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Maison du Temple et commanderie de l'Hôpital Le Déluge

Département: Essonne, Arrondissement: Palaiseau, Canton: Longjumeau, Commune: Marcoussis - 91

Maison du Temple Le Déluge
Maison du Temple Le Déluge

On ne connaît pas l'origine de ce domaine ; il est néanmoins certain qu'il eut de bonne heure des seigneurs particuliers qui, sans doute, comme ceux du voisinage, relevaient de la châtellenie de Montlhéry.

On cite un Joannes de Dilugio, qui vivait on 1244 ; un Gaufridus de Diluvio, qui fondait au XIIIe siècle son anniversaire au prieuré de Saint-Eloi, à Paris (1). L'étymologie du nom de ce lieu, est aussi obscur que celle de ses commencements ; cependant il se pourrait que ce nom de Déluge lui ait été donné à cause de l'aspect que présentait, du haut de la colline où il est placé, le fond de la vallée, souvent envahi par les eaux à l'époque de la saison des pluies. En effet, la vallée qu'il domine est arrosée par « un ruisseau ou petite rivière qui, grossie par une infinité de sources qu'elle rencontre en son chemin, et par beaucoup de torrents qui tombent des collines opposées dans la plaine, ont fait venir la pensée, pour éviter le Déluge, d'y construire des étangs (2). »
1. L'abbé Lebeuf, tome IX, page 288.
2. L'Anastase, page 10.


Il est probable qu'un des anciens seigneurs du Déluge l'abandonna aux Templiers ; il fut alors démembré de la paroisse de Marcoussis, dont il dépendait, et il compta au nombre des commanderies de l'ordre jusqu'en 1311, époque à laquelle il passa entre les mains des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem.

Les Templiers y entretenaient un maire ou major, principal officier de l'ordre, auquel on assignait ce domaine pour retraite. Il y vivait avec quelques frères servants des revenus de la terre et des dîmes ou cens qu'il percevait à Montlhéry, à Châtres, à Linas, à Savigny et dans les campagnes voisines. Mais les droits féodaux s'enchevêtraient tellement alors les uns dans les autres, qu'ils ne pouvaient guère être exercés sans quelque contestation ; c'est ainsi qu'en 1232 il était intervenu par-devant l'évêque de Paris, entre le maire du Déluge et le chapelain du Plessis-lès-Bruyères (le Plessis Saint-Thomas) un arrangement relativement aux dîmes de Briis-lès-Forges, auxquelles chacun d'eux prétendait.

Ce sont les Templiers qui élevèrent la chapelle qui sert aujourd'hui de grange à la ferme ; elle porte en effet sur son portail à plein cintre, orné de rinceaux chevronnés et de dents de scie, le cachet du XIIe siècle.
— Vous pouvez aller sur le site de l'association de Marcoussis pour d'autres renseignements.
Marcoussis

Sa construction était d'ailleurs des plus simples ; elle forme une seule nef, sans bas-côtés, éclairée par des fenêtres longues et étroites, également à plein cintre, et dont on devine encore aujourd'hui l'emplacement sous le plâtre qui les aveugle. Le principal corps de logis, le château, comme il est dit dans les titres, était à l'est, un peu en arrière de la chapelle de la commanderie. Il paraît avoir été composé d'un gros bâtiment carré, aux murs très-épais, auquel était, sans doute, accolée une tour d'escalier. Dans la cour de la ferme se trouvaient, comme aujourd'hui, des granges, des celliers, et un corps de logis, soutenu au dehors par de lourds contreforts dont quelques-uns subsistent encore.

C'est là qu'habitaient les frères servants, le receveur de la terre, le gardien des bois et les gens subalternes du majorat. L'enclos avait bien moins d'étendue que de nos jours, et à gauche de la porte d'entrée, entre le chemin de Janvry et celui de Marcoussis, une croix qui s'élevait au milieu d'un petit espace fermé de murs indiquait le cimetière de la petite communauté, quelques privilégiés ayant seuls le droit d'être inhumés dans la chapelle.

