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Études réalisées sur les Templiers

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L'Epinat, Vestiges d'une Commanderie de Templiers


Commanderie de l'Epinat

L'Epinat est cadastré, sur le territoire communal de Barrou, Section E, n° 801 ; il est situé à 4 km au Sud-Est du Grand-Pressigny, 2,5 km du Nord-Est de la Guerche, et 3,5 km au Nord de Barrou. Il y subsiste d'importants vestiges d'une chapelle du XIIe siècle, qui fut celle d'une commanderie de Templiers (1).

Notes d'Histoire
Les premières mentions sont du XIIe siècle : « Domus de Lespinaz, Domus militiae Templi de Spinaceto. »
— En 1213, la forêt de l'Espinat, de la paroisse de Barrou, appartenait à Geoffroy IV, Vicomte de Châteaudun, qui autorisa les religieuses de Rives à y faire paître leurs troupeaux (2).
— En 1267, il est question de l'Hospital de l'Espinacerie dans la charte de la Merci-Dieu, intitulée comme suit : Chartre de Jeanne, dame d'Estableau, qui, du consentement de Regnaud, Chevalier, Seigneur d'Estableau, son mari, donne à l'Abbaye et aux religieux de la Merci-Dieu, soixante arpents de landes, situés entre la maison de l'Hôpital appelé l'Espinacerie, et la Rivière de la Glaise,
— DATUM ANNO DOMINI MCCLXVII MENSE MAIO (3).

— Le 2 septembre 1288, une lettre est écrite par François de Bor, Commandeur d'Auvergne à cette époque, à Jean le Berruyer qui était alors titulaire de la Commanderie de l'Epinat.

Elle passa aux chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, au commencement du XIVe, après la dissolution de l'Ordre du Temple d'où le nouveau nom de Saint-Jean de l'Epinat.
Elle devint ensuite Commanderie de Malte, de la Langue française, du Grand Prieuré d'Aquitaine.
Pour Dufour, elle fut réunie à celle de Brizay, pour Carré de Busserolle à celle de Blison en Brenne au XVIIe siècle (4).
Les Commandeurs de l'Epinat possédaient dans la ville de la Haye un hôtel appelé : « La Commanderie », et qui était situé derrière l'église de la Madeleine.
— En 1663 et 1664, d'après les registres paroissiaux (5) eurent lieu deux mariages dans la chapelle de « Saint-Jean de l'Espinat. »
— En 1678, à l'occasion d'une visite de Mgr Amelot de Gournay, archevêque de Tours, le 19 mai, le curé de la paroisse de Barrou, dont dépendait l'Epinat, se vit dans l'obligation de présenter un état des charges et revenus, tant de la Chapelle que de la Commanderie, (...) fondée dans la paroisse, etc., ce qui montre qu'à cette époque relativement récente, l'Epinat avait encore une certaine importance.
D'autre part, on trouve actes de naissances et de sépultures de 1639 à 1750, pour des « mestayers », « laboureurs », « fermiers. »
Par contre, après la révolution, on ne parle plus que de « gardes forestiers », ce qui dénoterait un changement d'orientation de l'exploitation à partir de cette époque, les bois ayant remplacé les cultures (6).
Des anciens bâtiments de la Commanderie, il ne restait en 1791 qu'une petite habitation, une grange, une tour placée au milieu d'un préau et une petite chapelle tombant en ruines.
Pour Dufour, en 1812, celle-ci paraissait encore voûtée.

La situation actuelle de l'Epinat

Epinat, mur sud
Epinat, mur sud
Pour les ordinateurs

Actuellement, ne subsistent de la Chapelle que le portail et le mur sud,la tour a disparu ; quant aux bâtiments annexes, ils semblent n'avoir subi aucune modification depuis 1791.

Porche Occidental

Commanderie de l'Epinat
Porche Occidental
Sources image : M. Christian Dechêne

Le portail possède quatre voussures dont seule la plus basse est complète.
Sur la droite, nous remarquons trois chapiteaux forts érodés.
L'ébrasement en partie obstrué par des pierres d'apport, ne présente qu'une modeste ouverture au-dessus de laquelle nous pouvons distinguer une pierre fort curieuse. Celle-ci, encadrée, porte une croix tréflée en relief.

Croix tréflée en relief

Commanderie de l'Epinat
Croix tréflée en relief

Derrière le portail, le local qui sert de cellier offre une cheminée du XVe prouvant la réutilisation de cette chapelle en habitat.
A mi-hauteur, dans le mur Sud, existe une fenêtre obstruée.

