Pandjâb; rédaction à Ghaznî, en persan, du « Livre des rois » (Shâh-Nâmeh) du poète Ferdawsî, qui sera l’un des textes préférés des enlumineurs musulmans d’Orient ; travaux philosophiques et scientifiques d’al-Bêroûnî à Ghaznî, et d’Ibn Sînâ (« Avicenne ») à Bokhârâ et à Ispahan ; dans l’art figuratif de Ghaznî (métaux ciselés et fresques) prédomine toujours la manière héritée des Sassanides.

    — 1030: En Occident, éclatement du califat de Cordoue entre roitelets hispano-musulmans.

    — 1055: Les Turcs seldjoukides, issus des territoires de l’actuel Turkménistan, imposent leur protectorat sur Baghdâd et deviennent maîtres du Proche-Orient. De nombreux clans turcs essaiment vers le Proche-Orient.

    IV Le califat ‘abbâsside de Baghdâd: deuxième période, le protectorat turc: 1055-1220

    — 1055: Maîtres de Baghdâd, les Turcs seldjoukides cherchent à rétablir, à travers leur empire, le « sunnisme » ou orthodoxie islamique ; parité littéraire de l’arabe et du persan.

    — 1066: Conquête de l’Angleterre par le duc Guillaume de Normandie ; montée de la puissance des Normands, véritable contre-partie occidentale de celle des Seldjoukides ; de manière très similaire à l’usage du persan, promu langue des princes par rapport à l’arabe, resté idiome de la liturgie, parmi les Seldjoukides, essor littéraire du français, devenue langue des chevaliers, par rapport au latin, demeuré idiome liturgique, dans le royaume anglo-normand (un trouvère aurait chanté une version de la « Chanson de Roland » devant les armées du duc Guillaume, tout comme les poètes de cour chantent, en persan, le « Livre des rois » de Ferdawsî devant les sultans turcs de Ghaznî à Konya).

    — 1071: Les Turcs seldjoukides écrasent l’armée byzantine à Manzikert et s’engouffrent en Anatolie. De nombreux clans turcs s’installent en Anatolie qui devient, linguistiquement, une « Turquie » ; la langue de cour du sultanat seldjoukide demeure toutefois le persan, comme le français celle du royaume anglo-normand.

    — 1072-1092: Règne du sultan seldjoukide Malek-Shâh ; apogée de la puissance turque seldjoukide, étendue de l’Anatolie et de la Syrie jusqu’à Hérât et l’actuel Turkménistan ; écrits théologiques et mystiques en arabe et en persan d’al-Ghazâlî (« Algazel »), poésie persane de ‘Omar Khayyâm.

    — 1085: Contre-offensive de la chrétienté latine en Occident: prise de Tolède par les Castillans, et de Syracuse par les Normands.

    — 1095-1099: Contre-offensive de la chrétienté latine en Orient: Première Croisade des chevaliers francs, prise de Jérusalem ; apogée de la puissance normande, de Londres à Palerme et à Antioche ; duel méditerranéen entre Normands et Seldjoukides.

    — 1126-1152: Raymond de Sauvetât, archévêque français de Tolède, préside à la traduction massive, de l’arabe en latin, d’ouvrages philosophiques, médicaux, algébriques, astronomiques et alchimiques ; introduction du papier en chrétienté occidentale ; influences hispano-arabes sur l’architecture romane au Puy, à la Charité et à Vézelay ; à Paris, reconstruction de la basilique de Saint-Denis dans le nouveau style gothique.

    — 1150: Montée, en Asie centrale, du sultanat sunnite des Ghôrides, montagnards tâdjîks du Ghôr, arrière-pays de Hérât.

    — 1157: Mort du dernier des grands sultans seldjoukides, Sandjar, à Merv (actuel Turkménistan) ; désintégration de l’empire seldjoukide en Asie Centrale et en Iran, mais la dynastie règne toujours, prospère, en Anatolie, sous les sultans de Konya ; à Ghaznî, poésie persane mystique de Sanâ’î.

    — 1171: L’officier kurde Salâh-ad-Dîn (« Saladin ») renverse le califat chiite ismaélite des Fâtimides au Caire, et y rétablit l’orthodoxie sunnite.

    — 1174: Saladin devient maître de la Syrie, et prend en tenailles le royaume croisé de Jérusalem.

    — 1175: Herât devient la capitale des sultans ghôrides.

    — 1187: Saladin chasse les Croisés de Jérusalem.

    — 1192: Les Ghôrides conquièrent Delhi et règnent sur un empire étendu de Hérât au Gange.

    — 1198: En Occident musulman, mort du philosophe andalou Ibn Roshd (« Averroès ») à Marrakech ; départ du mystique andalou Ibn ‘Arabî pour l’Orient (il enseignera à Konya en 1205, et mourra à Damas en 1240).

    — 1200: Les Ghôrides construisent la Grande Mosquée de Hérât.

    — 1206: Déclin ghôride. Delhi devient un sultanat indépendant.

    — 1207: Chute des Ghôrides ; Hérât conquise par Mohammad Khwârazm-Shâh (le Khwârazm correspond à l’actuel Turkménistan) qui étend sa puissance, aux dépens de celle des Ghôrides de Hérât, à travers l’Asie Centrale.