On ne sait rien de l'organisation intérieure de chacune des commanderies du Temple, ni de ses rapports réguliers avec la maison principale chef d'ordre ; les pièces que l'on retrouve aux archives se taisent sur ce que nous appellerons la géographie de l'ordre du Temple, sur la distribution et l'étendue des domaines des Templiers en France, et sur leur administration intérieure ; il y aurait à ce propos un important travail à faire.

Lorsque après la catastrophe de Jacques Molay, l'ordre du Temple eut été supprimé (1312) et que leurs biens-fonds eurent été attribués aux Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, la commanderie du Déluge passa entre les mains de ces derniers et devint un domaine rural que l'on assigna pour retraite à quelque chevalier ayant bien mérité de l'ordre. Il administrait le domaine, percevait les cens, les dîmes, les revenus, et chaque année rendait ses comptes au grand prieur ou au visiteur provincial chargé de les recevoir.

Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem
Une partie des revenus lui était attribuée pour sa subsistance, celle des frères et des serviteurs qu'il avait près de lui, l'autre était versée dans le trésor de l'ordre. Le commandeur du Déluge ne pouvait vendre ni aliéner aucune partie de son domaine sans l'assentiment du conseil de l'ordre. Il devait compte de ses actes au visiteur et au grand prieur, et à certains jours de l'année il devait se rendre à Paris, au siège de l'ordre, dans la commanderie de Saint-Jean de Jérusalem, plus tard dite de Latran (dès 1474), pour y assister aux synodes ou assemblées générales des principaux officiers de l'ordre.

Comme les chevaliers de Saint-Jean, qui plus tard devinrent les chevaliers de Rhodes, puis de Malte, portaient sur leur armure une tunique rouge, les paysans de la vallée de Marcoussis désignèrent longtemps ceux qui habitaient la commanderie du Déluge sous le nom de moines rouges, par opposition aux moines blancs, qui étaient les Célestins.

Les Terriers, censiers ou cueilloirs (livres de recettes) de la commanderie du Déluge, qui sont aujourd'hui conservés aux Archives de l'Empire, montrent que cette commanderie possédait des biens ou percevait des rentes et des droits dans les environs, et que les revenus de ce domaine devaient être considérables pour l'époque. Au moment de la Révolution, ils étaient encore de plus de 1,500 livres, pour la part seule du commandeur (3).
3. Ce qui a été sauvé de la destruction des archives de l'ordre du Temple et de celles des Hospitaliers de Saint-Jean remplit aujourd'hui de nombreux cartons aux Archives de l'Empire ; mais elles sont mêlées, confondues les unes avec les autres. Il serait important de les classer, il en résulterait beaucoup de lumières sur l'histoire des deux ordres, et sur la topographie des commanderies et de leurs censives dans l'île de France, du XIIe au XVIe siècle.

En ce qui concerne le Déluge, voici les indications que nous trouvons au tome II de la nouvelle édition de l'Histoire du diocèse de Paris, par l'abbé Lebeuf, donnée par M. H. Cocheris (4).
4. Section administrative, lettre S.
5125. Baux et pièces relatives à la Commanderie du Déluge.
5126. Un Cueilloir du Déluge et de Bruyères le Châtel.
5130. Terrier de la Commanderie du Chauffour et du Déluge.
5146 a 5149. Censier et Cueilloir du Déluge et de Linas. 4 volumes in-folio.
5668 à 5674. Terrier du Déluge, en 1554, 1565, 1610, 1657, 1691, 1747, et 1775. 7 volumes in-folio.
5675 à 5676. Terrier du Déluge et dépendances, en 1776. 2 volumes.
5116 a 5130. Dans les cartons des pièces réservées, on retrouve de fort anciens titres de propriété du Déluge, des XIIe et XIIIe siècles.


Le Terrier de 1554 fut fait à la requête de religieuse personne frère de Lafontaine, chevalier de Saint-Jean de Latran, commandeur de la commanderie de Chantereine en Brabant et de Saint-Jean de Latran à Paris ; il est en très-mauvais état et tombe en poussière de vétusté.