Epinat, plan d'ensemble

Epinat, plan d'ensemble
Epinat, plan d'ensemble

Dans le jardin situé derrière les bâtiments se prolonge le mur Sud jusqu'à l'abside. Celui-ci, construit en moyen appareil présente, de son extrémité Ouest à l'abside, une épaisseur variant de 1,2 à 2 m.
A l'angle du mur du cellier et de celui de la chapelle a été érigé un support de voûte du XIIe dont on aperçoit les restes.
A côté du pilier, une porte en demi-cercle, murée, semble un ancien passage vers les bâtiments conventuels.
A 2,5 m, en partie enchâssé dans l'épaisseur du mur, s'élève un deuxième support de voûte.

Enfin subsistent du sanctuaire

Commanderie de l'Epinat
Deux colonne et Augelot (XIIe) — Sources image BNF
BNF

— Deux colonnettes encadrant la piscine. Celle de droite, a, à sa base, un ange d'une belle facture fin XIIe, supportant une colonne qui devait soutenir l'arc d'entrée.
Celle de gauche soutient le cintre d'une fenêtre dont nous devinons le départ.
— La piscine, en grande partie obstruée, dont ne dépasse que le faîte en plein-cintre, le reste étant enterré.
A l'extrémité orientale du choeur, le mur est détruit, laissant voir sa structure interne de blocage et de matériaux divers.

Les travaux de 1968

Commanderie de l'Epinat
L'Epinat, Barrou Fouilles. Sources dessin : M. Jean-Marie Geffard
Pour Ordinateurs

C'est le long de ce mur méridional, qu'étaient plantés de vieux sapins arrachés au printemps 1968. Nous avons accentué le déblaiement de cette parcelle en traçant une tranchée O.-E.
Nous trouvons, tout d'abord, un dallage en pierres biseautées. A 7 m. du chevet, celui-ci s'arrête, ayant été arraché. La couche supportant les dalles est constituée d'une faible épaisseur de mortier à laquelle font suite des remblais.
Au-dessous, des pierres de dimensions irrégulières forment la base même de l'édifice, car, ensuite, on ne voit plus qu'une mince couche de mortier avant l'argile vierge.
A 3,5 m. de la dernière dalle apparaît un mur formé dans sa largeur de sept pierres disposées en une seule rangée, la face chanfreinée tournée vers l'abside.
En-deçà, nous voyons les fondements en silex du mur du chevet.
Entre les deux, nous avons dégagé une sépulture.

La sépulture

Commanderie de l'Epinat
Sépulture, squelette

Le squelette, dans la position allongée, orienté N.-S., reposait sur la couche argileuse vierge et était entièrement recouvert de remblais.
Le niveau de pierres irrégulières (cailloutis), se prolongeait sur la sépulture (voir photo).

Le squelette, en bon état de conservation, le crâne orienté au N.-E., le membre supérieur gauche plié sur le bassin, celui de droite allongé parallèlement au corps, a été mesuré soigneusement :
Os des membres supérieurs
— Humérus droit : 27 cm (tête humérale droite, approximativement 0,32 cm).
— Humérus gauche : 27 cm.
— Cubitus droit : cassé.
— Cubitus gauche : 20 cm.
Tête
— Crâne : forme brachycéphale.
— Dentition : en bon état, 1 dent de sagesse.
Os des membres inférieurs
— Fémur droit : 36 cm.
— Fémur gauche : 36cm.
— Diamètre du fémur (en son milieu 0,20 cm pour le droit et le gauche).
— Tibia droit : 31 cm.
— Tibia gauche : 31 cm.
— Péroné droit : 29,5 cm.
— Péroné gauche : 29,5 cm.
Bassin
— Diamètre promonto pubien : 9 cm.
— Diamètre transverse : 10,5 cm.
— Diamètre entre les épines antéro-supérieures : 25 cm.

D'après les tables de, E. Rollet (1888), on peut affirmer qu'il s'agit d'un individu mesurant 140 ou 141 cm. (7).

D'autre part, les proportions du bassin, la forme du crâne et la finesse des os, nous permettent de conclure qu'il s'agit d'un squelette de femme.

Sa dentition et l'état général des os nous font penser qu'elle était âgée d'une trentaine d'années.

Derrière le talon gauche, une pièce de monnaie probablement en cuivre.

Elle présente sur l'une de ses faces, une croix, légèrement pattée comme on en voit sur celles du XII et XIIIe; tout autour semble être inscrite une devise.

Etudes des matériaux
Dans l'ensemble des remblais fouillés, tant devant, dessus et à l'intérieur de la sépulture, nous avons trouvé une grande quantité de fragments de verres fumés, ainsi que d'autres moins nombreux, d'une matière plus compacte, apparemment des vitraux oxydés par de nombreuses années en terre.