    — 1212: En Occident musulman, victoire de la chevalerie castillane à la bataille de Las Navas de Tolosa ; effondrement politique et militaire de l’Islam andalou.

    — 1180-1220: En Orient musulman, le calife ‘abbâsside an-Nâsir li-Dîn Allâh, qui ne règne de manière effective que sur Baghdâd et ses environs mais dont la suzeraineté symbolique est encore reconnue par tous les sultanats sunnites d’Asie, promeut une brillante renaissance culturelle dans l’ancienne capitale califale ; le calife, dans un esprit profondément soûfî, réorganise les chartes des guildes, confréries et ordres de « chevalerie » (fotowwa) en Islam ; les années de son règne coïncident avec le zénith littéraire et mystique absolu de l’Islam classique, tant en Occident d’expression arabe (Ibn Tofayl, Averroès, Ibn ‘Arabî) qu’en Orient d’expression arabe et persane (Sohrawardî en prose, et, en vers, les poètes ‘Attâr et Nezâmî, qu’illustrera notamment Behzâd) ; en Irak, production de somptueux manuscrits ; âge d’or de la peinture de la Première Ecole de Baghdâd.

    — 1206: Temoudjin réunit, dans le Gobi, les tribus mongoles, qui le proclament Tchenkkîz Khân, « universel seigneur. »

    — 1211-1277: Les Mongols, sous Tchenkkîz Khân, conquièrent la Chine du Nord.

    V L’ère mongole et tîmoûride 1220-1507

    — 1220-1221: Invasion mongole du royaume des Khwârazm-Shâh, qui comprend alors l’ensemble du Tadjikistan, de l’Ouzbékistan, du Turkménistan et de l’Afghanistan actuels. Les Mongols conquièrent Bokhârâ et Samarcande, atteignent et détruisent Herât. Le second et dernier prince de la dynastie, Djalâloddîn Khwârazm-Shâh, résiste longuement dans les montagnes d’Afghanistan oriental, vainc les Mongols à Parwân au nord de Kaboul, puis doit s’enfuir en Inde.

    — 1227: Mort de Tchenkkîz Khân ; avènement du Grand Khân Ögödeï.

    — 1240-1241: Les Mongols, sous le Grand Khânat de Möngké, conquièrent Kiev et les principautés russes, écrasent la chevalerie polonaise à la bataille de Liegnitz puis celle de Hongrie à Mohi, et atteignent la côte adriatique devant l’île de Tran, en Croatie.

    — 1243: Les Mongols, sous le Grand Khânat de Möngké, écrasent les Turcs seldjoukides d’Anatolie à la bataille du Kösé-Dâgh (« le mont-chauve ») et imposent leur protectorat sur le sultanat de Konya ; poésie mystique en langue persane de Roûmî, à Konya.

    — 1246: Le nouveau Grand Khân, Güyük, reconnaît la principauté vassale de Hérât, sous un souverain tâdjîk, Shamsoddîn, du clan local des Kart.

    — 1258: Hülegü Khân, petit-fils de Tchenkkîz Khân, met Baghdâd à sac ; mort dans les flammes de son palais du dernier calife ‘abbâsside, al-Mosta‘sem Bi-llâh ; élégie sur la chute de Baghdâd par le plus grand conteur persan du XIIIe siècle, Sa‘dî de Shîrâz, dont Behzâd illustrera “Le Verger. »

    — 1259-1260: Avènement du Grand Khân Qoubilây, petit-fils de Tchenkkîz Khân ; Qoubilây Khân installe le siège de son pouvoir à Pékin (où la dynastie mongole est appelée, en chinois, les Yüan); son cousin Hülegü Khân reconnaît la suzeraineté de Pékin et installe son propre pouvoir à Tabrîz: naissance du royaume des Mongols d’Occident en terre d’Islam, dit royaume des Îl-Khân ou « khâns vassaux. »

    — 1260: Défaite des Mongols d’Occident devant les troupes syriennes et égyptiennes à ‘Ayn-Djâloût en Palestine ; arrêt de l’expansion mongole vers l’ouest musulman; émergence du nouveau sultanat, dit des Mamloûk, en Egypte et en Syrie ; les peintures figuratives des manuscrits mamloûks prolongent, dans un style fossilisé, l’ancienne manière ‘abbâsside.

    — 1271-1287: Voyage jusqu’à la cour de Qoubilây Khân, à Pékin, du marchand vénitien Marco Polo ; départ par voie de terre depuis Saint-Jean-d’Acre à travers la Syrie, l’Anatolie, l’Iran, le nord afghan et l’Asie Centrale chinoise, et retour maritime par l’Océan Indien et le Golfe, puis l’Iran et l’Anatolie par voie de terre jusqu’à Trébizonde et par navire jusqu’à Constantinople et, de là, Venise.

    — 1291: Conquête par les Mamloûks de Saint-Jean-d’Acre, dernier bastion des Croisés en Palestine ; consolidation, face aux Îl-Khân maîtres de l’Iran, de l’Irak et de l’Anatolie, du sultanat mamloûk en Egypte et en Syrie.

