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Les Assises de Jérusalem

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Assises de Jérusalem

Les assises, telles qu'elles ont été publiéespar la Thaumassière, conjointement avec les coutumes de Bauvoisis et plus au long par Canciani, sont une compilation faite par l'ordre de Jean d'Ibelin, comte de Joppé et d'Ascalon, seigneur de Beyrouth et de Ramla, qui mourut en 1266 ; la compilation fut achevée en 1369.
Seize commissaires, choisis par les états de l'île de Chypre, scellèrent l'ouvrage de leur sceau, et, le 3 novembre 1369, il fut déposé dans l'église de Nicosie.

« Les assises sont divisées en plusieurs parties principales. Nous les classerons nous-mêmes en trois divisions : l'une destinée aux dignités du royaume, l'autre aux cours des barons et des bourgeois, la troisième enfin aux services militaires dus par les barons et les chevaliers à la sainte cité. »

I — Les dignités du royaume
Le roi était le premier dignitaire, le chef suprême de la hiérarchie féodale ; on admettait qu'il ne tenait son royaume de personne for Dieu : on ne devait examiner qu'une chose, s'il était droit heir du royaume Après cette reconnaissance, le patriarche annonçait l'avènement aux seignours, preslats, maistres, barons, chevaliers et bourgeois ; le roi se rendait au Saint-Sépulcre : là il offrait sa couronne, comme la femme qui avait son enfant masle allait l'offrir au temple ; les bourgeois devaient le servir à table le jour du couronnement ; les barons et les chevaliers lui prêtaient serment de fidélité, et lui devaient hommage de leurs fiefs ; quant à lui, il ne devait hommage à personne, car il ne tenait son royal fief d'aucun barons C'était le roi qui commandait l'armée féodale, qui présidait à la justice, à l'administration du royaume.

Au-dessous de lui, et dans la hiérarchie de sa maison, étaient quatre grands dignitaires : Le sénéchal, le connétable, le maréchal, le chambellan.

— Le sénéchal exerçait la justice royale ; il était aidé dans ses fonctions par des baillis ou écrivains du roi ; le sénéchal présidait aux finances, à la vente des possessions royales ; à l'exact acquittement des services dus en argent ; après une bataille, c'était lui qui veillait à ce que la part du monarque lui fût réservée ; il conservait le trésor, payait les chevaliers, les sergents et les écuyers d'armes.

— Le connétable présidait à la guerre ; il doit ordonner bataille, et aux gens d'armes de chevaucher et de retourner par le commandement du roi ; il pouvait avoir dix chevaliers en sa compagnie, il les choisissait, pourvu que ses choix ne portassent pas sur les hommes de l'hôtel du roi ; il était le chevetain de l'armée, il y commandait aux barons et aux chevaliers pendant l'expédition militaire : il présidait à toutes les querelles qui s'élevaient entre les gens de guerre, il assistait aux combats singuliers, il en réglait l'ordonnance et la loi.

— Le maréchal commandait sous les ordres du connétable, auquel il devait hommage de son office ; il remplaçait celui-ci dans toutes les circonstances où il ne se trouvait pas présent dans le camp ou à l'armée ; le maréchal avait quelque fois un petit corps de troupe sous ses ordres.

— Le chambellan servait le corps du roi ; il devait lui présenter « sa coupe, et quand le roi aura mangié, il doit aller avec les autres officiers mangier, et la coupe avec quoi il aura servi le roi doit tenir devant sa table aux quatre grandes fêtes de l'année ; » le chambellan devait hommage au roi, et il profitait de tous les présents de ceux qui faisaient eux-mêmes hommage au suzerain.
Nous devons faire remarquer que les mêmes fonctions étaient confiées aux grands officiers du palais dans notre ancienne monarchie.

II. — Des barons et des bourgeois
— La cour des barons était présidée par le roi, et, en son absence, par les quatre premiers barons : le prince de Galilée, le seigneur de Césarée et de Sidon, les comtes de Joppé et de Tripoli ; quelque fois par le connétable et par le maréchal du royaume. Tous les barons, c'est-à-dire tous ceux dont les fiefs relevaient immédiatement de la couronne, étaient juges et pairs de la cour, de la même manière que les arrière-neveux étaient juges-pairs de la cour particulière de leur baron.
« A cette cour suprême ressortissaient toutes les affaires féodales les plus importantes dans un royaume fondé par la conquête et établi sur des institutions en rapport avec la hiérarchie territoriale. »

Résumons à cet égard les principes :
1° Le seigneur pouvait donner son fief à l'Eglise, à un monastère ou à des laïques ; ses héritiers devaient respecter sa volonté, car le Seigneur, comme le roi, ne tenait sa seigneurie d'aucun autre, for Dieu.

2° En retour, le feudataire devait service de son corps et de ses hommes au baron, et, quand il ne pouvait le suivre à la guerre, soit par infirmité, soit parce qu'il appartenait à l'Eglise, il devait dire : « Je veux bien que mes gens vous aident. »

3° Le fief appartenait toujours à l'aîné mâle de la ligne qui l'avait possédé dans l'origine ; au cas du refus de l'aîné, tous les autres enfants venaient à la succession par têtes, et alors ils étaient divisément tenus envers le baron du service personnel et du devoir du vasselage ; le seigneur devait les mettre en tenure sans plaids ni contestations ; c'était une sorte d'exception à ce principe que deux hommes ne pouvaient être tenus pour le même fief au baron.