Etudes des matériaux
Etudes des matériaux. Dessin Jean-Marie Geffard

Ces derniers se présentent comme suit
— Numéros 1, 4, 5, 6, 8, 9 : une décoration géométrique à motifs ronds encadrés de points noirs bordés d'une bande de teinte brune, parfois violette.
— Numéros 2, 3 : présentent des bandes parallèles brunes et violettes sans autres motifs.
— N° 7 : semble être l'extrémité cassée d'un motif pouvant se rapporter à des fragments semblables aux précédents.
— N° 10 : décorations triangulaires encadrées par des petits points noirs.

Etudes des matériaux
Etudes des matériaux. Dessin Jean-Marie Geffard

— Numéros 11, 12, 13, 14 : sans motifs, mais d'une belle surface marbrée, légèrement bombée ; ils possèdent des rebords en partie taillés.
— N° 14 : en plus, présente une baguette d'un mm.

A signaler d'autre part, au-dessus de la sépulture, un petit fragment rond de terre cuite présentant un reste de coloration jaune : c'est peut-être un jeton de jeu.
A proximité, dans la couche de terre arable, nous avons découvert une perle percée, en bois (buis ?), de 5 mm, de diamètre.

La partie EST de l'édifice
Sur le bord oriental de la sépulture, dans sa structure verticale, après les dalles de silex, les restes de pierre de taille et de carrelage, de mortier, enfin de morceaux de silex laissant présumer de profonds bouleversements dans la structure originelle du chevet.
Il s'étend sur 1,5 m.
Le mur du chevet termine l'édifice par une belle courbe de pierres régulières reposant sur un même nombre de dalles de silex.
A signaler que nous avons trouvé à l'extrémité Nord de cette courbe des fragments de pierre présentant des traces de sculptures, mais trop endommagées pour en définir la forme exacte.
D'autre part, un mur en petit moellage achève l'encadrement de la sépulture dans la partie Nord du dégagement de terrain.
Seules les pierres d'angle présentent une belle coupe, les autres semblant avoir été utilisées à d'autres fins qu'à leur usage initial, et l'on devine des traces de noir de fumée en de nombreux endroits (incendie ?).
Le reste de la surface compris entre le mur du chevet et celui décrit précédemment est recouvert d'un mortier très résistant. Apparemment, l'on peut supposer qu'il devait y avoir des maçonneries à cet emplacement, en particulier la continuation du mur qui a été bouleversé.

Conclusion
Le squelette d'une femme dans un endroit si bien adapté à une sépulture, au centre du sanctuaire d'une Commanderie de Templiers, et apparemment d'époque XIIe-XIIIe, pose évidemment un problème d'identité.
Généreuse donatrice, qui, en remerciement fut inhumée là ; supérieure d'une dépendance du couvent des Religieuses de Rives, à Abilly, ... nous ne le savons pas.
D'autre part, le site semble avoir été bouleversé à une époque déjà lointaine, peut-être au moment de la dissolution de l'Ordre des Templiers, et remanié ensuite.
Un dégagement plus important devrait permettre dans les années à venir de se faire une opinion plus précise sur la Commanderie de l'Epinat, qui n'a probablement pas livré tous ses secrets.
Sources : M. Jean-Marie Geffard. Société Archéologique de Touraine, tome XXXV, année 1968. Tours 1969.

Notes — Commanderie de l'Epinat
1 — Je tiens à remercier pour sa compréhension M. le comte d'Escayrac, propriétaire de l'Epinat, et tous ceux qui ont bien voulu m'aider dans cette modeste étude : M. l'abbé Bourderioux, qui m'a conseillé et ouvert sa bibliothèque ; MM. G. et J. Louault, J. Gabillet, du Grand-Pressigny ; les jeunes de Descartes MM. A. et G. Dissais, M. et Y. Nédelec, P. Roussel.
2 — Dom Housseau, Catalogue analytique des Diplômes, Chartes et Actes relatifs à l'histoire de Touraine, Bibliothèque Municipale de Tours, ms. 1169 ; éditions Emile Mabille dans M.S.A.T., XIV (1863), page 399.
3 — Archives de l'abbaye de la Merci-Dieu, commune de la Roche-Posay. Estableau ou Etableaux, petit bourg au Sud du Grand-Pressigny, avait une importante place forte aux XIIe et XIIIe siècles.
4 — J.M. Dufour, Dictionnaire historique... des trois arrondissements... d'Indre-et-Loire, 2e Arrondissement (Loches), Tours, 1812, I, 9. — J.X. Carré de Busserolle, Dictionnaire... d'Indre-et-Loire et de l'ancienne province de Touraine, III, 18, dans M.S.A.T., XXIX, réédition 1966.
5 — Registre paroissial de Barrou, II, pages 249, 250, 251, 259.
6 — Ces données m'ont été transmises grâce à l'obligeance de notre collègue M. Christian Dechêne, de Barrou.
7 — Voir Simonin, Médecine Légale, Maloine, 1947. Toutes ces données nous ont été fournies par le Dr A. Pagès, du Grand-Pressigny, que nous tenons à remercier ici pour son amabilité.