    — 1295: Conversion à l’Islam de l’Îl-Khân de Tabrîz, Ghâzân Khân, qui maintient toutefois des relations diplomatiques et culturelles étroites avec ses cousins de Pékin. A Hérât, l’émir vassal Ekhtiyâroddîn Kart est autorisé à relever la citadelle.

    — 1299: Le sultan afghan de Delhi, ‘Alâ-od-Dîn Khildjî (Ghilzaï), repousse du Pandjâb une incursion des Mongols du clan des Tchaghatâï, suzerains en Transoxiane et en Afghanistan oriental ; zénith militaire, politique et culturel du sultanat afghan de Delhi, dont la langue de cour est le persan ; le poète Amîr Khosrô de Delhi, qu’illustrera Behzâd, adapte les narrations de Nezâmî pour la cour indo-musulmane.

    — 1300: En Anatolie sous protectorat mongol, désintégration du sultanat seldjoukide ; naissance, aux frontières des dernières possessions byzantines en Anatolie, de l’émirat ottoman. En Italie, année du jubilé papal ; date symbolique retenue par Dante pour sa vision de l’autre monde.

    — 1316-1335: Règne à Tabrîz du dernier des grands Îl-Khân, Aboû-Sa‘îd ; renaissance culturelle d’un empire mongol islamisé et iranisé ; poésie persane de Khwâdjoû Kermânî et chroniques en persan et en arabe de Rashîdoddîn Fazlollâh, dédiées au souverain ; production, pour l’Îl-Khân Aboû-Sa‘îd, de deux somptueux manuscrits en langue persane, les fabliaux de Kalîla et Dimna et « Le livre des rois« , illustrés selon la nouvelle manière influencée par la peinture chinoise.

    — 1318: A Hérât, investiture du prince vassal Ghiyâsoddîn Kart par le pouvoir de Tabrîz.

    — 1335: Eclatement de l’empire des Îl-Khân ; le clan mongol occidental des Djalâyer fonde le sultanat d'« Irak » entre Tabrîz et Baghdâd ; à Kêsh près de Samarcande, naissance, dans le clan mongol turcisé des Barlâs, du prince Temür ou Tîmoûr, surnommé plus tard en persan Tîmoûr-é Lang ou « Tîmoûr le Boiteux », d’où la forme française « Tamerlan. »

    — 1346-1350: « La Peste noire » ravage l’Asie, l’Afrique du Nord et l’Europe et tue peut-être un tiers des habitants de l’ancien monde.

    — 1355: Les Ottomans s’emparent de Gallipoli, aux portes de Byzance, et passent en Europe.

    — 1368: A Pékin, renversement des Mongols par la nouvelle dynastie chinoise des Ming.

    — 1370: Tamerlan, à la tête du clan mongol turcisé des Barlâs, s’empare du pouvoir à Samarcande (actuel Ouzbékistan) et à Balkh (nord afghan actuel), épouse une descendante de Tchenkkîz Khân pour revendiquer la légitimité impériale, et entreprend de réunir par la force les débris de l’empire mongol (d’où le nom « moghol », forme persane de « mongol », donné plus tard à ses descendants princiers à Kaboul et en Inde).

    — 1374-1410: Règne à Tabrîz et à Baghdâd du plus raffiné des mécènes mongols islamisés, le sultan Ahmad Djalâyer ; épanouissement, en peinture, de la Seconde Ecole de Baghdâd.

    — 1381-1383: Tamerlan conquiert, puis massacre Hérât.

    — 1387: Tamerlan conquiert et massacre Ispahan ; à Shîrâz, la légende veut qu’il ait rencontré Hâfez, le plus grand poète lyrique persan du XIVe siècle. Tamerlan embellit Samarcande ; épanouissement de l’art de la faïence d’architecture.

    — 1389: Les Turcs ottomans écrasent les Serbes à la bataille de Kossovo Polyé.

    — 1391: Tamerlan écrase ses cousins mongols islamisés dits de la Horde d’Or, dans le sud des steppes russes.

    — 1393: Première prise de Baghdâd par Tamerlan ; le sultan Ahmad Djalâyer s’enfuit chez les sultans mamloûks de Syrie et d’Egypte, puis revient dans son royaume en 1394.

    — 1396: Les Ottomans écrasent la coalition des chevaliers hongrois et français à Nicopolis, en Bulgarie, et consolident leur suprématie dans les Balkans.

    — 1398: Tamerlan conquiert et massacre Delhi.

    — 1401: Tamerlan soumet Damas et rencontre le grand historien maghrébin Ibn Khaldoûn, qui y séjournait ; Tamerlan reconquiert et massacre Baghdâd ; le maître-peintre de Baghdâd, ‘Abd-ol-Hayy, déporté à Samarcande ; le sultan Ahmad Djalâyer se réfugie chez les Ottomans, mais reviendra dans Baghdâd dès le retour de Tamerlan à Samarcande, après la bataille d’Ankara.