Le Terrier de 1657 fut fait à la requête de Jacques de la Motte Houdancourt, chevalier de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, commandeur de la commanderie du Déluge, membre dépendant de celle de Saint-Jean de Latran ; ce Terrier contient quatre cent trente-sept déclarations.

Le Terrier de 1691 fut fait à la requête de frère Eustache de Bernard d'Avernes, chevalier de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, procureur et receveur général dudit ordre, commandeur de Saint-Rambourg et de Moisy, Fontaine-sous-Montdidier, et du Déluge, parce que « quelques-uns des tenanciers de la commanderie lui refusaient de payer les cens, dixmes, coutumes, rentes et droits qu'il avait sur plusieurs maisons, vignes, manoirs, masures, bois, buissons, prés, terres labourables et non labourables et autres héritages, détenus par plusieurs particuliers, tant ecclésiastiques, nobles que autres, comme faisant partie de la dite commanderie, sous prétexte que depuis 1664 il n'avait été fait aucun Terrier de la dite commanderie du Déluge. »

A la fin de ce Terrier on lit la mention suivante : « Rapporté comme bon et valable au chapitre provincial tenu le 22 juin 1721 au Temple, et déposé aux archives de l'ordre. »
Le double en fut confié à Claude Machelard, fermier de la recette des droits, cens, etc., etc., etc., de la commanderie du Déluge.

Le Terrier de 1747 a été fait à la requête de frère Jean du Merle de Blancbuisson, chevalier de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, commandeur de la commanderie du grand et du petit Déluge, membre dépendant de la commanderie de Saint-Jean de Latran, parce qu'il craignait que les droits de la commanderie souffrissent du dépérissement, et que ceux qui en détenaient les biens refusassent d'en faire aveu.

Le mesurage du domaine fut fait les 14 avril 1747 et jours suivants par Denis Bataille, arpenteur royal. Il est curieux de voir quel était alors l'état des lieux au Déluge ; nous citons donc, d'après le procès-verbal d'arpentage :
1° Une chapelle et maison seigneuriale, principal manoir de la commanderie, haute cour devant, dans laquelle est la chambre du jardinier et garde, écurie attenant, une laiterie nouvellement construite à neuf, poulailler, jardin derrière, dans lequel il y a arbres nains fruitiers, petit canal au bout dudit jardin, au levant ; lieux d'aisances ; au couchant, une cave trouvée et découverte par ledit sieur Chevalier de Blancbuisson en 1733.
La quelle maison a sa principale entrée d'une grande porte cochère au levant. Ladite haute cour ayant communication dans la basse-cour par une petite vers le nord, dans laquelle basse-cour est la maison du fermier bien logeable, écurie, étable, poulailler et un petit jardin au levant ; vers le couchant, tenant à ladite maison du fermier, est un autre petit jardin ; en retour est la grange au bled, toit à porc, ensuite une bergerie, la principale porte entre ; au retour de ladite bergerie est une moutonnerie et une grange à avoine ; lesquels logements et bâtiments sont couverts de tuile, le tout clos de murs.

Derrière lesdits lieux est une garenne dans laquelle il y a arbres fruitiers à la quantité de soixante et quatorze, à haute tige et plein vent, laquelle garenne tenant au nord en hache aux murs de closture des lieux sus désignez, l'autre côté et les deux bouts sont environnez de fossés.
Autour de ladite maison seigneuriale et commanderie du Déluge est une pièce de bois taillis comprenant quatorze coupes, contenant 63 arpents, 91 perches, 221 pieds d'une perche, y compris ladite commanderie, ferme, cours, jardins que dessus, pasture, vieille futaye, tenant le total, d'un côté au septentrion à M. de la Cossière, seigneur de la Roue, au lieu de M. de Marivaux, d'autre côté et d'un bout en plusieurs haches aux terres de ladite commanderie, et d'autre, vers l'orient, aux bois de réserve.

Suit le détail des terres de la commanderie en 17 articles, le tout présentant un total de 574 arpents, 46 perches.

Suivent en outre trois cent cinquante-trois déclarations, aveux et dénombrements de ce que doivent et détiennent les possesseurs de terre en la censive de la commanderie à Savigny ou Grandvaux, Arpajon, Montlhéry, Marivaux, Ollainville, Longjumeau, Gravigny, Cbevanville, Linois ou Linas.