Sources : M. Jean-Marie Geffard. Société Archéologique de Touraine, tome XXXV, année 1968. Tours 1969.

Commanderie de l'Epinat — Historique
La première mention connue citant la maison de l'Epinât (Domus de Lespinaz) remonte au XIIe siècle; la commanderie de Templiers de l'Epinât est mentionnée en 1220; elle comprenait une église à l'emplacement de laquelle : des fouilles ont révelé une sépulture du XIIe ou XIIIe siècle, des fragments de sculpture et de carrelage; de l'église subsistent le portail (restauré), une portion de mur de l'abside et des chapiteaux épars; au XIVe siècle, la commanderie passe aux hospitaliers de saint Jean de Jérusalem sous le nom de Saint-Jean de l'Epinât, puis aux chevaliers de Malte de la langue française du grand prieuré d'Aquitaine; au XVe ou XVIe siècle, la nef de l'église est coupée pour bâtir un logis dans la partie occidentale; en 1559 au moins, la maison de l'Epinât est affermée; vers 1800, la commanderie est annexée à la commanderie de Bilson; les dépendances de la ferme datent du XVIIIe siècle; après 1789, l'exploitation des forêts constitue le principal revenu de l'Epinât; en 1791, la ferme est en mauvais état et l'église est en ruines; des travaux récents pour remettre l'ensemble en état comprennent la démolition presque complete du mur Sud de l'église.

Epinat, Vue d'ensemble

Commanderie de l'Epinat
Epinat, Vue d'ensemble, du nord. — Sources : Joly, Jean-Pierre

http://www.culture.gouv.fr/documentation/memoire/HTML/IVR24/IA37001160/index.htm


Description
D'après le relevé de Geffard avant restauration, (1967), l'église était sur plan allongé à vaisseau unique ; le puits est couvert par un toit en pavillon.

Parties non étudiées
église; logis; four; étable; grange; puits; jardin

Commanderie de l'Epinat
Epinat, Vue d'ensemble, du nord-ouest — Sources : Joly, Jean-Pierre

http://www.culture.gouv.fr/documentation/memoire/HTML/IVR24/IA37001160/index.htm


Epoque de construction
12e siècle; XVe siècle (?); XVIe siècle (?); XVIIIe siècle
Commanderie de l'Epinat — Sources : Ministère de la Culture et de la Communication
http://www.culture.gouv.fr/documentation/memoire/HTML/IVR24/IA37001160/index.htm
Nemus de Spinantia (1)
La forêt de l'Épinat s'étendait, entre la Creuse et la Claise, sur les paroisses d'Abilli, du Grand-Pressigni, de la Guierche et de Barrou. Cette forêt a donné son nom à une commanderie de Saint-Jean de Jérusalem fondée au milieu des landes dont elle était en grande partie composée au treizième et au quatorzième siècle.
1. Charte de l'abbaye de Noyers, année 1213.

On comptait en Touraine dix commanderies ou préceptorats de l'ordre de Malte ou de Saint-Jean de Jérusalem, savoir :
Le préceptorat et commanderie d'Amboise.
Le préceptorat et commanderie de Saint-Jean de Balan.
Le préceptorat et commanderie de Brizay.
Le préceptorat de l'Épinat, commune de Barrou, réuni, au dix- septième siècle, à la commanderie de Brizay.
Le préceptorat et commanderie de Fretay avec l'hôpital de la commanderie, commune de Doulus.
Le préceptorat de la Haye.
Le préceptorat et commanderie de Saint-Jean de l'Isle Bouchard.
Le préceptorat de Tavant avec l'hôpital de la commanderie à Chinon.
La commanderie de Villejésus près Bossay.
La commanderie de la Ghastre-aux-Grolles réunie à la commanderie de Fretay en 1643.
Sources : Emile Mabille. Notice sur les divisions territoriales et la topographie de l'ancienne province de Touraine Bibliothèque de l'école des chartes, Année 1865, Volume Numéro 26 pages 303-337

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