    — 1402: Tamerlan écrase les Ottomans à la bataille d’Ankara: leur puissance en Asie Mineure est ébranlée, mais pas dans les Balkans ; les royaumes chrétiens de l’époque voient cependant un répit miraculeux, dans le coup d’arrêt ainsi infligé par Tamerlan à ses coreligionnaires, dans l’avancée irrésistible des Ottomans.

    — 1405: Mort de Tamerlan à Otrar, au moment où il entreprend la conquête de la Chine.

    — 1405-1447: Après les guerres de succession, règne de Shâh Rokh, fils de Tamerlan, à Hérât: premier âge d’or de la Hérât tîmoûride ; Oulough-Beg, fils de Shâh-Rokh, exerce la régence à Samarcande et s’intéresse à l’astronomie (il périra en 1449, assassiné par son propre fils durant le renouvellement des guerres civiles après la mort de Shâh Rokh).

    — 1410: Le clan turkmène dit du Mouton Noir, en Anatolie orientale, conquiert le royaume d'« Irak » de Tabrîz et Baghdâd ; mise à mort du sultan Ahmad Djalâyer ; les Turkmènes du Mouton Noir reconnaissent cependant la suzeraineté de Shâh Rokh à Hérât ; de nombreux peintres du sultan Ahmad gagnent la cour du prince tîmoûride Eskandar-Soltân, neveu de Shâh Rokh, à Shîrâz ; brève effloraison d’une école de peinture à Shîrâz.

    — 1411: Conversion pacifique à l’Islam du râdjâ hindouiste de Malacca, pour mieux participer au commerce des épices et du bois précieux de l’Océan Indien avec l’Egypte, trafic mondial alors dominé par les navigateurs musulmans du Goudjerate et d’Oman dans les eaux d’Orient, et par les navigateurs vénitiens en Méditerranée; début de l’islamisation du monde malais et des Îles de la Sonde. Relais de caravanes entre les ports du Golfe et Hérât ; la cité exporte, vers ce réseau mondial, ses soieries et ses tapis précieux.

    — 1412-1422: Echanges d’ambassades entre Hérât et Pékin ; renouvellement des influences esthétiques chinoises sur les arts de l’Islam d’Orient.

    — 1414: Rébellion écrasée du prince tîmoûride Eskandar-Soltân, qui revendique son indépendance à Shîrâz ; Shâh-Rokh lui fait crever les yeux ; certains de ses peintres demeurent à Shîrâz, sous le nouveau gouverneur Ebrâhîm-Soltân, fils de Shâh Rokh ; d’autres sont attirés à Hérât par le prince Bâysonghor, fils préféré de Shâh Rokh.

    — 1414-1447: Essor de la première école de peinture à Hérât, sous le mécénat du prince Bâysonghor et, après la mort de celui-ci en 1433, du prince ‘Alâ-od-Dawleh fils de Bâysonghor ; de nombreux artistes gagnent Herât depuis Tabrîz, Baghdâd, Shîrâz et Samarcande.

    — 1447: Mort de Shâh-Rokh ; l’impératrice Gawhar-Shâd, à Hérât, exerce la régence de fait ; début des guerres civiles qui lézardent l’empire tîmoûride ; les Turkmènes du clan du Mouton Noir, à Tabrîz, ne se reconnaissent plus les vassaux de Hérât ; partage, de fait, du monde persan entre deux pôles de pouvoir, l'« occidental » à Tabrîz, l'« oriental » à Hérât.

    — 1447-1457: Guerres civiles entre princes tîmoûrides.

    — 1453: Le sultan ottoman Mehmed II, pourvu d’une puissante artillerie, conquiert Constantinople ; fin de l’Etat byzantin et pleine résurgence de la puissance ottomane ; nombreuses ambassades vénitiennes auprès des Turkmènes de Tabrîz pour tenter de sceller une alliance militaire et prendre les Ottomans à revers ; premiers contacts artistiques entre Venise et le monde turco-persan. En Europe, Gutenberg développe l’imprimerie.

    — 1457: Le tîmoûride Aboû-Sa‘îd prend le pouvoir à Hérât, et fait exécuter l’impératrice douairière Gawhar-Shâh pour mettre un terme à ses intrigues. Le sultan de Hérât doit cependant se résoudre à la perte de l’Iran occidental, détenu par les sultans turkmènes de Tabrîz.

    — 1464: Défilé des guildes de l’empire tîmoûride devant le sultan Aboû-Sa‘îd de Hérât.

    — 1465: Naissance à Hérât de Kamâloddîn Behzâd

    — 1467: Les Turkmènes du clan rival du Mouton Blanc supplantent le clan du Mouton Noir à Tabrîz et à Baghdâd, et s’emparent du royaume d’ « Irak. »

    — 1469: Le sultan tîmoûride Aboû-Sa‘îd, depuis Hérât, se porte à la tête d’une expédition pour reconquérir Tabrîz ; tombé en embuscade et fait prisonnier, il est exécuté par ses adversaires turkmènes; les Turkmènes du Mouton Blanc refoulent les troupes tîmoûrides et occupent, à leur tour, Hérât, tandis que le prince tîmoûrîde Hosayn Mîrzâ Bayqarâ, retranché dans les montagnes, s’efforce de reconquérir la capitale de ses ancêtres.