On voit par ce Terrier qu'il y avait un grand et un petit Déluge. Le grand Déluge n'était autre que la commanderie telle que nous venons de la décrire, le petit Déluge n'était autre que le fief de Baudreville, situé sur le territoire de la paroisse de Gometz-la-Ville (5).
5. C'est aujourd'hui un hameau et une ferme situé à 1,200 mètres au nord-ouest de Gometz-la-Ville.

Ce même Terrier nous apprend qu'à cette époque Marivaux, qui releva successivement de Montlhéry et de Marcoussis, dépendait au XVIIIe siècle de la commanderie du Déluge. Voici un extrait de l'aveu de 1738 qui fera connaître l'importance de ce domaine : « Le 5 février 1738, Louis Martin, seigneur du fief, terre et seigneurie de Marivaux, situé en la paroisse de Janvry, châtellenie de Montlhéry, fut introduit par François Sansfaçon, domestique du commandeur du Merle de Blancbuisson, dans la salle principale de la commanderie du Déluge, et s'étant le dit sieur Martin mis en devoir de vassal, un genou en terre, nue teste, sans épée ni éperon, a dit et déclaré au dit seigneur, commandeur, qu'il lui porte et fait foy et hommage à cause du fief de Marivaux, mouvant de luy et appartenant au dit sieur Martin et à ses frère et sœur, le dit fief relevant en plein fief de la Terre, Seigneurie et Commanderie du Déluge, consistant en un grand corps de logis couvert de tuiles, appliqué en une salle basse, chambres bautes, cabinets et autres édifices, cour haute et basse, deux autres corps de logis, colombier à pied, granges, écuries, bergeries, étables, cellier, cour et jardin ; le tout clos de mur. Un grand clos planté en arbres fruitiers, clos de fossés et haies vives, avec une avenue devant la porte du dit logis seigneurial, contenant le tout 16 arpents ou environ, à la grande mesure. »

Ce Louis Martin avait fait bâtir une chapelle dans l'intérieur de la cour principale ; c'est lui qui fit clore de murs le grand clos voisin de la propriété ; après sa mort, sa veuve vendit la terre de Marivaux à « André Haudry de Soucy, écuyer, conseiller-secrétaire du Roi, maison et couronne de France et de ses finances, l'un des fermiers généraux de Sa Majesté, seigneur chastelain de Soucy et autres lieux, » et c'est en cette qualité de nouveau seigneur de Marivaux qu'il rendit foi et hommage au commandeur de Blancbuisson, le 18 avril 1749.

Un nouveau Terrier de la commanderie du Déluge fut dressé en 1775 à la requête du dernier des commandeurs de cette terre : « Religieux frère Edmond Huet, chevavalier, magistral de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, commandeur de la commanderie du Bourgout et de celle du Déluge, membre concédé de celle de Saint-Jean de Latran, grand bailliage de la Morée, à cause de sa dite commanderie du Déluge, seigneur patron de la paroisse du même nom, présentateur et collateur du dit lieu, seigneur haut, bas et moyen justicier de Linas, avec la dame veuve de la Cossiere (la dame de la Roue), et le chapitre Saint-Merry du dit Linas, auquel lieu ils ont en commun les droits d'Etalonnage des mesures, tant à bled qu'à vin, et ceux de Rouage, Forage et autres ; le tout suivant le contrat d'acquisition de la dite seigneurie faite par frère Jean Bonnet, trésorier de la maison de l'hôpital Saint-Jean de Jérusalem ; de messire Jean de Soisy, chevalier sire de Brunay, au mois d'avril 1303, dûment amortie par Philippe IV dit le Bel, et suivant nombre d'autres titres des années 1299, 1364, 1394, 1396, 1397, 1527, 1528, 1603, 1623, 1635, faisant les n° 1, 2, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 17, 18, 19, 21, 23, 26 et 28 de la Liasse 92 de l'inventaire général de titres de la commanderie de Saint-Jean de Latran. Et encore le dit religieux frère Edmond Huet, à cause de sa dite commanderie du Déluge, seigneur de différents fiefs et seigneuries, situés à Chevanville paroisse de Marcoussis, Marivaux paroisse de Janvry, Ollainville paroisse de Bruyères-le-Châtel, Bellejambe et la Flotte paroisse de Linas, Grandvaux paroisse de Savigny-sur-Orge, Longjumeau, Montlhéry, Arpajon, Baudreville, dit le petit Déluge, paroisse de Gometz-la-Ville et autres lieux (6). »
6. Terrier de 1775, aux Archives de l'Empire.