4. Le baron rentrait dans le fief aliéné toutes les fois que le feudataire ne remplissait pas les conditions du contrat, c'est-à-dire la promesse de foi, l'hommage et l'exécution des services militaires ; enfin, à défaut d'héritier du feudataire, lorsque celui-ci laissait un enfant en bas âge, le baron avait sur lui le droit de garde féodale, sorte de tutelle militaire qui donnait au baron le droit de percevoir à son profit les revenus du fief, à la charge de le défendre. Quand l'enfant avait quinze ans, il devait se présenter au baron et lui dire : J'ai quinze ans d'âge complets ; et celui-ci devait alors lui donner l'investiture.
Quant à damoiselle, il était us longuement qu'à douze ans, elle pourrait reguerre son fief, pourvu qu'elle prît mari qui pût la défendre ; de venue veuve, à soixante ans seulement elle était dispensée de prendre mari.

5° Les barons hauts justiciers du royaume devaient être sages, loyaux et bons justiciers ; les plaideurs devaient avoir l'esprit sain, etc. La preuve d'un fait pouvait être respectivement faite par le demandeur et le défendeur ; et lorsqu'il s'agissait de la perte d'un membre, de la vie ou de l'honneur, ou d'une demande civile dont la valeur excédait un marc d'argent, on demandait le combat.

6° L'appel d'un tribunal inférieur à un tribunal supérieur était inconnu ; le demandeur ou le défendeur pouvaient seulement fausser la cour, c'est-à-dire accuser les juges de n'avoir ni cette indépendance d'opinion, ni cette conscience droite, première garantie des jugements équitables. Une condition sévère était alors imposée à celui qui faussait la cour : il devait combattre en champ clos, et vaincre, les uns après les autres et dans une seule journée, ses juges naturels, même ceux qui n'avaient point été présents au jugement ; car c'était une insulte envers la cour tout entière.

III. — Service militaire des fiefs
— L'obligation du service militaire étant une des conditions principales de la possession des fiefs, chaque baronnie du royaume de Jérusalem était soumise à un service d'hommes, fixé de la manière suivante par les assises :

Les baronnies de Joppé, d'Ascalon, Ramla, Ibelin et Mirbel réunies, devaient 500 chevaliers.
La baronnie de Galilée doit 500 chevaliers.
La partie en deçà du Jourdain, 60.
Et la terre au-delà, 40.
La baronnie de Saiette, de Montfort et Césarée doit 500 chevaliers ; et ses dépendances, savoir : Saiette et Montfort, 60 chevaliers ; Césarée, 25.
La seigneurie du Crac, du Mont-Réal et de Saint-Abraham doit 60 chevaliers.
Le Crac en particulier 40, et Mont Réal, 20.
La seigneurie du comte Josselin doit 50 chevaliers.
La sainte cité de Jérusalem doit 328 chevaliers.
Naplouse doit 328 chevaliers.
La baronnie d'Acre doit 329 chevaliers ; la cité, en particulier, 72.
La seigneurie d'Arsur doit 330 chevaliers, et la cité, en particulier, 25.
La seigneurie du Darou doit 220 chevaliers, et la cité, en particulier, 2.
La seigneurie de Baruch doit 21 chevaliers.

— Les assises s'expriment ensuite en ces termes :
331 chevaliers sont les aides que les églises et les bourgeois doivent quand il y a grand besoin en la terre du royaume de Jérusalem.
Et ensuite le patriarche de Jérusalem doit 500 sergents.
Le chapitre du Sépulcre, 500.
Josaphat, 150.
Montelivette, 150.
Templum Domini, 150.
L'église latine, 50.
L'évêque de Tabarie, 500.
La cité d'Acre, 500.
La cité d'Arsur, 100.
La cité de Jérusalem, 500.
L'abbé de Montalabon, 500.
La cité de Naplouse, 300.
La cité de Césarée, 50.
L'évêque de Belesme, 200.
Ramla, Ibelin et Mirbel, 150.
L'évêque de Saint Georges, 200.
D'Arsur, 50.
De Sabalt, 50.
D'Acre, 550.
De Saint-Abraham, 50.
L'archevêque de Césarée, 50.
D'Ascalon, 100.
Caiphas, 175.
Tabarie, 200.
— Total des sergents, 5,075.

Par l'aspect de ce tableau, joint aux assises de Jérusalem, on peut se faire une idée des forces militaires que le royaume pouvait convoquer dans ses jours de danger. Guillaume de Tyr a donné, dans son Livre, une sorte de précis des moyens employés pour la levée des deniers. La comparaison de ces deux monuments est extrêmement précieuse pour l'histoire des colonies chrétiennes d'Orient.
Sources : Delaville, Félix. Histoire des croisades. Limoges 1859. BNF

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