    — 1470: Le sultan Hosayn Mîrzâ Bayqarâ (r. 1470-1506) reconquiert Hérât, en expulse les Turkmènes du Mouton Blanc, et inaugure le second âge d’or de la ville ; partage définitif du monde persan entre le sultanat turkmène de Tabrîz et le sultanat tîmoûride de Hérât; le ministre tout-puissant de Hérât est Mîr ‘Alî Shêr Nawâ’î, mécène des peintres et des poètes, et poète lui-même en langue turque orientale ; ère du théologien et poète Djâmî de Hérât (1414-1492), sommité intellectuelle du monde sunnite de son temps, et du peintre Behzâd.

    — 1478-1490: Règne à Tabrîz du sultan turkmène Ya‘qoûb, du clan du Mouton Blanc ; apogée de l’école turkmène de peinture, « romantique » (avec le maître Mohammad Siyâh-Qalam), par rapport à l’école de Hérât, « classique » (avec le maître Behzâd).

    — 1480: Séjour à Constantinople, à la cour du sultan Mehmed II, des peintres Gentile Bellini et Costanzo da Ferrara ; influences vénitiennes sur la peinture islamique.

    — 1481: Le nouveau sultan ottoman, Bâyezîd II, écrit la première de quatre lettres respectueuses à Djâmî, et cherche même à l’attirer à sa court: témoignage de l’influence spirituelle et littéraire du poète de Hérât à travers tout l’Islam d’Orient de son temps ; l’oeuvre mystique et théologique de Djâmî, en arabe et en persan, reflète la pensée de l’andalou Ibn ‘Arabî (1165-1240), et son œuvre littéraire, en persan, celle du poète Nezâmî de Gandjeh (1141-1209): arrière-plan intellectuel de la peinture de Behzâd.

    — 1486: Le peintre Qâsem fils de ‘Alî, membre de l’atelier de Behzâd, peint les portraits du ministre Nawâ’î et du poète-théologien Djâmî de leur vivant, agenouillés devant l’ombre du poète Nezâmî.

    — 1488-1489: Behzâd, avec son maître Mîrak, illustre et signe le manuscrit du Boûstân (« Le Verger »), poème narratif de Sa‘dî (XIIIe siècle), dédié au sultan Hosayn Mîrzâ, et y incorpore des vers de Djâmî: ceux-ci témoignent de l’appui, apportée par le poète-théologien de Hérât, à l’œuvre figurative du peintre.

    — 1492: Mort de Djâmî, que la convention littéraire considère comme le dernier grand poète classique persan ; en Occident, chute de Grenade, dernier bastion musulman en Espagne ; les Rois Catholiques expulsent les juifs d’Espagne ; Colomb atteint les Antilles.

    — 1493-1494: Behzâd illustre pour la cour de Hérât deux manuscrits successifs des « Cinq Trésors » du poète Nezâmî.

    — 1494: A Istanbul, le sultan Bâyezîd II accueille les réfugiés juifs d’Espagne, mais refuse l’usage de l’imprimerie – que ces juifs espagnols maîtrisent — pour les livres en caractères arabes. (L’Islam en restera, délibérément, à l’ère du manuscrit, jusqu’à l’installation définitive d’une imprimerie arabe, au Caire, en 1798, par Bonaparte.)

    — 1498: Vasco de Gama atteint la côte indienne, et réussit le contournement portugais de l’espace terrestre islamique par voie de mer.

    — 1500: Les Ouzbeks, descendants de la Horde d’Or affaiblie par les attaques de Tamerlan, fuient la résurgence russe et descendent vers l’Asie Centrale, où règnent leurs ennemis héréditaires, les Tîmoûrides ; en 1500, les Ouzbeks conquièrent Samarcande.

    — 1501: Mort à Hérât du ministre Nawâ’î. En Iran occidental, un nouveau chef turkmène, Esmâ‘îl, du clan des Séfévides, supplante les Turkmènes du Clan du Mouton Blanc à Tabrîz.

    — 1504: L’aventurier italien Ludovico di Varthema, agent portugais à Ormuz dans le Golfe, rédige la première description européenne du royaume de Hérât, dont il découvre les soieries sur les marchés de l’île.

    — 1506: Mort du sultan Hosayn Mîrzâ à Hérât ; son fils, Badî‘-oz-Zamân, esthète raffiné, lui succède ; visite à Hérât du prince tîmoûride de Kaboul, Bâber, qui laissera de nombreux témoignages écrits décrivant la ville et ses peintres, dont Behzâd.

    — 1507: Conquête de Hérât par les Ouzbeks de l’émir Shaybânî Khân, effondrement du royaume tîmoûride ; Badî -oz-Zamân fuit auprès des Séfévides d’Iran ; Bâber, à Kaboul, reste le seul prince régnant de la dynastie tîmoûride (dite désormais « moghole »); à Hérât, un portrait du conquérant ouzbek de la ville, Shaybânî Khân, est traditionnellement attribué à Behzâd.

    VI L’ère des quatre empires néo-classiques, Séfévides (chiites), Ottomans (sunnites), Ouzbeks (sunnites), Moghols (sunnites): 1501-1722

    — 1501: Shâh Esmâ‘îl (r. 1501-1524), du clan turkmène des Séfévides, prend le pouvoir à Tabrîz ; il y impose la foi chiite (tendance des « douze »).