Nous n'avons cité ce long préambule que pour faire voir quelle était encore l'importance de la commanderie du Déluge au moment de la Révolution.
Il existe aux Archives de l'Empire, section des plans, un plan de la censive du Déluge dans la paroisse de Linas ; il montre que toute la partie de ce bourg comprise entre la tour de Montlhéry, la route d'Orléans et la rivière de Salmouille dépendait, en censive, de la commanderie.

Parmi les feudataires du Déluge à cette époque (1775), il ne faut pas omettre Maximilien, Mériadec de Rohan, archevêque de Bordeaux, grand prévôt de Strasbourg et seigneur d'Ollainville ; il devait aveu, foi et hommage au commandeur pour le domaine dit de Bizon, comprenant 180 arpents de terres et bois et 3 arpents de prés enclavés dans son parc d'Ollainville, dont ils faisaient la majeure partie.

En 1776, le commandeur Huet fit faire deux nouvelles copies du Terrier de 1775 ; elles sont toutes les deux aux Archives de l'Empire. Voici le relevé détaillé des articles qui composaient le domaine même du Déluge :
Le chef-lieu, comprenant le château et les bâtiments adjacents, fermes, coins, jardins. 2 arpents, 34 perches, 15 pieds, 8 pouces.
Terres labourables. 424 arpents, 28 perches, 19 pieds, 9 pouces.
Prés. 17 arpents, 88 perches, 5 pieds, 10 pouces.
Bois. 146 arpents, 6 perches, 11 pieds, 7 pouces.
Friches. 4 arpents, 21 perches, 8 pieds, 5 pouces.
Total: 594 arpents, 80 perches, (3) c'est le chiffre écrit sur le document, si on additionne on trouve 88 pieds, (3) ibidem 39 pouces.

En même temps qu'il avait fait faire le Terrier, le commandeur Huet avait fait procéder à un nouveau bornage des terres du Déluge, à cause des contestations qui s'élevaient continuellement entre ses receveurs et ceux des châtellenies de Marcoussis et de Bruyères-le-Châtel. Ce bornage est encore, en partie, celui de la propriété actuelle. Au mois d'octobre 1790, le commandeur Huet était encore au Déluge, car il y signa le bail de la ferme, qu'il concédait pour neuf années à Claude Paupe, moyennant la somme de 2,800 livres par année.
La ferme comprenait alors, en outre des bâtiments d'exploration, 193 arpents 73 perches de terre labourable, et 77 perches de prés.

Ce sont les commandeurs de Saint-Jean qui firent construire la sacristie au nord du chœur de l'ancienne chapelle des Templiers, et plus tard, lorsque le zèle religieux se fut refroidi, que la commanderie du Déluge ne fut plus qu'un domaine rural, cette sacristie servit de chapelle. C'est du moins ce que rapporte l'abbé Lebeuf : « La chapelle, qui étoit grande, sert aujourd'hui de grange, et l'on n'a réservé que la sacristie pour servir de chapelle, où l'on célèbre les dimanches et fêtes. On y voit encore une tombe, sur laquelle on croit apercevoir le nom de Rogerius, en gothique (7). »
7. L'abbé Lebeuf, tome IX, page 289.