    — 1507: Les Portugais, débarqués à Ormuz, veulent appuyer la nouvelle dynastie chiite séfévide d’Iran contre les puissances sunnites, avec des fournitures d’artillerie; en Orient, les Ouzbeks sunnites prennent Hérât. Début des « guerres de religion », en Islam, entre Ottomans et Ouzbeks sunnites, d’un côté, et Séfévides chiites, de l’autre.

    — 1509: A Diu sur la côte nord-ouest de l’Inde, les canonnières portugaises écrasent les puissances navales coalisées des sultanats sunnites du Goudjerate et d’Egypte et du royaume hindou de Calicut ; la suprématie maritime en Océan Indien et dans le Golfe, et le contrôle du commerce des épices, passent désormais entre les mains des Européens.

    — 1510: Le Shâh Esmâ‘îl chasse les Ouzbeks sunnites de Hérât et annexe l’ancienne capitale tîmoûride ; mort sur le champ de bataille de l’émir ouzbek Shaybânî Khân ; le Shâh Esmâ ‘îl impose le chiisme à Hérât (où il demeure encore majoritaire dans le centre-ville); les Ouzbeks se replient sur Bokhârâ, sans pour autant cesser, un siècle durant, de harceler les Séfévides pour tenter de leur reprendre Hérât. En Inde, les Portugais occupent Goa.

    — 1510-1511: Séjour du Shâh Esmâ‘îl à Hérât, rencontre avec Behzâd qui rallie la nouvelle dynastie séfévide et aussi le chiisme ; Behzâd accompagne le shâh dans sa visite après du neveu (lui aussi rallié) du grand Djâmî, le poète Hâtefî, et peint le portrait de ce dernier désormais coiffé du turban « à bâtonnet » des chiites.

    — 1514: Le sultan ottoman sunnite Sélim Ier, grâce à sa supériorité en artillerie, écrase les armées chiites du Shâh Esmâ‘îl à la bataille de Tchâldérân, près de Tabrîz ; selon une légende ottomane, Esmâ‘îl aurait caché Behzâd dans une grotte près du champ de bataille pour empêcher son maître-peintre de tomber entre les mains de l’ennemi (en réalité, le peintre se trouvait alors toujours à Hérât); les Ottomans pillent la Bibliothèque de Tabrîz et emportent de nombreux manuscrits enluminés à Istanbul, où les suivent aussi beaucoup de peintres iraniens qui préfèrent le sunnisme.

    — 1516: Le Shâh Esmâ‘îl nomme son fils aîné, le prince Tahmâsp, comme gouverneur titulaire de Hérât ; Behzâd sera le tuteur artistique du prince-héritier.

    — 1516-1517: Le sultan ottoman Sélîm Ier annexe l’empire mamloûk d’Egypte et de Syrie (qui comprend aussi les villes saintes du Hedjaz) ; les Ottomans sunnites deviennent ainsi la première puissance musulmane.

    — 1522: Shâh Esmâ‘îl rappelle son fils Tahmâsp de Hérât à Tabrîz ; le prince-héritier est peut-être accompagné par Behzâd ; le maître-peintre rejoint, en tout cas, Tabrîz à une date non déterminée ; un édit royal, rédigé pour le Shâh Esmâ‘îl par le scribe Khwândamîr de Hérât en utilisant des termes sanctifiants inspirés de Djâmî, nomme Behzâd à la tête de la guilde de tous les artistes du livre dans l’empire séfévide ; début de l’illustration collective du « Livre des rois », volume-emblème de la dynastie séfévide.

    — 1524: Mort de Shâh Esmâ‘îl ; avènement de Shâh Tahmâsp (r. 1524-1574). L’illustration collective du « Livre des rois », conseillée par Behzâd mais désormais surtout dominée par le peintre Soltân-Mohammad de Tabrîz, continue, sous Shâh Tahmâsp, pendant une décennie.

    — 1526, année-clef : Conquête de la Hongrie par le sultan ottoman Süleymân le Magnifique ; premier échec des Ottomans devant Vienne ; les archives royale de la Naqqâsh-Khâneh ou « maison des peintres », à Istanbul, enregistrent la présence de dix maîtres-peintres persans venus de Tabrîz. L’influence de la manière classique « behzâdienne » s’étend désormais jusqu’au Bosphore.

    — 1526: Bâber, prince tîmoûride de Kaboul, conquiert le sultanat de Delhi et y fonde la dynastie dite des « Grands Moghols. » Le monde islamique d’Orient se voit désormais partagé entre trois grandes puissances: les Ottomans sunnites d’Istanbul ; les Séfévides chiites à Tabrîz et à Hérât ; et les Moghols sunnites à Kaboul, Delhi et Agra. Les « guerres de religion » sunnites-chiites impliquent toutefois surtout les Séfévides d’Iran contre les Ottomans de Turquie et leurs alliés sunnites, les Ouzbeks de Bokhârâ. A Kaboul et en Inde, les Moghols, officiellement sunnites, tolèrent tant le chiisme que l’hindouisme.

    — 1526: A Hérât, d’où une nouvelle attaque ouzbèke vient d’être repoussée, visite de Shâh Tahmâsp, à qui les notables remettent un exemplaire des poèmes de Nawâ’î, illustré par l’élève resté le plus fidèle à la manière de Behzâd, Shaykh-Zâdeh.

    — 1527: Shaykh-Zâdeh renoue avec le sunnisme et rallie la cour des Ouzbeks sunnites à Bokhârâ ; l’académie de Bokhârâ perpétuera, jusqu’à la fin du XVIe siècle, le style de la peinture behzâdienne de Hérât.

    — 1530: Début du règne tourmenté, en Inde et en Afghanistan oriental, de Homâyoûn, fils de Bâber, second des « Grands Moghols. »

    — 1533: Premier « repentir » de Shâh Tahmâsp, concernant son usage du vin (« le rubis ») et du hachich (« l’émeraude »), mais son mécénat des arts n’en est pas affecté.

    — 1535: Le scribe Khwândamîr de Hérât, rédacteur de l’édit royal séfévide de 1522 nommant Behzâd à la tête de la guilde des artistes du livre, rejoint en Inde la cour (sunnite) du Grand Moghol Homâyoûn ; au cours d’une campagne dans le Goudjerate, le souverain moghol perd son exemplaire précieux des chroniques de Tamerlan, la Zafar-Nâmeh ou « Geste des victoires », illustré (au moins en partie) par Behzâd lui-même et désormais considéré comme emblème de la dynastie ; le fabuleux manuscrit behzâdien, symbole de la légitimité impériale, sera récupéré par les Moghols après leur conquête du Goudjerate en 1578.

    — 1535: Mort à Tabrîz de Kamâloddîn Behzâd

    — 1535: Le peintre Mozaffar ‘Alî, petit-neveu de Behzâd, succède à celui-ci à la tête de la guilde séfévide des artistes du livre ; Mozaffar ‘Alî fut lui-même l’un des grands illustrateurs du « Livre des rois » de Shâh Tahmâsp.

    — 1539-1543: Shâh Tahmâsp fait illustrer les « Cinq Trésors » de Nezâmî par les meilleurs peintres de son empire, dernier grand projet de l’atelier de ce souverain.

    — 1544: La chronique des arts, contenue dans la préface d’un album royal séfévide rédigée par le scribe Dôst-Mohammad de Hérât, affirme la prééminence de Behzâd.

    — 1548: Shâh Tahmâsp déplace la capitale séfévide de Tabriz à Qazwîn, pour éviter les menaces ottomanes.

    — 1549: Les peintres séfévides ‘Abd-os-Samad, Mîr Mosawwer et Mîr Sayyed ‘Alî rejoignent la cour du Grand Moghol Homâyoûn à Kaboul, où le peintre Dôst-Mohammad de Hérât les a déjà précédés ; création, à Kaboul, de l’atelier « moghol. »

    — 1552: Conquête du khânat musulman tatar de Kazan, par le tsar Ivan le Terrible. Début de l’expansion impériale russe vers le Sud, aux dépens de l’Islam d’Orient.

    — 1555-1556: Le second « repentir » de Shâh Tahmâsp n’entraîne pas plus le déclin des arts figuratifs, dans l’Empire séfévide, que le premier « repentir »; le neveu du souverain, le prince Ebrâhîm-Mîrzâ, gouverneur de Mashhad, fait illustrer, de 1556 à 1565, les sept poèmes narratifs de Djâmî, par les meilleurs peintres de l’Empire.

    — 1555: Le Grand Moghol Homâyoûn rentre de Kaboul à Delhi, accompagné par ses artistes séfévides ; installation de l’atelier « moghol » sur sol indien.

    — 1556: Avènement, en Inde, du troisième des « Grands Moghols », Akbar (r. 1556-1605) ; abolition des discriminations légales et fiscales contre la majorité hindoue de son Empire; princes et scribes hindouistes, versés dans la langue persane, sont désormais associés, à parité avec l’élite musulmane, dans l’administration de l’Empire ; essor de l’art classique moghol, avec formation de peintres hindous dans l’atelier dirigé au départ par les artistes séfévides venus avec Homâyoûn de Kaboul — et pour qui « Behzâd » demeurait la référence idéale; accueil de nombreuses influences artistiques européennes, à travers les peintures et livres illustrés de gravures apportés en cadeaux par les Jésuites portugais de Goa.

    — 1557: En Turquie, l’architecte Sinân, à Istanbul, achève la mosquée Sülemâniyeh: zénith du classicisme architectural ottoman ; les enluminures des chroniques royales ottomanes s’inspirent de celles des chroniques royales persanes.

    — 1564-1565: En Iran, le scribe séfévide Mîr Sayyed Ahmad compare Behzâd au Christ coranique qui insuffle la vie à l’oiseau: image reprise de Djâmî et de Khwândamîr, et encore répétée, en 1596, par le scribe Qâzî Ahmad de Qom.

    — 1571: La flotte ottomane défaite par les flottes de l’Espagne et de Venise à Lépante: coup d’arrêt à l’expansion ottomane vers l’ouest.