Aujourd'hui le domaine du Déluge, composé d'une maison d'habitation, avec jardins et petit parc, d'une ferme, de terres labourables et de bois, forme une des plus importantes propriétés de la commune de Marcoussis, et appartient à M. E. Héluis. L'ancien château a été démoli pour faire place à une belle habitation moderne, mieux appropriée aux habitudes de notre époque. Aux jardins on a joint le petit bois qui, vers le sud, avoisinait la propriété, et la vieille chapelle sert toujours de grange. L'artiste et l'archéologue s'arrêtent encore pour admirer son portail du XIIe siècle.
L'ancienne sacristie sert de remise, mais elle conserve encore ses voûtes à ogives et ses grandes fenêtres à meneaux trilobés, et, si l'on n'y retrouve plus la pierre tumulaire dont parlait l'abbé Lebeuf au siècle dernier, du moins il en existe deux autres : l'une, de 2 mètres environ de hauteur, sur 1 mètre de largeur, représente un personnage civil du XIIe ou du XIIIe siècle, sans barbe, les cheveux longs, couvert d'un manteau à capuchon, et coiffé d'un chaperon ; il est figuré les mains jointes. L'inscription qui entoure l'arcade ogivale qu'il occupe, est incomplète et ne permet de lire à sa gauche que ces mots : M.LEHERI SCRIPTORIS, et à sa droite : DVMEIS..., en caractères gothiques, avec une date fruste ; c'était, sans doute, la tombe de quelque greffier de la châtellenie de Montlhéry. L'autre pierre est un fragment de 75 centimètres de longueur sur 62 de largeur ; c'est la partie inférieure d'une pierre tumulaire dont le champ ne présente plus aucune trace de gravure, mais sur les trois côtés de laquelle on lit, en belles capitales gothiques du XIIe siècle : FRATRI.... MITES ET AMICI, que l'on peut interpréter :
Au frère N. ses compagnons et ses amis.

Mais l'objet le plus remarquable, souvenir de l'ancienne commanderie, qui mérite l'attention des archéologues et des sigillographies, est sans contredit le sceau retrouvé en 1858, par M. E. Héluis, au milieu de menus débris de construction enfouis en terre, dans la partie de l'ancienne commanderie, aujourd'hui convertie en potager.

Ce sceau, qui, sans doute, est celui de l'un des anciens commandeurs du Temple, est très-bien conservé ; il a 4 centimètres de longueur sur 3 1/2 de largeur ; sa forme est ogivo-elliptique ; il est en cuivre, le revers est très fruste, et à la tête on reconnaît encore l'amorce de l'anneau en cuivre qui le rattachait à la chaîne destinée à le porter. Il représente une main droite tenant une tige terminée en haut et en bas par deux fleurs de lis, qui s'opposent l'une à l'autre ; sur les rameaux de cette tige reposent deux colombes se faisant face, et autour du champ, on lit l'inscription suivante :
† S.FRATRIS. NICOL.-AI. DE AV DELVGIA

Sceau du Frère Nicolas

Sceau du Frère Nicolas, doyen au Déluge
Sceau du Frère Nicolas, doyen au Déluge

Peut-être faut-il interpréter le DE par DECANI ; on aurait alors pour la traduction :
† Sceau du Frère Nicolas, doyen au Déluge.

Ce sceau nous paraît remonter au XIIe ou au XIIIe siècle. C'est une pièce unique, et, à cause de cela, précieuse pour la sigillographie historique.
Une empreinte en a été communiquée à la Société des antiquaires de France par M. H. Cocheris, dans la séance du 23 novembre 1865 ; cette savante compagnie l'a jugée digne d'être gravée dans son Bulletin, et c'est avec son autorisation que nous la reproduisons ici, en remerciant M. E. Héllus d'avoir bien voulu mettre l'original à notre disposition pour le communiquer à M. H. Cocheris.

Les bois du Déluge, qui sont d'ailleurs toujours très-bien entretenus, offrent aux promeneurs d'agréables promenades. A l'extrémité du domaine, vers le nord-est, on a élevé un petit pavillon rustique, d'où l'on jouit d'une vue étendue sur la vallée, sur Montlbéry et sa vieille tour, et d'où le coup d'œil va se perdre sur les coteaux de la Seine et les derniers horizons de la forêt de Sénart.
Sources: Malte-Brun, Victor-Adolphe. Histoire de Marcoussis, de ses seigneurs et son monastère, page 300. Paris 1867.
Bnf

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