    — 1574: En Iran, mort de Shâh Tahmâsp, avènement du Shâh Esmâ‘îl

    — 1578: En Iran, avènement du Shâh Mohammad Khodâ-Bandeh.

    — 1587: En Iran, avènement du Shâh ‘Abbâs le Grand (r. 1587-1628). Celui-ci confie la garde militaire de l’oasis de Hérât, contre les Ouzbeks, aux Afghans du clan des Abdâlî, futurs fondateurs (en 1747) du royaume d’Afghanistan. Sâdeqî Beg nommé à la tête de la guilde séfévide des artistes du livre, mû par « un zèle behzâdien (hemmat-é behzâdî). Essor d’une nouvelle manière de peindre, en Iran séfévide, qui se nourrit de l’exemple behzâdien mais met désormais l’accent sur la ligne calligraphique: style associé aux noms des maîtres Sâdeqî Beg et Rezâ-yé ‘Abbâsî.

    — 1587: En Turquie, la chronique des arts par le scribe ‘Âlî Efendî confirme la prééminence du statut de Behzâd aux yeux des peintres ottomans.

    — 1596: En Iran, la chronique des arts du scribe Qâzî Ahmad de Qom confirme la prééminence du statut de Behzâd dans les traditions de l’Empire séfévide. La réputation sanctifiée de Behzâd se voit ainsi désormais consacrée d’un horizon à l’autre de l’Islam d’Orient, des rives du Bosphore à celles du Gange.

    — 1598: En Iran, Shâh ‘Abbâs déplace la capitale séfévide à Ispahan ; début des constructions de la Place Royale: zénith du classicisme architectural séfévide ; l’école figurative d’Ispahan, de 1598 jusqu’au dernier tiers du XVIIe siècle, restera dominée par la manière “calligraphique » inaugurée, à la fin du XVIe, par les maîtres Sâdeqî Beg et Rezâ-yé ‘Abbâsî.

    — 1605-1627: En Inde, règne du quatrième des « Grands Moghols », Djahân-G’îr ; zénith du classicisme pictural moghol.

    — 1622: En Iran, Shâh ‘Abbâs s’allie aux Anglais pour chasser les Portugais d’Ormuz, mais doit laisser les Anglais s’y installer à leur place ; début de la suprématie navale anglaise dans les eaux du Golfe et de l’Océan Indien.

    — 1628-1658: En Inde, règne du cinquième des « Grands Moghols », Shâh-Djahân ; le Tâdj-Mahall d’Agra, zénith du classicisme architectural moghol.

    — 1638: Conquête définitive de Baghdâd par les Ottomans, aux dépens des Séfévides ; l’Irak conserve cependant une population à majorité chiite, surtout dans le Sud.

    — 1658: En Inde, avènement du sixième des « Grands Moghols », Aurang-Zêb, à l’issue d’une guerre de succession ; celui-ci affirme le retour à la plus stricte orthodoxie islamique, rétablit les mesures discriminatoires contre ses sujets hindous, provoque leurs révoltes et affaiblit l’empire.

    — 1669: En Inde, Aurang-Zêb ordonne la destruction de temples hindous et de leurs « idoles » à travers l’Empire moghol: date probable de la mutilation des deux statues du Bouddha à Bâmiyân, en Afghanistan oriental alors sous domination moghole. L’empereur Aurang-Zêb ne consacrant plus l’essentiel de ses ressources qu’à la guerre contre ses rivaux musulmans ou les insurgés hindous, les peintres moghols cherchent de nouveaux mécènes dans les cours provinciales de l’Inde, tant musulmanes qu’hindouistes ; déclin à Delhi de la peinture figurative moghole, qu’Aurang-Zêb, pourtant d’une si rigoureuse orthodoxie, n’interdit cependant pas en tant que telle (il fait peindre les portraits de sa propre personne et des officiers de sa cour).

    — 1669: Les Turcs arrachent la Crète à Venise, dernière percée ottomane vers l’ouest.

    — 1683: Second échec des Turcs ottomans devant Vienne.

    — 1699: En Turquie, le traité de Carlowitz consacre le recul définitif des Ottomans en Europe et leur évacuation de la Hongrie, face aux Autrichiens. Au XVIIIe siècle, les influences artistiques du baroque et du rococo autrichien et italien remplacent rapidement, à Istanbul, le classicisme architectural hérité de Sinân, puis le classicisme pictural inspiré de la tradition behzâdienne.

    — 1707: En Inde, mort du dernier des « Grands Moghols », Aurangzêb ; l’empire se désintègre en principautés rivales, hindouistes et musulmanes, en attendant la suprématie anglaise en Inde, affirmée, contre les tentatives rivales françaises, dès 1757.

    — 1722: En Iran, sac d’Ispahan par les Afghans sunnites révoltés. Effondrement de l’Empire séfévide. L’expansion russe atteint le Caucase. Désintégration de la tradition esthétique séfévide, déjà lourdement affectée, depuis la fin du XVIIe siècle, par l’introduction à Ispahan de la technique européenne de la peinture à l’huile.
    Texte de Michael Barry

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